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Du texte à l'hypertexte

Cicéron, De la Réponse des Haruspices

Chapitre VI-X

  Chapitre VI-X

[6] VI. Quelle est donc dans cette ville immense, quelle est la maison qui soit, autant que la mienne, exempte et libre de toute consécration? Les vôtres, pères conscrits, celles des autres citoyens le sont, pour la plus grande partie; la mienne est la seule dans Rome qui ait été déclarée telle par tous les jugements. Je vous atteste ici, Lentulus, et vous, Philippe. D'après la réponse des aruspices, le sénat a ordonné que vous lui feriez votre rapport sur les lieux consacrés et religieux. Ma maison peut-elle être l'objet de ce rapport, quand elle est la seule dans Rome que tous les tribunaux, comme je l'ai dit, ont relevée de toute interdiction religieuse? Premièrement, dans ces temps de trouble et de désordre, mon ennemi lui-même, parmi tant d'autres infamies qu'avait tracées pour lui la main impure de Sext. Clodius, n'a point hasardé un seul mot relatif à la consécration. En second lieu, le peuple romain, en qui réside le pouvoir suprême, a ordonné dans une assemblée par centuries, à l'unanimité de tous les âges et de tous les ordres, que cette même maison serait réintégrée dans tous ses droits.
Ensuite vous avez décidé, pères conscrits, que cette affaire serait renvoyée devant le collége des pontifes, non qu'il restât aucune incertitude; mais vous vouliez fermer la bouche à ce furieux, s'il s'obstinait à demeurer au sein d'une ville qu'il brûlait d'anéantir. Dans nos doutes, je dirai même dans nos craintes les plus superstitieuses, il suffit d'une réponse, d'un mot de Servilius et de Lucullus, pour tranquilliser les consciences les plus timorées. Quand il s'agit des sacrifices publics, des grands jeux, du culte des dieux pénates et de Vesta, de ce sacrifice même qui s'offre pour le salut du peuple romain, et qui, depuis que Rome existe, n'a jamais été souillé que par le crime de ce vertueux protecteur de la religion, la décision de trois pontifes a toujours été pour le peuple romain, pour le sénat, pour les immortels eux-mêmes, une autorité assez imposante, assez auguste, assez religieuse. Mais ici, quelle foule de suffrages réunis en ma faveur ! P. Lentulus, consul et pontife; P. Servilius, M. Lucullus, Q. Métellus, M. Glabrion, M. Messalla, L. Lentulus, prêtre de Mars; P. Galba, Q. Scipion, C. Fannius, M. Lépidus, L. Claudius, roi des sacrifices; M. Scaurus, M. Crassus, C. Curion, Sext. César, prêtre de Romulus; Q. Cornelius, P. Albinovanus, Q. Térentins, petits pontifes, après que ma cause a été instruite et plaidée dans deux tribunaux, sous les yeux d'une multitude de citoyens distingués par leur rang et leurs lumières, ont tous, d'une voix unanime, prononcé que ma maison n'était frappée d'aucune interdiction religieuse.
