Contacter l'auteur / Contact the author

Recherche dans ce site / Search in this site

 

 

Les comètes

Anatomie (II)

L'image de la "boule de glace sale" avancée par Fred L. Whipple[2] en 1950 est aujourd'hui classique et à peu de choses près confirmée par les missions spatiales vers Halley en 1986. Une comète est un corps solide composé principalement de poussière et de glace en mouvement autour du Soleil sur une trajectoire elliptique, parabolique ou hyperbolique. Mais nous verrons un peu plus loin que ce modèle n'est pas suffisant. Les observations réalisées depuis le milieu du siècle dernier, tant depuis le sol qu'à bord des satellites nous ont fait progressivement découvrir que les comètes contenaient tout un monde de molécules organiques.

Le noyau

Ainsi que l'ont montré avec assez bien de réalisme les films "Deep Impact" et "Armageddon" sortis en 1998, une comète se compose d'un noyau, un petit corps solide ressemblant à un astéroïde, de quelques centaines de mètres à plus de 130 km dans sa plus grande dimension et très lourd, de l'ordre de 100 milliards de tonnes. Le diamètre moyen du noyau de la comète de Halley est de 11 km et sa masse est de 2.2 x 1011 tonnes (220 milliards de tonnes).

Le 13 mars 1986, la sonde spatiale Giotto de l'ESA était à 150 millions de kilomètres de la Terre et réussit à s'approcher jusqu'à 500 km du noyau de la comète de Halley. A ce moment là, Giotto se déplaçait à 14 km/s mais sa vitesse relative par rapport au noyau de la comète était de 68.4 km/s soit ~246000 km/h. A cette occasion, on découvrit que le noyau de Halley tournait sur lui-même avec une période de 53 heures, une rotation que présente la majorité des petits corps.

A gauche, illustration du rendez-vous de la sonde spatiale Giotto de l'ESA avec la comète de Halley en mars 1986 (il s'agit d'une photo authentique de la comète). A droite, le traitement d'image a fait ressortir la forme bilobée, en cacahuète, du noyau de la comète de Halley. Ci-dessous à gauche, son noyau photographié par la sonde spatiale Giotto le 14 mars 1986 à environ 2000 km de distance. Voici la photo prise le 13 mars 1986 à 605 km de distance. Notez la disposition asymétrique des jets de gaz. Ils engendrent une force dans la direction opposée capable de modifier l'orbite de la comète. A droite, une photo générale. Documents T.Lombry, Giotto/ESA et ESA/MPS traité par Jason Major.

Comme son nom l'indique le noyau est la région la plus dense de la comète, mais cette notion est très relative. En effet, sa densité approche 10-6 atmosphère, ce qui ne représente que 2 g/cm3, l'équivalent de la densité du liège.

Le noyau de Halley présente une densité dix fois inférieure à celle de l'eau, soit deux fois plus légère que le liège. Avant les missions spatiales, cette structure avait rarement été photographiée bien que dessinée par tous les observateurs.

Voyageant depuis des milliards d'années dans l'espace interplanétaire où règne une température de l'ordre de 30 K (-243°C), le noyau des comètes s'est mis en équilibre avec ce milieu et présente une température interne comprise entre 30 et 40 K, soit rarement plus de -233°C. En revanche, en surface la température du noyau oscille entre -40°C et -70°C (mesure sur 67P/Churyumov-Gerasimenko en 2014) et peut même être positive et brûlante au plus près du Soleil.

Le noyau des comètes est difficile à observer car lorsqu'elles pénètrent dans le système solaire interne, le noyau se réchauffe et libère des gaz et des poussières qui forment une coma (voir plus bas) et nous empêche d'observer sa surface. Heureusement, parfois des astéroïdes présentent une activité cométaire. Ce fut notamment le cas de la comète P/2016 BA14 (PanSTARRS) découverte en janvier 2016.

Le 22 mars 2016, PanSTARRS se trouvait à 3.6 millions de kilomètres de la Terre, seulement 9 fois la distance Terre-Lune. Profitant de cette opportunité, grâce au télescope Subaru de 8.2 m de la NOAJ installé à Hawaï, des astronomes ont réussi à observer son noyau en infrarouge thermique durant environ 30 heures avec un minimum d'interférences par les grains de poussière et la coma. L'étude conduite par l'équipe de Takafumi Ootsubo fit l'objet d'un article publié dans la revue "Icarus" en 2021.

Les images radars prises avec l'antenne de Goldstone de la NASA installé en Californie montrent que le noyau de la comète P/2016 BA14 mesure entre 600 et 1200 m de diamètre (800 m en moyenne) et est irrégulier, avec de grandes régions plates, de petites dépressions et des arêtes. La comète semble tourner sur elle-même avec une période 35 à 40 heures.

A voir : Flyby Comet Imaged By Radar, NASA/JPL

A gauche, images radar de la comète P/2016 BA14 (PanSTARRS) prises entre le 21 et le 23 mars 2016 à une distance comprise entre 4.1 et 3.6 millions km de la Terre par l'antenne de Goldstone. Le noyau de ~800 m de diamètre est irrégulier. Au centre, le noyau de la comète 9P/Tempel 1 de 14x4 km photographié le 4 juillet 2005 par la sonde spatiale Deep Impact, 5 minutes avant le crash de l'impacteur. A droite, gros-plan sur le noyau de 5 km de diamètre de la comète Wild 2 potographié le 2 janvier 2004 par la sonde Stardust à 236 km de distance. Sa surface surprend par sa complexité et sa beauté. On distingue des terrains vieux et récents comme si une partie de la surface avait été réchauffée et fondue, des roches individuelles et des failles de 100 m de profondeur. La résolution atteint 20 m. Documents NASA/JPL-Caltech/GSSR, NASA/JPL/UMD et NASA.

