Notre corps sâen prend plein la figure quand nous ne sommes pas suffisamment vigilants. Nous nous donnons corps et âme dans nos vies assaillies, tout en oubliant souvent de faire attention à lâétat de notre corps, à ses faiblesses et à ses limites. Nous lâutilisons, lâusons même, au-delà de la raison, et sommes surpris quâil déraille ou nous lâche de temps à autre. De petits signaux dâalerte retentissent régulièrement, mais il semblerait que nous ayons les oreilles dures et soyons des têtes de mules.
Câest vrai quâil nous est difficile de toujours écouter ce que notre corps commande, dâautant plus que notre époque nous en demande toujours plus, et ce, jusquâà de plus en plus tard. Une chose qui était tout au moins positive pendant les confinements était que nous étions au repos⦠forcé. Il ne sâagit pas ici dâinactivité complète âti lipied lor gro lipiedâ tout en se tournant les pouces, mais de prendre du recul au lieu de se laisser engouffrer dans mille et une affaires.
Je ne voudrais pas mettre le pied dans le plat par rapport à ce que nous souhaitons au plus profond de notre âme, mais force est de constater que nos maux ne s’arrêteront pas là . Je ne mets pas la main au feu, mais vu la situation économique du pays, nous sommes bien forcés de continuer notre combat acharné et de travailler d’arrache-pied jusquâà ce que la retraite, tant espérée et bien méritée, ne sâoffre à nous pour ceux que cela concerne. Elle ne tombera pas comme un cheveu sur la soupe : patience et persévérance sont encore de mise pour beaucoup dâentre nous. De plus, il ne sert à rien de couper un cheveu en quatre pour trouver la solution miracle dans lâimmédiat, puisquâil nây en a pas. Mais pensons-y un peu : il suffirait, peut-être, dâun petit rien pour ne pas passer à côté du sens de notre vie au risque de le manquer dâun poil.
Notre vie ne connaîtra pas de calme aussitôt. Nous jonglons avec plusieurs engagements et ne savons même plus où donner de la tête. Ce nâest pas que nous nâen faisons quâà notre tête, puisque nous sommes happés dans un engrenage incontrôlé. Nous nous sommes, nous-mêmes, rendus esclaves de nos activités et tout devient compliqué.
Il faut se creuser la tête pour voir comment remédier à cet état des choses. Nous nâencourageons personne à prendre des décisions sur un coup de tête, ce qui serait déraisonnable, mais nous conseillons de prendre le temps, de temps à autre, dâavoir la tête dans les étoiles. La rêverie, moi, ça me donne un coup de pouce.
Dans mes rêves, je me vois mettre un pied devant lâautre dans un jardin. Si je parle de jardin, ce nâest pas parce que jâai la main verte, mais câest juste histoire de faire les yeux doux aux fleurs et aux oiseaux, tout en regardant les lianes se faufiler dâarbre en arbre. Je traverse les sentiers, mâarrête devant un puits aux mille reflets et traîne pendant cette balade paradisiaque. à quoi cela servirait-il de la faire en un clin d’Åil ? Si vous pensez que dans mes rêves, jâirai à cent à lâheure, vous vous mettez un doigt dans l’Åil. Et si je me surprends, là aussi, embarquée dans une spirale infernale, je me tirerai les oreilles.
Je me jette à bras le corps dans cette évasion réparatrice. La raison principale en est de mâaider à dormir sur les deux oreilles. Lâesprit libre est tellement plus reposant, et le repos est le secret des beaux matins ensoleillés, même lorsquâil pleut.
Dans ce jardin, il nây a personne pour casser les pieds et gare à celui qui tente dâempêcher cette aventure, en arrivant la bouche en cÅur pour amadouer et faire croire que ce lieu nâest qu’inutile utopie. Mais à vue de nez, il nây a personne qui rôde, à part celles enthousiasmées par cette escapade et qui veulent bien sây laisser entraîner elles aussi.
Tout cela vous met lâeau à la bouche et je le conçois bien. Dans ce jardin luxuriant, lâeau y est pure et vivifiante, les mélodies sont angéliques et adoucissent les mÅurs, et lâair frais effleure la peau avec délicatesse. Ici, point de malentendus et de mauvaises interprétations. Notre corps, qui en a déjà plein le dos, reste bouché bée devant une telle impression de béatitude.
à me lire, vous croyez, sans doute, que jâai un coup dans le nez. Que nenni ! La griserie peut venir de la plénitude qui veut nous habiter à tout instant. Nous sommes juste trop fermés, trop durs, trop âcarapacésâ pour laisser la douceur nous envahir. Et nous nous étonnons, ensuite, dâavoir plein le dos ! Quel toupet !
Pour ce que cela vaut, je vous partage et murmure dans le coin de lâoreille mon secret : pour me décharger de mon fardeau et accéder à ce jardin, il faut un peu dâhumour, de rêverie et peu de complications.
Mais comme les murs ont des oreilles, il se pourrait que plusieurs curieux aient entendu cette petite confidence faite juste avant, et câest tant mieux ! Nous serons ainsi plus nombreux dans ce jardin échappatoire à nous libérer le dos. Et comme dit le dicton, plus on est de fous, plus on rit. Câest le pied !