[6] VI. Sed quae tandem est in hac urbe tanta domus ab ista suspicione religionis tam uacua atque pura? Quamquam uestrae domus, patres conscripti, ceterorumque ciuium multo maxima ex parte sunt liberae religione, tamen una mea domus iudiciis omnibus liberata in hac urbe sola est. Te enim appello, Lentule, et te, Philippe. Ex hoc haruspicum responso decreuit senatus ut de locis sacris religiosis ad hunc ordinem referretis. Potestisne referre de mea domo, quae, ut dixi, sola in hac urbe omni religione omnibus iudiciis liberata est? Quam primum inimicus ipse in illa tempestate ac nocte rei publicae, cum cetera scelera stilo illo impuro Sex- Clodi ore tincto conscripsisset, ne una quidem attigit littera religionis; deinde eandem domum populus Romanus, cuius est summa potestas omnium rerum, comitiis centuriatis omnium aetatum ordinumque suffragiis eodem iure esse iussit quo fuisset; postea uos, patres conscripti, non quo dubia res esset, sed ut huic furiae, si diutius in hac urbe quam delere cuperet maneret, uox interdiceretur, decreuistis ut de mearum aedium religione ad pontificum conlegium referretur. (12) Quae tanta religio est qua non in nostris dubitationibus atque in maximis superstitionibus unius P- Seruili aut M- Luculli responso ac uerbo liberemur? De sacris publicis, de ludis maximis, de deorum penatium Vestaeque matris caerimoniis, de illo ipso sacrificio quod fit pro salute populi Romani, quod post Romam conditam huius unius casti tutoris religionum scelere uiolatum est, quod tres pontifices statuissent, id semper populo Romano, semper senatui, semper ipsis dis immortalibus satis sanctum, satis augustum, satis religiosum esse uisum est. At uero meam domum P- Lentulus, consul et pontifex, P- Seruilius, M- Lucullus, Q- Metellus, M- Glabrio, M- Messalla, L- Lentulus, flamen Martialis, P- Galba, Q- Metellus Scipio, C- Fannius, M- Lepidus, L- Claudius rex sacrorum, M- Scaurus, M- Crassus, C- Curio, Sex- Caesar flamen Quirinalis, Q- Cornelius, P- Albinouanus, Q- Terentius, pontifices minores, causa cognita, duobus locis dicta, maxima frequentia amplissimorum ac sapientissimorum ciuium adstante, omni religione una mente omnes liberauerunt.
[7] VII. J'ose assurer que, depuis l'établissement des lois sur le culte, dont l'origine remonte à celle de Rome, jamais le collége des pontifes ne s'est assemblé en aussi grand nombre pour prononcer même sur la vie des prêtresses de Vesta, quoique dans une telle circonstance il soit important que beaucoup de personnes assistent à l'instruction du procès; car les pontifes deviennent juges, et leur décision forme un arrêt souverain. Un seul pontife instruit peut suffire pour régler une expiation : ce qui ne serait ni humain ni équitable dans un jugement capital. Or, vous trouverez que les pontifes ont prononcé sur ma maison en plus grand nombre qu'ils ne le firent jamais dans les causes des Vestales. Le lendemain, les consuls P. Lentulus et Q. Métellus mirent l'affaire en délibération dans le sénat. Tous les pontifes qui appartenaient à cet ordre étaient présents. Lentulus, consul désigné, opina le premier. Et après que les autres, à qui les honneurs du peuple romain donnent la préséance, se furent étendus fort au long sur le jugement du collège, et que tons ensemble eurent assisté à la transcription du décret, le sénat prononça que ma maison était affranchie de toute consécration par le jugement des pontifes. Comment cette maison, la seule de toutes les propriétés privées que les chefs de la religion aient déclaré eux-mêmes n'être pas consacrée, peut-elle être précisément ce lieu sacré dont parlent les aruspices?
Au reste, faites le rapport ordonné par le sénatus-consulte. Ou vous serez chargés de cet examen, vous qui avez opiné les premiers sur ma maison, vous qui l'avez affranchie de tout service religieux; ou l'affaire sera jugée par le sénat, qui a déjà prononcé à l'unanimité des voix, si l'on excepte celle de ce grand maître des cérémonies religieuses; ou enfin, et sans doute c'est le parti qu'on prendra, elle sera renvoyée devant les pontifes, à l'autorité, à la probité, à la prudence desquels nos ancêtres ont confié tout ce qui concerne la religion et les sacrifices, tant publics que privés. Peuvent-ils juger autrement qu'ils n'ont fait? Pères conscrits, la possession de beaucoup de maisons, et peut-être de toutes celles qui sont dans Rome, est appuyée sur les droits les plus légitimes. Cependant, soit qu'on les possède à titre d'héritage, ou d'une longue et paisible jouissance, à titre d'achat ou d'engagement, j'ose dire que nul propriétaire n'a un droit plus incontestable que le mien : si, d'un autre côté, on examine le droit public, toutes les lois divines et humaines me garantissent ma maison de la manière la plus certaine. Dans ce moment, le sénat la fait bâtir aux frais de l'État; une foule de sénatus-consultes la protègent et la défendent contre les efforts criminels de ce gladiateur.