Plus étonnant, les relevés en infrarouge montrent que sa surface est couverte de molécules organiques et de phyllosilicates tels que le talc. Les données infrarouge du télescope IRTF de la NASA installé à Mauna Kea indiquent que la surface de P/2016 BA14 est très sombre, avec un albedo variant entre 0.02 et 0.03 (par comparaison l'asphalte et le charbon présentent un albedo de 0.04). C'est l'une des noyaux cométaires les plus sombres observés à ce jour mais typique des comètes. On y reviendra.

Les données montrent que les minéraux silicatés hydreux présents sur la surface de la comète furent portés à ~330°C par le passé. En effet, son orbite actuelle ne permet pas de porter la température superficielle à plus de 130°C. Par conséquent, par le passé elle dut se rapprocher plus près du Soleil.

Quant au talc détecté, une question à résoudre est de savoir s'il est présent depuis la formation de la comète où s'il s'est développé au cours du temps. Son Ootsubo, "Nous pensons que de nouvelles observations des noyaux des comètes nous permettront d'en apprendre davantage sur l'évolution des comètes". P/2016 BA14 est une cible potentielle alternative pour la mission Comet Interceptor menée par l'ESA et la JAXA planifiée pour 2029.

A gauche, le noyau de la comète Hartley 2 survolée à 700 km de distance le 4 novembre 2010 par la sonde Deep Impact de la mission Epoxi. Le noyau mesure environ 2 km de longueur. Au centre, le noyau bilobé de 3x5 km de la comète Churyumov-Gerasimenko (67P "Choury") photographié par la sonde Rosetta le 7 juillet 2015 à 154 km de distance alors que la sonde Philae était toujours posée sur sa surface, révélant les jets de vapeur. La résolution est de 13.1 m par pixel. A droite, les jets de vapeur émis par la comète 67P "Choury" photographiés par la sonde Rosetta le 12 août 2015. Ci-dessous à gauche, une image étonnante d'un jet de poussière émis par la comète 67P "Choury" photographié juste au bon moment par la sonde Rosetta. Au centre, d'autres jets de gaz et de poussière émis par la comète 67P "Choury". A droite, la taille du noyau de 67P "Choury" comparée à Bruxelles. Documents NASA/Epoxi, ESA, ESA, ESA/MPI, ESA/X.Shi et al. (2018) et T.Lombry inspiré par l'ESA.

L'analyse des clichés composites de Halley révéla que son noyau était irrégulier, bilobé (en forme de cacahuète), mesurant 16x7.5x8 km et était accidenté, probablement couvert de dépressions et de cratères de quelques centaines de mètres à un kilomètre de diamètre. Son albedo de 0.04 seulement (contre 0.12 pour la Lune et 0.31 pour la Terre), le rendant aussi sombre que la suie ou le bitume.

L'aspect et la composition du noyau de la comète 67P "Choury" est similaire à celui de Halley. Il est bilobé, mesure 3x5 km pour un albedo de 0.05. Comme on le voit ci-dessous, les images couleurs ont révélé qu'en pleine lumière la couleur de sa surface est brune-orangée, très proche de la couleur de la surface poussiéreuse de Mars. Il est composé à 80% de glaces diverses.

A voir : 67/P Archive Image Browser, ESA

Image gallery of asteroids, comets, KBOs and other small bodies, The Planetary Society

Ci-dessus à gauche, les caractéristiques de la surface de la comète Churyumov-Gerasimenko (67P, alias "Choury"). A droite, gros-plans sur la texture du sol de "Choury" en couleurs RGB saturées afin d'augmenter le contraste. La matière organique est en brun. Les terrains constitués de glace mêlée de poussière sont en bleu tandis que les autres couleurs sont la signature de la glace d'eau. Ci-dessous à gauche, le noyau de "Choury" photographié en couleurs RGB par la sonde Rosetta le 3 août 2014 à 285 km de distance, trois mois avant qu'elle ne large la sonde Philae à sa surface. Voici une photo en noir et blanc plus nette. A droite, compositage de plusieurs images de "Choury" prises par Rosetta révélant la neige tombant sur sa surface. Images traitées par landru79. Cliquez sur la photo pour lancer l'animation (GIF de 2.1 MB). Documents ESA, ESA et ESA Archives

Comme on le voit ci-dessous, grâce à des simulations 3D, on explique la forme bilobée de certaines comètes et astéroïdes de deux manières. Selon la première théorie, la forme est le résultat direct de collisions d'accrétion à vitesses lentes et peu violentes, le seul mécanisme permettant de fusionner les croûtes des deux corps sans les détruire entièrement. Cette théorie s'applique aussi aux corps offrant une faible résistance à la traction et une faible densité (cf. E.Asphaug et M.Jutzi, 2015).

Selon Asphaug, déjà connu pour ses simulations de collisions rasantes entre embryons planétaires différenciés (cf. la formation des astéroïdes), ce résultat renforce l'idée que les noyaux cométaires se sont formés par coagulation collisionnelle - soit à partir de cométésimaux en croissance dans le système solaire primitif soit à partir d'amas de débris de taille comparable appariés suite à des collisions majeures.

