& ALPHONSINE

Je suis l’Alphonsine, je vous raconte un peu de ma vie, ne le dites à personne.
Je suis L’Alphonsine,  je vais vous raconter très simplement .

L'enchaînement des événements aléatoires

est scellé dans le principe collectif.

 C'est la fameuse  image d'un vol de papillons.

Au fil des mots je laisserais quelques traces afin de situer l’époque, les mœurs

Et je rappellerai que le ciel qui m'a accompagné était celui de mes ancêtres,

Il sera celui de mes petits enfants.

Louise, ma grand mère une belle  brune aux yeux noisettes est morte à 41 ans le mois d’ après les moissons, usée par une grossesse difficile, elle s’en est  allée quelques heures après avoir donnée la vie.

 Gertrude   fut " ma maman ,  la bonne,  la femme de compagnie, la maitresse de grand père , celle qui veilla mes nuits , mes premières années  comme elle l'avait  fait pour ma mère.

 Ma mère mis du temps à se passer de son cher soldat qui  l’avait quitté. Des années plus tard mon grand père lui avoua qu’il  lui avait donné une heure pour disparaitre du domaine .

  1886, c'était l'année de ma naissance, l'ère de la troisième République, le temps du patriotisme avec le général Boulanger,  ah que je vous dise, l'armée fut dotée du fameux fusil Lebel, bien utile pour aller coloniser l'Afrique.

L'hiver 1886 fut rude , plus tard  j'en connu d'autres , mais mon Dieu  quand la neige   fondait , les pâturages se paraient des couleurs et senteurs de fleurs , des versants devenaient jaunes , rouges ou blancs  , parfois multicolores selon les variétés  de primevères hirsutes , reines des  prés, reines des sables .Dés cinq ans j'ai écris l'Auvergne dans ma conscience, jusqu'à la fin de ma vie ses couleurs ont bercées mes pensées les soirs tristes.

Gertrude la bonne    m'avait offert mon premier cadeau, c'était un baigneur et son landau, un vrai " Petitcollin " " en celluloïd  incassable une merveille, son salaire du mois n'avait pas été de trop, à vrai dire c'était un peu ma maman. La maman de ma maman aussi , Gertrude c'était l'amour, le courage , ce n'est que des années après que j'ai su que c'était elle qui tenait debout la famille.

Mes premières  années furent celles du bonheur, j'étais  la seule enfant de la maison, nous ne manquions de rien,  mes plus anciens souvenirs  c'est la prière que l'on faisait avant chaque repas, nous remercions Dieu  pour le pain qu'il nous donnait.  Ma mémoire remonte à mes cinq ans, d'avant ,  il ne me reste que ces noëls, ces oranges dans la cheminée, les senteurs d'été,  le soir je m'endormais dans les bras de mon grand père, curieusement je n'ai pas vraiment souvenir d'autres  tendresses.

Parfois Anatole  mon grand - père  m'emmenait à travers les chemins, jusqu'aux étendues d'herbe fraîche que les vaches broutaient  jusqu'à se faire péter la panse, je gambadais, les sabots attachés autour du cou ne les remettant que là ou la caillasse ne risquait plus de me blesser les pieds.

Ce fut les meilleures années de ma vie, les plus belles.

Ma vie entière, j'ai repensée à nos promenades et à nos conversations, j'étais   curieuse, petite fille espiègle mais attentive,

ses histoires étaient grandioses, il me parlait  de son père, mon arrière grand père  qui avait fait la campagne de Russie, bien peu en était revenu, son idole était le général,

cet homme illustre  , il parlait de Bonaparte, le premier consul devenu empereur , son idole ; un homme qui avait saigné  son pays à coups de guerres , des millions de Français étaient morts sur des champs de batailles ,  de misère et de faim ,

plus tard on m'a dit que c'était un grand homme , comme quoi la vérité est faite par les hommes , je crois bien que j'ai supportée ma vie  en me disant que d'autres avaient connus le pire .

Mon grand père avait la barbe et les cheveux blancs , il avait 65 ans , pour ne pas tomber , il promenait sa canne  bien utile pour rassembler les vaches, la vie de paysan usait l'homme et bien peu allaient au delà de soixante dix ans  ,  j'étais une petite fille heureuse , rieuse , tout au long de nos promenades , je soulais mon grand - père de paroles , de questions .

 Je n'avais pas ma langue dans ma poche.

Des scènes de cette époque heureuse sont restées gravées  dans ma mémoire ; à la bonne saison , nous allions à la ville vendre de la volaille ,  des œufs  , George le frère de maman  ( celui qui une dizaine d'années plus tard deviendrait  marchand de charbon à Paris )   attelait deux des juments Fauvette et Câline et dans la grande carriole nous parcourions plus de trente kilomètres   , j'aimais ce voyage quand il faisait beau   , le soir au retour  nous chantions  , je me souviens des chansons de

Jules Jouy , c'était un poète un  chansonnier, et surtout une personnalité du  Montmartre de la fameuse époque des Hydropathes, le plus souvent anticlérical, révolutionnaire  ,  plus tard  à Paris  ,  j'appris à aimer ce quartier  , c'était pour moi la découverte du monde  et avec ces  chansons , je su  que tous les gens n'étaient pas heureux sur terre .

Plus tard j'ai appris beaucoup de ces chansons .

Le frère de ma mère quitta la ferme, il voulait découvrir Paris   et faire comme ses oncles, acheter un commerce

 L'église du village de mon enfance " Valcivieres" est là pour témoigner de mon bonheur, Dieu mon témoin. C'était l'époque de ma vie ou je croyais au  Bon Dieu  ; plus tard   ce Dieu    ne m'a pas souvent écouté, j'ai  supplié  en vain.