[7] VII. (13) Nego umquam post sacra constituta, quorum eadem est antiquitas quae ipsius urbis, ulla de re, ne de capite quidem uirginum Vestalium, tam frequens conlegium iudicasse. Quamquam ad facinoris disquisitionem interest adesse quam plurimos (ita est enim interpretatio illa pontificum, ut eidem potestatem habeant iudicum), religionis explanatio uel ab uno pontifice perito recte fieri potest (quod idem in iudicio capitis durum atque iniquum est), tamen sic reperietis, frequentiores pontifices de mea domo quam umquam de caerimoniis uirginum iudicasse. Postero die frequentissimus senatus te consule designato, Lentule, sententiae principe, P- Lentulo et Q- Metello consulibus referentibus statuit, cum omnes pontifices qui erant huius ordinis adessent, cumque alii qui honoribus populi Romani antecedebant multa de conlegi iudicio uerba fecissent, omnesque idem scribendo adessent, domum meam iudicio pontificum religione liberatam uideri. (14) De hoc igitur loco sacro potissimum uidentur haruspices dicere, qui locus solus ex priuatis locis omnibus hoc praecipue iuris habet, ut ab ipsis qui sacris praesunt sacer non esse iudicatus sit? Verum referte, quod ex senatus consulto facere debetis. Aut uobis cognitio dabitur, qui primi de hac domo sententiam dixistis et eam religione omni liberastis, aut senatus ipse iudicabit, qui uno illo solo antistite sacrorum dissentiente frequentissimus antea iudicauit, aut, - id quod certe fiet, - ad pontifices reicietur, quorum auctoritati fidei prudentiae maiores nostri sacra religionesque et priuatas et publicas commendarunt. Quid ergo ii possunt aliud iudicare ac iudicauerunt? Multae sunt domus in hac urbe, patres conscripti, atque haud scio an paene cunctae iure optimo, sed tamen iure priuato, iure hereditario, iure auctoritatis, iure mancipi, iure nexi: nego esse ullam domum aliam priuato eodem quo quae optima lege, publico uero omni praecipuo et humano et diuino iure munitam; (15) quae primum aedificatur ex auctoritate senatus pecunia publica, deinde contra uim nefariam huius gladiatoris tot senati consultis munita atque saepta est.
[8] VIII. Les mêmes magistrats, à qui l'on remet la république entière dans les plus grands périls, ont été chargés, l'année dernière, de veiller à ce qu'aucune violence ne me troublât pendant que je la ferais rebâtir; et lorsque Clodius est venu, armé de pierres, de flambeaux et d'épées pour détruire mes travaux, le sénat a prononcé que les agresseurs étaient coupables de violence publique. Et sur votre rapport, ô vous les plus intrépides et les plus vertueux consuls qui furent jamais, le même sénat a décidé que toute attaque contre ma maison serait censée un attentat contre la république.
Non, il n'est point d'édifice public, point de monument, point de temple qui ait été l'objet d'autant de sénatus-consultes. C'est la seule maison, depuis la fondation de Rome, que le sénat ait jugé devoir être bâtie aux dépens de l'État, réhabilitée par les pontifes, garantie par les magistrats, vengée par les tribunaux. Une maison sur le sommet de Vélie fut donnée par la république à Valérius pour prix de ses grands services : la république m'en a rétabli une sur le mont Palatin. On donna un emplacement à Valérius : on m'a donné une maison toute construite. Sa possession n'était garantie que par les droits d'une propriété personnelle : la mienne a été mise sous la sauvegarde de tous les magistrats. Si je m'étais procuré moi-même ces avantages, si je les tenais d'autres que de vous, je ne les vanterais pas ici; je craindrais de paraître me glorifier moi-même. Mais, puisque je les ai reçus de vous, puisqu'ils sont calomniés par le destructeur de cette maison que vos propres mains ont relevée pour moi et mes enfants, ce n'est pas de mes propres faits que je parle, mais des vôtres; et je ne crains pas que cet éloge de vos bienfaits paraisse dicté par l'orgueil plutôt que par la reconnaissance.