Selon une seconde théorie, le noyau au départ sphérique présente une densité non uniforme. Lorsqu'il est exposé au rayonnement solaire, il subit un déséquilibre et prend une forme allongée. Suite à la perte de masse anisotrope et l'effondrement local des structures internes, il prend une forme bilobée (cf. D.E. Vavilov et al. (2019), aussi en PDF).

A gauche, la forme bilobée (en cacahuète) des noyaux de certaines comètes suggère qu'il résulte de la collision de deux corps à faible vitesse. A droite, autre mécanisme, le noyau présente une densité non uniforme. Lorsqu'il est exposé au rayonnement solaire, il subit un déséquilibre et prend une forme allongée. Suite à la perte de masse anisotrope et l'effondrement local des structures internes, il prend une forme bilobée. Documents E.Asphaug et M.Jutzi (2015) et D.E. Vavilov et al. (2019), aussi en PDF.

La croûte des comètes est constituée de matériaux non volatils, composés de silicates (molécules de silicium et d'oxygène tel que le sable) et d'éléments riches en carbone, les "CHON", acronyme de Carbon-Hydrogen-Oxygen-Nitrogen (Azote), alias les particules "low-Z" par référence à leur faible numéro atomique. Rappelons que l'acronyme "CHON" fut inventé en 1986 par B.C. Clark et ses collègues pour les besoins d'un article décrivant les résultats des analyses chimiques effectuées par la sonde spatiale Giotto lors de son survol de la comète de Halley.

Du soufre et de l'ammoniac ont été découverts sur "Choury" laissant supposer qu'elle dégage une forte odeur d'oeufs pourris. Plus étonnant, de l'oxygène moléculaire fut également découvert à sa surface en 2015, une molécule très rare sur une comète dont on ne s'explique pas la présence en raison de la forte réactivité de cette substance.

Le noyau de la comète de Halley est organisé en clathrate, un réseau de glaces mixtes dont les cavités emprisonnent des gaz. Etant donné la densité de Halley, les scientifiques estiment que 84% de son noyau est constitué de glace d'eau mélangée à du formaldéhyde (H2CO, une molécule à base de formol) et du dioxyde de carbone (CO2). Il contient également de l'azote et du monoxyde de carbone mais en faibles quantités.

A l'approche du Soleil, les couches superficielles de clathrates se vident de leurs matériaux volatils. Elles forment alors un manteau réfractaire que le rayonnement solaire pénètre plus difficilement.

A voir : Atterrissage de Philae sur la comète 67P/Churyumov-Gerasimenko

The Comet (67P)

Gros-plans de la surface du noyau de la comète Churyumov-Gerasimenko (67P "Choury") photographié en 2014 par la sonde spatiale Rosetta. A gauche, la photo d'une falaise prise le 14 octobre 2014 à 8 km de distance. La résolution est de 15 cm/pixel. Cette photo fit la couverture du journal "Science" le 23 janvier 2015. Les deux photos suivantes représentent les régions de Ash et Seth (le 10 septembre 2014 à 27 km de distance) et de Ma'at (10 octobre 2014 à 8 km de distance), cette dernière révélant une structure riche en glace ayant subit les effets de la sublimation (passage direct de l'état solide à gazeux). A droite, une autre image traitée par Sean Doran. Documents ESA et ESA.

Sur Halley la production d'eau à l'approche du Soleil fut de l'ordre de 8 x 1030 molécules par seconde. La vapeur éjectée du noyau atteignait 125°C pour retomber à -73°C à l'intérieur du noyau. Les jets de gaz émanaient de plusieurs points de sa surface, mais 90% de celle-ci étaient totalement inactifs comme le montrent bien les deux photographies en haut de page. Ainsi que l’a bien montré le film “Deep Impact”, seule la face tournée vers le Soleil émettait ces gaz et ces poussières; les régions où apparaissent ces jets se désactivent en effet en passant dans l'obscurité. Les mêmes formes de dégazage furent également observées sur les comètes Hartley 2 et "Chouri". Les comètes perdent donc leurs matériaux uniquement par ces jets.

Si Halley devait perdre autant d'eau de façon continue, on estime que la comète ne pourrait pas survivre plus de 3 siècles. Etant donné qu'elle ne développe cette activité que durant quelques semaines par siècle, avec une masse estimée à 3 x 1011 tonnes, sa durée de vie se compte en centaines de milliers d'années.

Le plus grand noyau cométaire

Le noyau cométaire le plus grand découvert à ce jour est celui de la comète C/2014 UN271 (Bernardinelli-Bernstein). Elle fut découverte en 2002 dans le cadre du projet LINEAR (Lincoln Near-Earth Asteroid Research) puis elle fut observée par hasard en novembre 2010, alors qu'elle se trouvait à 20 UA ou 3 milliards de kilomètres du Soleil, soit presque à la distance moyenne de Neptune (cf. MPEC 2021-M53). Depuis, elle fait l'objet d'études intensives à l'aide des télescopes terrestres et spatiaux.

La comète fut formellement identifiée le 19 juin 2021 par Pedro Bernardinelli et Gary M. Bernstein dans le cadre du sondage DES (Dark Energy Survey) sur la base de données d'archives enregistrées entre 2014 et 2018 par les astronomes de l'Observatoire Interaméricain de Cerro Tololo (CTIO), au Chili (cf. cette photo prise en 2014). Le noyau de cette comète mesure 136 km ! (cf. M.-T. Hui et al., 2022). Le précédent record était détenu par la comète C/2002 VQ94 (LINEAR) dont le noyau est estimé à 96 km de diamètre.

