Que reste-t-il ?

À deux semaines de la fin de cette année 2024, il serait de bon goût de se retourner pour faire un constat de ces derniers mois. C’est le temps de remettre en perspective nos échecs et nos accomplissements, d’évaluer les obstacles franchis, de constater les trahisons, d’accepter les imprévus, surtout ceux auxquels nous voudrions n’avoir jamais eu à faire face.
De ce bilan, que restera-t-il ?
Que reste-t-il lorsque tout est passé et que les instants se sont envolés ? Les mots se sont inscrits et d’autres se sont déjà effacés. Certains souvenirs sont désormais gravés dans la mémoire et d’autres sont comme des empreintes sur la plage, à peine visibles, ils finiront par disparaître à jamais.
Que reste-t-il des sourires et des regards échangés, des moments simples et précieux, de la douleur indescriptible et de la chaleur humaine qui persiste au-delà des adieux ?
Que reste-t-il de nos relations, des éclats de rire partagés, des mots murmurés à l’oreille et des gestes tendres qui parlent sans bruit ?
Il y a eu des rêves non réalisés, inassouvis, et des promesses jamais tenues. Quant aux rêves accomplis, jusqu’où nous ont-ils menés ? Ont-ils été plus beaux que prévu ? Certainement qu’il y en a eu qui ont éclairé nos journées et surtout nos nuits, alors que nous voudrions retenir d’autres indéfiniment, mais petit à petit, ils s’étiolent, se dissipent, s’évaporent…
Ces derniers mois, il y a eu des souvenirs et des passions qui nous ont tenus debout et nous ont fait espérer. D’autres nous ont déçus ou usés jusqu’à l’épuisement, nous laissant désabusés.
Des bouquets de fleurs ont illuminé les visages lors de surprises organisées ou d’instants joyeusement volés : yeux ébahis, attendris et larmoyants devant de simples pétales entourés de végétal. Des fleurs pleines de couleur et de fraîcheur, qui se sont épanouies au fil des jours pour se faner sur un meuble ou sous la pluie pour toujours.
Et qu’en est-il de nos actions ? Et du bien que nous nous sommes promis de faire ? Y sommes-nous parvenus ou avons-nous abandonné ? Nous aurions pu mieux faire, c’est sûr ! Mais si nous les avons réalisés avec amour, c’est déjà beaucoup. C’est déjà bien ! Quant à nos bonnes actions, l’étaient-elles vraiment pour le bien de tous ou étaient-elles bonnes qu’à combler un de nos petits plaisirs ? Étaient-elles destinées à l’ardeur de nos désirs ? Et avons-nous réfléchi au fait que le bien d’hier n’était peut-être pas celui du lendemain ?
Que reste-t-il de la poésie de la vie, des amours et du désir d’éternité ? Des ruelles empruntées pour errer sans but et du ciel scruté pour aller au-delà, se perdre un peu, s’évader quelques secondes, pour mieux se retrouver.
Et qu’entends-je au loin, sur cette route pavée des bilans où le soleil étend ses rayons jusqu’au moindre recoin ? Une douce musique se faufile dans les fissures et les fêlures et nous rappelle à quel point la vie est fragile, et que tout ne tient qu’à un fil.
Tout cela me fait traverser cette vie sur un air du temps serein, pour un pas de deux, avec de petites choses simples qui ne valent trois fois rien.
Les photographies ont jauni, les selfies et autres photos inondent nos galeries, les livres ont été lus et certains relus, les enfants ont grandi, des adultes ont vieilli. Avons-nous oublié ? Les rencontres que nous banalisons comme le hasard, les amitiés sincères et les amours saines. Les images du passé d’une maison inoccupée, les objets familiers, l’odeur de l’air après la pluie. Le parfum de la peau peut-être aussi.
Et que reste-t-il de ceux qui abusent, profitent, étouffent ? Ceux qui observent sans remords, avec un air de contentement, de satisfaction même, les dégâts qu’ils ont causés ? Que reste-t-il des chatwas, des vendus, des corrompus, des truands, des lâches et de ceux qui fuient ?
Et qu’en est-il des abandonnés, des pauvres, des malades et des mourants ?
Ce qui reste, ce sont ces petites choses qui, invisibles, font écho à l’histoire de notre vie. Notre héritage !
Ce qui reste, c’est l’essence de ce que nous avons vécu, invisible, mais puissante. Des traces de vies croisées, de rires et de larmes qui, comme des pierres dans un ruisseau, façonnent lentement notre être. Tout comme le potier façonne la terre entre ses mains pour extraire un bel objet de cette poussière nourrie d’eau et de tendresse, le meilleur et le plus beau peut être tiré de nous aussi, si nous avons suffisamment « d’insuffisance », je veux dire suffisamment d’humilité, pour se laisser manier et diriger par Celui qui sait.
Et même quand tout semble s’effacer, il reste ce qui nous unit, intangible et précieux. Il reste l’unique et le principal. Il reste et restera toujours ce qui vient d’en haut qui fait battre notre cœur chaque jour… C’est cela le plus beau !

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