Au surplus, quand même, après tant de travaux soutenus pour le salut commun, le sentiment d'une juste indignation m'emporterait quelquefois jusqu'à me glorifier moi-même, en réfutant les calomnies des méchants, qui pourrait s'en offenser? J'entendis hier les murmures d'un certain homme, qui, m'a-t-on dit, ne pouvait me pardonner de ce qu'au moment où cet infâme parricide me demandait à quel pays j'appartenais, je répondis, avec votre approbation, avec l'approbation des chevaliers romains, que j'appartenais à un pays qui n'avait pu se passer de moi. Il m'a semblé l'entendre gémir. Que fallait-il donc répondre? j'en fais juge cet homme même, qui ne peut me pardonner. Que j'étais citoyen romain? La réponse eût été ingénieuse et piquante. Fallait-il me taire? c'eût été me trahir moi-même. Un homme qui a soulevé l'envie en faisant de grandes choses, peut-il, sans se donner quelques louanges, répondre avec assez de force aux outrages de la haine? Mais lui, lorsqu'on l'attaque, il répond ce qu'il peut; il est même charmé que ses amis lui suggèrent ce qu'il doit dire.
[8] VIII. Primum negotium isdem magistratibus est datum anno superiore, ut curarent ut sine ui aedificare mihi liceret, quibus in maximis periculis uniuersa res publica commendari solet; deinde, cum ille saxis et ignibus et ferro uastitatem meis sedibus intulisset, decreuit senatus eos qui id fecissent lege de ui, quae est in eos qui uniuersam rem publicam oppugnassent, teneri. Vobis uero referentibus, o post hominum memoriam fortissimi atque optimi consules! decreuit idem senatus frequentissimus qui meam domum uiolasset contra rem publicam esse facturum. (16) Nego ullo de opere publico, de monumento, de templo tot senatus exstare consulta quot de mea domo, quam senatus unam post hanc urbem constitutam ex aerario aedificandam, a pontificibus liberandam, a magistratibus defendendam, a iudicibus puniendam putarit. P- Valerio pro maximis in rem publicam beneficiis data domus est in Velia publice, at mihi in Palatio restituta; illi locus, at mihi etiam parietes atque tectum; illi quam ipse priuato iure tueretur, mihi quam publice magistratus omnes defenderent. Quae quidem ego si aut per me aut ab aliis haberem, non praedicarem apud uos, ne nimis gloriari uiderer; sed cum sint mihi data a uobis, cum ea attemptentur eius lingua cuius ante manu euersa uos mihi et liberis meis manibus uestris reddidistis, non ego de meis sed de uestris factis loquor, nec uereor ne haec mea uestrorum beneficiorum praedicatio non grata potius quam adrogans uideatur. (17) Quamquam si me tantis laboribus pro communi salute perfunctum ecferret aliquando ad gloriam in refutandis maledictis hominum improborum animi quidam dolor, quis non ignosceret? Vidi enim hesterno die quendam murmurantem, quem aiebant negare ferri me posse, quia, cum ab hoc eodem impurissimo parricida rogarer cuius essem ciuitatis, respondi me, probantibus et uobis et equitibus Romanis, eius esse quae carere me non potuisset. Ille, ut opinor, ingemuit. Quid igitur responderem? quaero ex eo ipso qui ferre me non potest. Me ciuem esse Romanum? litterate respondissem. An tacuissem? desertum negotium. Potest quisquam uir in rebus magnis cum inuidia uersatus satis grauiter inimici contumeliis sine sua laude respondere? At ipse non modo respondet quidquid potest, cum est lacessitus, sed etiam gaudet se ab amicis quid respondeat admoneri.
[9] IX. Puisque ma cause ne laisse plus de difficultés, voyons donc ce que disent les aruspices. Je l'avoue, la grandeur du prodige, le ton effrayant de la réponse, cette unanimité constante des aruspices, ont fait sur moi la plus forte impression. Ces objets ne me sont pas entièrement étrangers. Si, parmi tant de personnes livrées comme moi aux affaires, je parais peut-être donner aux lettres plus de temps que les autres, ne croyez pas cependant que je fasse mon seul amusement ou ma seule occupation de ces études, qui nous éloignent et nous détournent de la religion. Et d'abord je regarde nos ancêtres comme nos guides et nos maîtres dans tout ce qui concerne le culte des dieux. Telle est l'idée que je me suis formée de leur sagesse, que, selon moi, c'est avoir déjà fait de grands progrès dans la science que d'être en état, je ne dirai pas d'atteindre à de si hautes connaissances, mais d'en comprendre toute l'étendue. Ils ont pensé que les rites sacrés et l'ordre des cérémonies religieuses regardent les pontifes, que l'explication des heureux présages appartient aux augures, que le dépôt des anciennes prédictions d'Apollon est renfermé dans les livres sibyllins, et les explications des prodiges, dans la doctrine des Étrusques : doctrine admirable, qui, de nos jours, a prédit d'une manière si précise les funestes commencements de la guerre Sociale, ces fureurs de Sylla et de Cinna, presque fatales à la république, et dans les derniers temps enfin, cette conjuration formée pour embraser Rome et renverser l'empire.