A consulter : Comet C/2014 UN271 (Bernardinelli-Bernstein), TheSky Live

A gauche, une photo de la comète C/2014 UN271 Bernardinelli-Bernstein prise par le télescope DES (Dark Energy Survey) en octobre 2017. La comète se trouvait dans la constellation du Phoenix à 25 UA de la Terre et était de magnitude apparente +21.5. Au centre, une photo de la comète (elle est au centre) prise à l'observatoire du CTIO en juin 2021. Elle se trouvait à 20.2 UA de la Terre (à peu près à la distance d'Uranus) et sa magnitude apparente était d'environ +19. Elle ne présentait pas encore de coma. A part son excentricité et sa trajectoire, rien ne la différenciait d'un astéroïde. A droite, une illustration artistique de la comète à 20 UA ou 3 milliards de kilomètres du Soleil. Documents DES, CTIO et NASA/ESA/G.Bacon (STScI).

La comète C/2014 UN271 provient du nuage de Oort et évolue sur une orbite très excentrique (e = 0.99948) et donc fortement elliptique inclinée à 95.6° sur le plan orbital du système solaire dont le périhélie se trouve à 10.9 UA du Soleil, c'est-à-dire au-delà de l'orbite de Saturne qu'elle devrait atteindre en 2031, tandis que son aphélie se situe à ~0.9 année-lumière du Soleil. Cette comète boucle sa révolution orbitale en 3 millions d'années. Voici ses éléments orbitaux calculés par le JPL.

Selon les simulations, cette comète nous aurait visité il y a 612190 ans. Elle ne repassera dans la région interne du système solaire que dans 4.5 millions d'années. Mais d'ici là, on pourra encore la photographier au télescope. Entre 2020 et 2030, sa magnitude apparente augmentera progressivement de +20 à +13.3. Vers 2031, elle atteindra sa luminosité maximale vue de la Terre avec une magnitude apparente estimée à +12.9 (cf. cette courbe de lumière préparée par Seiichi Yoshida avec Comet for Windows). Elle sera donc à la limite de la visibilité dans un petit télescope amateur de 15 cm de diamètre. En revanche, elle sera visible sur des photographies à longue pose. Mais entre-temps, entre environ 2028 et 2030, elle traversera le plan de la Voie Lactée à quelques degrés de la Croix du Sud et sera plus difficile à distinguer. Ensuite, elle remontera dans le ciel de l'hémisphère nord mais elle redeviendra plus pâle après 2031 (cf. cette carte préparée par Tom Ruen).

A gauche, la taille du noyau de quelques comètes comparée à celle de la comète de Halley. A droite, la taille du noyau de la comète C/2014 UN271 (Bernardinelli-Bernstein) comparée à celle d'autres comètes connues. Son diamètre moyen est 12 fois plus grand que celui de la comète de Halley. Documents Daniel Macháček/The Planetary Socierty et NASA/ESA, Zena Levy (STScI) adapté par l'auteur.

Le noyau de C/2014 UN271 est environ 50 fois plus grand que celui de la plupart des comètes connues et en 12 fois plus grand que celui de la comète de Halley. Cela correspond à la taille d'un gros astéroïde ou d'une planète naine errante. Sa masse est estimée à 5 x 1014 tonnes (500 mille milliards de tonnes), l'équivalent du millionième de la masse de la Terre et plus de cent mille fois la masse d'une comète typique au plus près du Soleil. Elle est 2200 fois plus massive que la comète de Halley.

Toutefois, du fait que son noyau est enveloppé dans une coma poussièreuse, à plus de 3 milliards de kilomètres de la Terre le HST n'a pas pu le résoudre et donc déterminer ses dimensions exactes. Comme on le voit ci-dessous, les images du HST montrent seulement une tache lumineuse à l'emplacement du noyau. Comme on le voit ci-dessous, Hui et ses collègues ont donc créé un masque basé sur un modèle informatique de la coma et l'ont ajusté pour correspondre aux images prises par le HST. Ensuite, ce masque a permis de soustraire la lumière de la coma pour laisser apparaître le noyau en forme d'étoile.

A voir : Hubble Confirms Largest Comet Nucleus Ever Seen, NASA/GSFC, 2022

Cette séquence montre le noyau solide et glacé de la comète C/2014 UN271 (Bernardinelli-Bernstein) entouré de poussière et de gaz. A gauche, l'image prise par la caméra WFC3 du Télescope Spatial Hubble le 8 janvier 2022. Au centre, une modélisation de la coma a été obtenu en ajustant le profil de luminosité de surface à partir de l'image de gauche. A droite, en soustrayant la coma, on dévoile l'aspect ponctuel du noyau. Document NASA/ESA, Man-To Hui, David Jewitt, traité par Alyssa Pagan du STScI.

Les chercheurs ont ensuite comparé la luminosité du noyau aux données enregistrées par ALMA pour contraindre la taille et la réflectivité du noyau. Les nouvelles mesures du HST sont proches des estimations antérieures d'ALMA, mais elles montrent que la surface du noyau est plus sombre qu'on le pensait auparavant. Selon le planétologue David Jewitt de l'Université de Californie à Los Angeles (UCLA) et coauteur de cette étude, "le noyau est plus noir que le charbon". Son albedo serait donc voici de 0.03. Nous connaîtrons mieux ses dimensions et sa composition dans quelques années, mais bien que la température de l'espace à cette distance soit de -211°C, le noyau dégaze déjà par sublimation des molécules volatiles telles que le CO et le CO2 qui composent sa coma.

Le modèle de la boule de glace sale

Pour expliquer la teinte sombre du noyau des comètes, la structure du sol et les jets de vapeurs, le modèle de "la boule de glace sale" n'est pas satisfaisant. En effet, l'idée que les comètes sont des corps couverts de glace est fausse. Il faut les imaginer comme des cailloux poussiérieux essentiellement composés de matière organique. Comme on l'a bien vu sur "Choury", la surface des comètes est couverte d'une épaisse couche de poussière granuleuse jusqu'à l'échelle millimétrique qui ressemble à des gravillons ou de sable.

Les scientifiques assimilent aujourd'hui le noyau des comètes à un agglomérat de particules d'eau glacée, de polymères organiques, de poussière de silicates et de carbone agglomérés au moment de la formation du système solaire. Ces "grains" peuvent être juxtaposés ou imbriques les uns dans les autres, tout dépend de leur forme et de leur évolution depuis leur formation.

Quand le noyau se réchauffe en s'approchant du Soleil, l'eau et les matériaux volatils s'évaporent, laissant des structures organiques et des poussières entourées d'alvéoles (clathrate). Ces structures peuvent avoir plusieurs centimètres d'épaisseur et sont poreuses, probablement peu conductrices de la chaleur. Absorbant très bien la lumière, ces structures peuvent augmenter la température à la surface du noyau et, agissant comme un isolant, laisser l'intérieur du noyau nettement plus froid. Mais si cette théorie explique en partie les mesures spectrales et la répartition des ions cométaires, elle ne dit rien de la structure interne du noyau. En effet, en attendant que les analyses de la structure du noyau de la comète "Chouri" par la sonde Philae soient dépouillées, il est impossible de connaître la structure interne d'une comète à distance.

A voir : DIY Space: Create A Comet With Dry Ice, NASA/JPL

Simulation des jets émis par une comète

A gauche, une simulation des jets de la comète Hale-Bopp. A droite, animation accélérée de l'approche de la comète de Halley en 1986. Fichiers Mpeg de 2.1 MB et 35 KB.

A partir de l'analyse des gaz libérés par la coma, les astrophysiciens pensent qu'au moins deux mécanismes interviennent. D'une part des gaz sont relâchés en surface et s'évaporent. Mais une autre fraction provient de l'intérieur du noyau et serait relâchée lors des changements structurels des glaces à mesure que la température évolue. Près du Soleil les deux mécanismes opèrent tandis qu'après le passage au périhélie le second mécanisme devrait être plus actif.

C'est en observant la façon dont les comètes se fragmentent que l'on infère le peu que l'on sait sur la structure du noyau. David Jewitt, directeur de l'Institut des Planètes et Exoplanètes de l'UCLA nous rappelle que trois théories sont actuellement considérées :

- Le noyau monolithique : c'est l'idée la plus simple que l'on puisse se faire du noyau qui serait un objet de composition interne uniforme. Il est entouré d'une croûte réfractaire (en rouge sur le dessin repris ci-dessous) composée de débris exposés par sublimation des glaces. Ce noyau serait assez solide mais ce modèle n'explique pas dans ce cas pour quelles raisons certaines comètes se brisent à la moindre tension.

- Le noyau multiple : il serait constitué par l'accrétion de corps indépendants capturés au cours de l'évolution de la comète. Ces roches seraient des planétésimaux issus du disque protoplanétaire. Certains suggèrent que ces sous-éléments sont originaires de différents endroits de la nébuleuse protosolaire et présenteraient donc des compositions variées. Assemblés sans pour autant être fermement attachés les uns aux autres, cette structure serait assez fragile. Ce noyau multiple est également recouvert d'un manteau réfractaire.

- Le noyau différencié : à l'image de la Terre dont le noyau s'est différencié en un coeur de fer et un manteau de roche, certains pensent que le noyau des comète peut être partiellement différencié. Mais ce processus requiert des températures internes très élevées qu'un petit objet comme une comète n'est pas en mesure de générer. Pour les plus massives d'entre elles, la chaleur dégagée par la radioactivité du potassium, du thorium ou de l'uranium pourrait assurer une lente migration des glaces les plus volatiles (CO, N2) vers la zone entourant le coeur du noyau. Pour les comètes les plus petites, l'aluminium-22 pourrait apporter cette chaleur.

Différents types de noyaux cométaires. De gauche à droite, noyau monolithique, multiple et différencié. Consulter le texte pour les explications. Document David Jewitt.

Il est probable que les comètes incorporent les trois modèles présentés ici. Les plus petites comètes peuvent par exemple avoir un noyau monolithique alors que les plus grandes, celles mesurant quelques kilomètres, seraient constituées de roches agglomérées, comme c'est le cas de "Chouri".

Le matériau cométaire étant un faible conducteur de la chaleur il est possible que les plus grands noyaux soit complètement vidés de la plupart de leurs glaces volatiles. Dans le cas de la comète "Chouri", son noyau présente une densité de 0.4 seulement et contient près de 75% de vide.

La découverte d'un fragment de clathrate constituerait la pierre de Rosette des cométologues. C'est la raison pour laquelle les astrophysiciens sont tellement intéressés par les résultats des analyses du sous-sol de la comète "Chouri" effectuées par la sonde Philae.