Mes études m'ont appris, de plus, que des hommes justement renommés pour leur science et leur sagesse ont, laissé un grand nombre d'ouvrages sur la puissance des dieux. Dans ces livres, qui semblent écrits sous l'inspiration divine, on croit apercevoir que nos ancêtres ont été les maîtres plutôt que les disciples de ceux qui les ont composés. En effet, pour peu qu'on élève ses regards vers le ciel, est-il un mortel assez stupide pour ne pas sentir qu'il existe des dieux, et pour attribuer au hasard ces ouvrages dont l'ordre et l'enchaînement sont le désespoir de la sagesse humaine? et peut-on admettre l'existence des dieux sans reconnaître en même temps que c'est à leur protection suprême que notre empire immense a dû son origine, ses accroissements et sa conservation? Nous avons beau nous flatter, pères conscrits, nous ne l'avons emporté ni sur les Espagnols par le nombre , ni sur les Gaulois par la force, ni sur les Carthaginois par la ruse, ni sur les Grecs par les arts, ni sur les Latins eux-mêmes et les Italiens par ce sens exquis, fruit du climat sous lequel nous vivons. Mais la piété, mais la religion, mais surtout cette sagesse qui nous a fait reconnaître que tout est réglé et gouverné par la puissance des dieux immortels : voilà, pères conscrits, ce qui nous distingue des autres nations; c'est à ce titre: que nous l'avons emporté sur tous les peuples de l'univers.
[9] IX. (18) Sed quoniam mea causa expedita est, uideamus nunc quid haruspices dicant. Ego enim fateor me et magnitudine ostenti et grauitate responsi et una atque constanti haruspicum uoce uehementer esse commotum; neque is sum qui, si cui forte uideor plus quam ceteri qui aeque atque ego sunt occupati uersari in studio litterarum, his delecter aut utar omnino litteris quae nostros animos deterrent atque auocant a religione. Ego uero primum habeo auctores ac magistros religionum colendarum maiores nostros, quorum mihi tanta fuisse sapientia uidetur ut satis superque prudentes sint qui illorum prudentiam non dicam adsequi, sed quanta fuerit perspicere possint; qui statas sollemnisque caerimonias pontificatu, rerum bene gerundarum auctoritates augurio, fatorum ueteres praedictiones Apollinis uatum libris, portentorum expiationes Etruscorum disciplina contineri putauerunt; quae quidem tanta est ut nostra memoria primum Italici belli funesta illa principia, post Sullani Cinnanique temporis extremum paene discrimen, tum hanc recentem urbis inflammandae delendique imperi coniurationem non obscure nobis paulo ante praedixerint. (19) Deinde, si quid habui oti, etiam cognoui multa homines doctos sapientisque et dixisse et scripta de deorum immortalium numine reliquisse; quae quamquam diuinitus perscripta uideo, tamen eius modi sunt ut ea maiores nostri docuisse illos, non ab illis didicisse uideantur. Etenim quis est tam uaecors qui aut, cum suspexit in caelum, deos esse non sentiat, et ea quae tanta mente fiunt ut uix quisquam arte ulla ordinem rerum ac necessitudinem persequi possit casu fieri putet, aut, cum deos esse intellexerit, non intellegat eorum numine hoc tantum imperium esse natum et auctum et retentum? Quam uolumus licet, patres conscripti, ipsi nos amemus, tamen nec numero Hispanos nec robore Gallos nec calliditate Poenos nec artibus Graecos nec denique hoc ipso huius gentis ac terrae domestico natiuoque sensu Italos ipsos ac Latinos, sed pietate ac religione atque hac una sapientia, quod deorum numine omnia regi gubernarique perspeximus, omnis gentis nationesque superauimus.