La coma interne

La vie d'une comète est tributaire du vent solaire et de la pression de radiation solaire. Ce "vent" est constitué de protons et d'électrons issus de la couronne solaire, portés à haute température et guidés par le champ magnétique du Soleil. Ce vent souffle à près de 500 km/s (parfois deux fois plus vite lors d'une éruption solaire) et percute les comètes dont la vitesse orbitale atteint environ 25 km/s. Au contact de la coma externe, il se forme alors une onde de choc qui, à l'image du sillage que laisse un projectile en mouvement, donnera la forme générale de la comète. On reparlera de ce phénomène quand nous parlerons de la queue des comètes.

Le noyau s'entoure d'une zone diffuse, la coma. Elle apparaît en deçà de 3 UA, lorsque la température atteint -78°C, seuil à partir duquel la glace d'ammoniaque se sublime dans le vide. C'est parce que la coma se compose d'environ 80% d'eau qu'elle dégage énormément de vapeur. L'analyse de l'hydrogène libérée par la coma de Hale-Bopp, combiné avec d'autres observations indique que son noyau produisit quelque 7 à 8 tonnes de vapeur d'eau par seconde, une vrai "cocotte-minute" !

La coma interne se divise en deux composantes :

- La coma gazeuse

- La coma de poussière.

La coma gazeuse est une atmosphère constituée de molécules libérées par le noyau par le rayonnement solaire et la sublimation des glaces. Exposée directement au rayonnement solaire intense (UV, protons rapides, etc) la plupart de ces molécules sont dissociées dans les 24 heures qui suivent leur libération.

La photodissociation

L'ionisation

H2O + hν

→   H + OH

CO + hν

→    CO+

OH + hν

→   H + O

OH + hν

→    OH+

Une molécule se dissocie en ses constituants après avoir absorbé un quanta d'énergie (photon hν).

Les mesures réalisées par la sonde Giotto[3] sur Halley ont révélé que cette coma interne contenait également des molécules organiques neutres enrichies en carbone, hydrogène et oxygène (CO, CO2, HCN, H2CO) éjectés par le noyau à plusieurs centaines de mètres par seconde. Le composant volatil dominant reste l'eau, suivi par le CO et le CO2 tandis que la plupart des autres éléments ne dépassent pas 1%. Bien que le rapport CO/H2O atteigne 20 à 30% dans Hale-Bopp leur abondance varie notablement entre comètes pour atteindre des valeurs parfois 5 fois plus faibles.

Remarque utile pour les amateurs de spectroscopie, la plupart des molécules que l'on observe dans la coma sont les molécules filles résultant de cette dissociation, car elles présentent de fortes raies spectrales en lumière blanche. Ce sont elles en effet qui donnent sa couleur à la coma. En revanche, l'étude des molécules parentes est une technique récente qui concerne l'astronomie submillimétrique (radio).

Cette matière se déplace dans la coma à une vitesse voisine de celle du son dans un gaz, soit environ 1 km/s lorsque la comète est proche de la Terre. Connaissant cette vitesse et la durée de vie des molécules avant photodissociation, on peut estimer qu'en 24 heures les molécules se déplacent d'environ 50000 km. C'est le rayon moyen de la coma gazeuse.

La région la plus proche du noyau, sur quelques dizaines de milliers de km, est imperméable au vent solaire. Dans les derniers milliers de kilomètres qui précèdent la zone de contact avec le noyau, la température et la densité des électrons subissent de grands changements. Le champ magnétique accuse là son maximum, avec une valeur de 65 nanoteslas sur Halley. Lorsqu'il y a équilibre entre la pression de radiation extérieure et le gaz ionisé de la coma, nous sommes sur la surface de contact. Ici le champ magnétique est nul. Cette limite se situe à quelques centaines, voire quelques milliers de kilomètres de la surface du noyau.

A gauche, la coma interne de la comète Hyakutake (C/1996 B2) photographiée en fausses couleurs par le Télescope Spatial Hubble le 3 et 4 avril 1996. Le Soleil, hors-champ, est au-dessus à droite de l'image. On observe en rouge la coma de poussière tandis que la lumière ultraviolette dispersée par les atomes d'hydrogène qui entoure le noyau et formant la coma gazeuse apparaît en bleu. Le champ couvert est d'environ 14000 km, quatre fois inférieur à la taille moyenne de la coma interne. Document M.Combi/SPRL, U.Mich/ STScI/NASA. A droite, une photo de la comète Hale-Bopp (C/1995 O1) réalisée par David Hanon avec un télescope de 600 mm d'ouverture le 23 février 1997. On voit ici clairement que sa forme est induite par la pression de radiation du Soleil. On distingue clairement son petit noyau, l'enveloppe gazeuse de la coma externe et la double queue de poussière.

La coma de poussière est constituée de grains de poussière arrachés du noyau par les gaz en sublimation. A quelques dizaines de rayons du noyau, la poussière est libérée du champ gravitationnel cométaire et gravite librement autour du Soleil. La vitesse de ces particules varient en fonction de leur taille, les plus légères se déplaçant pratiquement à la vitesse des gaz. Les plus lourdes restent piégées dans la coma ou retombent à la surface du noyau et s'accumulent sur sa croûte.

Ces grains ont toutes les tailles mais la plupart de ceux qui forment la coma visible dans un instrument d'observation ont un diamètre d'environ 1 micron (0.001 mm). Près du périhélie des grains, ou plutôt des fragments de plusieurs dizaines de centimètres de diamètre peuvent être éjectés avec les gaz. Comme nous le verront un peu plus loin, ce sont ces grains de poussière qui forment la queue de Type II et constituent le principal ingrédient du milieu interplanétaire, alimentant la lumière zodiacale et le flux incessant des "étoiles filantes" que sont les météores.

Les comètes vertes

Une question souvent posée est pourquoi la coma de certaines comètes est verte (par exemple Hale-Bopp en 1996, Lulin en 2009, Machholtz en 2005, ISON en 2012, Encke en 2013 et 2017, Lovejoy en 2015, PanSTARR en 2018, Léonard en 2021, ZTF en 2023, etc) ? Ce n'est pas un défaut chromatique de l'instrument ni un excès de sensibilité du capteur photosensible ! La coma contient du cyanogène (CN) et du carbone diatomique (C2). Comme on le voit sur les spectre présentés ci-dessous, ces deux substances ainsi que le C3 et le CO+ émettent un rayonnement vert lorsqu'elles sont excitées par le rayonnement ultraviolet du Soleil. C'est ce qu'on appelle la fluorescence par résonance (même technique que le FRET en microbiologie). On retrouve un phénomène identique dans la couronne Fl du Soleil.

A gauche, la comète Lovejoy (C/2014 Q2) passant au nord de la constellation d'Eridan photographiée le 14 janvier 2015 par Gerald Rhemann avec un astrographe ASA de 200 mm f/2.8 équipé d'une caméra CCD FLI PL 16803. Compositage LRGB. Temps total d'intégration de 22.5 minutes. Au centre, la comète Léonard (C/2021 A1) révélant la coma verte entourant son noyau et une queue très structurée. Photo prise fin décembre 2021 depuis le Chili par Matt Dieterich au foyer d'un télescope PlaneWave Instruments CDK 600 muni d'une caméra CCD QHY600. Compositage LRGB de 4x 60 secondes. A droite, la comète C/2022 E3 (ZTF) dont la coma est également verte. Photographie prise par Gerald Rhemann le 6 février 2023 au foyer d'un astrographe ASA de 300 mm f/3.6 équipé d'une caméra CCD Moravian C3. Compositage LRGB de 16 minutes (7/3/3/3 minutes).

Comment ça marche dirait un animateur célèbre ? La lumière UV solaire est absorbée par les atomes et les molécules présents dans l'atmosphère cométaire. L'énergie absorbée provoque le saut d'un électron à un niveau excité d'où il redescend en émettant une radiation dont la fréquence (l'énergie) est égale à celle absorbée (rappelons que dans le cas d'une fluorescence ordinaire, la fréquence d'émission est toujours inférieure à celle absorbée). Dans ce cas-ci c'est un rayonnement d'environ 520 nm et 2.4 eV. Malgré son nom ronflant, la fluorescence par résonance produit peu d'effets car l'émission rayonne de manière aléatoire dans toutes les directions.

Ainsi que nous l'avons dit un peu plus haut, rappelons que la lumière UV produit également d'autres réactions chimiques et participe à la libération d'hydrogène du noyau sous forme de gaz (coma interne).

A gauche, image couleur de la comète ISON (C/2012 S1) réalisée par Adam Block au foyer du télescope Schulman de 0.81 m (32") du Mt Lemmon près de Tucson, en Arizona  et le spectre réalisé par Chris Schur avec un télescope newtonien de 317 mm f/5. Voici l'agrandissement du spectre. Au centre, le spectre de la comète Lovejoy (C/2014 Q2) enregistré le 1 janvier 2015 par Domenico Licchelli montrant l'abondance des émissions du carbone diatomique et du cyanogène à l'origine de la couleur verte de sa coma. La photo (RGB) de la comète fut prise par Bob Lockwood le 16 janvier 2015 au foyer d'une lunette apochromatique TEC de 160 mm f/5.9 équipée d'une caméra CCD FLI ML 6303E. A droite, le spectre de la comète ZTF (C/2022 E3) obtenu le 14 février 2023 à l'observatoire de l'Université de Hertfordshire en Angleterre révèle d'importantes raies d'émission du carbone diatomique dans la partie verte du spectre. Photomontages de T.Lombry.

Notons que les photons, en l'occurrence verts dans ce cas-ci, peuvent être émis aux longueurs d'ondes infrarouges si les molécules réagissent en réponse à une excitation thermique. Le rayonnement devient submillimétrique et millimétrique lorsque les molécules changent d'état de rotation (spin). Celui-ci dépend des effets combinés de l'agitation du gaz (effet thermique provoqué par les collisions) et de la quantité de photons solaires absorbés. 

Pour plus d'informations sur l'étude spectroscopique submillimétrique des comètes, consultez l'article sur la comète Machholtz (C/2004 Q2) publié en 2012 par Miguel de Val-Borro de l'Université de Princeton et ses collègues.

A gauche, la comète Machholtz (C/2004 Q2) photographiée près de l'amas des Pléiades, M45, avec une magnitude de +3.8. Photographie prise par Stefan Siep le 7 janvier 2005 à 21h30 TU avec un téléobjectif de 300 mm f/2.8 muni d'une caméra CCD SBIG STL11000M. Compositage LRGB. Temps d'intégration total de 28 minutes. Au centre, la comète Lulin (C2007 N3) avec son anti-queue photographiée en février 2009 par Richard Richins. A droite, la comète de Encke photographiée le 30 octobre 2013 par Damian Peach alors qu'elle passait près de la galaxie NGC 4371. Photographie prise avec un télescope CDK de 500 mm f/4.5 équipé d'une caméra CCD FLI PL11002. Compositage LRGB. Temps total d'intégration de 18 minutes.