[10] X. Ainsi, pour ne pas m'étendre davantage sur un fait qui ne laisse aucun doute, prêtez l'oreille, et donnez la plus sérieuse attention aux paroles des aruspices : COMME UN BRUIT S'EST FAIT ENTENDRE AVEC FRACAS DANS LE LATIUM. Je ne parle plus des aruspices, ni de ces leçons qu'on dit avoir été données à l'Étrurie par les immortels eux-mêmes. Ici chacun de nous ne peut-il pas être aruspice? UN BRUIT SOUTERRAIN, UN HORRIBLE CLIQUETIS D'ARMES, ONT ÉTÉ ENTENDUS DANS UN CHAMP VOISIN, AUX PORTES DE ROME. Parmi ces géants que les poètes nous représentent armés contre les maîtres du ciel, en serait-il un seul assez impie pour ne pas avouer que, par ce mouvement si nouveau, si effrayant, les dieux annoncent et présagent au peuple romain quelque grand événement? C'est à ce sujet qu'il est écrit que des expiations sont dues à Jupiter, à Saturne, à Neptune, à Tellus, et aux divinités célestes.
Je vois à quels dieux outragés on doit des expiations; mais je cherche quels délits ont été commis par les hommes. LES JEUX ONT ÉTÉ CÉLÉBRÉS AVEC NÉGLIGENCE, ET PROFANES. Quels jeux ? Lentulus, c'est à vous que je m'adresse; les brancards, les chars, les hymnes, les jeux, les libations, les banquets sacrés sont confiés à votre sacerdoce : pontifes, c'est à vous que les ministres des banquets dénoncent toutes les omissions, toutes les fautes qui ont pu être commises; c'est d'après votre jugement qu'on en recommence la célébration. Et bien ! dites-nous quels jeux ont été célébrés avec négligence; dites-nous quelle est ou l'énormité ou la nature du crime qui les a souillés. Vous répondrez pour vous, pour vos collègues, pour le collége des pontifes, que rien n'a été omis par négligence, que rien n'a été souillé par le crime, que toutes les formalités, que toutes les cérémonies prescrites ont été observées avec une exactitude scrupuleuse.
[10] X. (20) Qua re, ne plura de re minime loquar dubia, adhibete animos, et mentis uestras, non solum auris, ad haruspicum uocem admouete: Quod in agro Latiniensi auditus est strepitus cum fremitu. Mitto haruspices, mitto illam ueterem ab ipsis dis immortalibus, ut hominum fama est, Etruriae traditam disciplinam: nos nonne haruspices esse possumus? Exauditus in agro propinquo et suburbano est strepitus quidam reconditus et horribilis fremitus armorum. Quis est ex gigantibus illis, quos poetae ferunt bellum dis immortalibus intulisse, tam impius qui hoc tam nouo tantoque motu non magnum aliquid deos populo Romano praemonstrare et praecinere fateatur? De ea re scriptum est: Postiliones esse Ioui, Saturno, Neptuno, Telluri, dis caelestibus. (21) Audio quibus dis uiolatis expiatio debeatur, sed hominum quae ob delicta quaero. Ludos minus diligenter factos pollutosque. Quos ludos? Te appello, Lentule, - tui sacerdoti sunt tensae, curricula, praecentio, ludi, libationes epulaeque ludorum, - uosque, pontifices, ad quos epulones Iouis Optimi Maximi, si quid est praetermissum aut commissum, adferunt, quorum de sententia illa eadem renouata atque instaurata celebrantur. Qui sunt ludi minus diligenter facti, quando aut quo scelere polluti? Respondebis et pro te et pro conlegis tuis, etiam pro pontificum conlegio, nihil cuiusquam aut neglegentia contemptum aut scelere esse pollutum: omnia sollemnia ac iusta ludorum omnibus rebus obseruatis summa cum caerimonia esse seruata.


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Dernière mise à jour : 13/04/2004