La coma externe

La coma externe, de forme elliptique ou parabolique représente en quelque sorte l'atmosphère de la comète, sa coma étendue jusqu'au milieu interplanétaire délimitée par l'onde de choc. Cette enveloppe présente un diamètre angulaire qui peut atteindre 2°40' pour la comète Lexell de 1770. Cela représente un diamètre physique de près de 2 millions de kilomètres. Au périhélie, la coma de la comète de Halley s'étendait sur 35 millions de kilomètres.

Cette enveloppe est en général de taille réduite mais une dimension de 100000 km est courante. C'est sa densité extrêmement faible qui permet de laisser scintiller les étoiles qu'elle vient à occulter. Quelquefois elle présente une région centrale plus dense centrée sur le noyau. Il peut également apparaître de faux noyaux, d'un aspect stellaire à faible grossissement.

A lire : La comète Holmes a détrôné le Soleil par sa taille (sur le blog, 2007)

A gauche, gros-plan sur le noyau de la comète Neowise montrant au moins 3 arcs ou coquilles multiples de poussière. Photo prise par Damian Peach le 17 juillet 2020 à 22h44 TU au foyer d'un télescope Takahashi Dall-Kirkham de 250 mm équipé d'une caméra CCD ASI 290MM et d'un filtre rouge. Voir aussi l'animation publiée sur Twitter. Le rayon de l'arc interne est d'environ 24". A sa droite, trois images de la comète Hale-Bopp photographiée au Pic-du-Midi par l'équipe du S2P. Les couleurs bleues et vertes sont artificielles. A gauche, une photographie prise le 28 mars 2000 à 3h46 TU. 30 minutes de pose au foyer du télescope de 55 cm équipé d'une caméra CCD HiSiS-44. Un filtre de gradient radial a été appliqué pour faire ressortir les arcs de poussière, en fait des jets émis en spirale. Au centre, une image traitée résultant de l'addition de 30 images individuelles prises le 8 avril 1997 à 19h26 TU. Elles furent enregistrées au télescope de 1.05 m sous filtre rouge à large bande (670-820 nm) et traitées avec un filtre de gradient radial. Cette image révèle les jets de poussière enroulés en hélice. A droite, une image prise le 29 mars vers 21h35 TU résultant de l'addition de 60 images individuelles exposées 1 seconde chacune en lumière verte. Un filtre de gradient radial fut appliqué ainsi qu'une table de look-up logarithmique permettant de révéler environ 10 arcs de poussière dans la coma. Documents réalisés par Jean Lecacheux, François Colas et Cyril Birnbaum, BDL/S2P.

Autour du noyau, mais également en tout lieu de l'enveloppe, nous pouvons observer des condensations en forme d'arc. Elles proviennent de la sublimation de la glace du noyau qui, dans son mouvement de rotation, émet des jets de gaz créant des halos concentriques qui se propagent en entraînant les poussières dans l'espace. De tels arcs persistent quelques semaines. Les comètes Donati (1858 VI), Coggia (1874 III), Bennett (1970 II), Hale-Bopp (2000) et Neowise (2020) qui présentaient de telles structures, assez rares. Neowise présentait également un jet en spirale comme le montre la vidéo ci-dessous.

Face au Soleil, le noyau solide peut projeter une ombre qui apparaîtra comme une fine ligne sombre dans l'axe de la chevelure de la comète.

A voir : Comet NEOWISE Rotation Timelapse Sequence, NoirLab, 2020

Rotation du noyau de Hale-Bopp

Deux animations montrant la rotation du noyau de la comète Hale-Bopp avec l'émission de jets et la formation d'arcs concentriques. A gauche, un fichier GIF de 61 KB. A droite, un document enregistré par Terry Platt en Angleterre, durant la nuit du 28 au 29 mars 1997 entre 19h TU et 04h50 TU. Il utilisa un télescope de 318 mm f/20 équipé d'une caméra CCD couleur Starlight Xpress. Ce document résulte de l'animation de 12 images exposées chacune 10 secondes prises à intervalles de 45 minutes. Fichier Mpeg de 14 KB. Documents Calvin Hamilton and Terry Platt.

Lors du passage de Halley au périhélie, la sonde spatiale Giotto nota que la coma libérait six fois plus de gaz que de poussière. A titre de comparaison, la comète de Encke éjecta 400 grammes de poussière par seconde, tandis qu'en 1986 Halley éjecta entre 3 et 10 tonnes de poussière chaque seconde et environ 20 tonnes de gaz. Au cours de son passage, Halley perdit 300 millions de tonnes de matière et environ 5 mètres de son épaisseur, ce qui représente à peine 0.14% de sa masse. Au bout d'un temps estimé à plus de 250000 ans, la comète de Halley se désintégrera.

Prochain chapitre

La queue des comètes

Page 1 - 2 - 3 - 4 -


[2] F.Whipple, Astrophysical Journal, 111, 1950, p375 - A.Galeev, Astrophysical Journal, 289, 1985, p807 - C.Wickramasinghe et M.Wallis, Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, 216, 1985, p453.

[3] D.Mitchell et al., Science, 237, 1987, p626 - W.Huebner, Science, 237, 1987, p628.


Back to:

HOME

Copyright & FAQ