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Date de création : 16.07.2012
Dernière mise à jour : 20.09.2024
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SOLEIL ROUGE, POUR ALAIN DELON BON GRAND MÉCHANT DE WESTERN

Publié le 23/08/2024 à 18:56 par vivelewestern Tags : prix sur vie place coup belle mode femme maison mort vedette film livre
SOLEIL ROUGE, POUR ALAIN DELON BON GRAND MÉCHANT DE WESTERN

Placé dans la filmographie d’Alain Delon entre Le Cercle Rouge de Melville et L’assassinat de Trotsky de Joseph Losey, Soleil Rouge réalisé par Terence Young (auquel on doit notamment Opération Tonnerre, le meilleur 007 de l’ère Sean Connery) s’inscrit pleinement dans la veine des westerns européens empruntant à l’Espagne ses décors naturels pour figurer les grands espaces américains à moindre coût.

Co-production italo-franco-espagnole bénéficiant d’un score de Maurice Jarre (dont certains accords évoquent du reste celui de Eric Demarsan pour Le Cercle Rouge) et de la photographie d’Henri Alekan, le métrage est bâti sur des patronymes bankables à l’international qui défilent au générique dans cet ordre précis : Charles Bronson, Ursula Andress, Toshiro Mifune « and Alain Delon as Gauche », Capucine complétant ce quatuor fameux. 

On l’aura compris, la tête d'affiche c’est bel et bien Bronson devenu vedette grâce aux 7 Mercenaires puis Il était une fois dans l’Ouest, la star féminine c’est la Bond Girl de Dr No (réalisé par.. ? Terence Young !), l’attraction exotique c’est la présence du comédien fétiche de Kurosawa et donc des Sept Samouraïs, Alain Delon complétant le casting en mode special guest star.

Du reste, le film s’ouvre sur une chevauchée en plein vent de Bronson, cavalier solitaire troquant sa fière monture contre une place dans un wagon de chemin de fer, croisant du regard Mifune descendu sur le quai en tenue traditionnelle nippone, dénotant forcément dans le paysage.

A bord du train, Bronson est interpellé par un shérif peu finaud qui se voit contraint de sauter du convoi en marche quand Delon surgit derrière lui et lui intime colt au poing de tailler la route.

Un Delon vêtu de noir, le regard amusé par la situation, à la dangerosité latente soulignée par son côté félin habituel.

Du reste, alors que Bronson et des comparses déjà présents dans leur wagon se lèvent pour déclencher le hold-up pour lequel ils s’étaient donnés rendez-vous là, Delon ne tergiverse pas quand son vis-à-vis tente de dégainer subrepticement, l’abattant sans sourciller au détour d’une séquence ne laissant planer aucun doute sur le caractère impitoyable de son personnage.

Le film est lancé : une attaque d’indiens inopinée contraint alors l’escadron de Tuniques Bleues présent à bord à descendre sur le ballast pour livrer combat, l’un des militaires subissant à son tour la loi de Delon, décidément sardonique à souhait au moment de flinguer ses adversaires.

Débarrassée de cette encombrante escorte, la bande à Bronson fait ensuite sauter le wagon contenant l’objet de leur convoitise, abandonnant subséquemment les passagers en pleine pampa.

Fumant le cigare tout en demeurant constamment menaçant, Delon observe les hommes de main de Bronson s’emparer du magot convoyé avant que ce dernier ne s’intéresse au wagon abritant l’ambassadeur du Japon en visite officielle à destination de Washington, gardé par deux samouraïs prêts à se sacrifier en cas de besoin.

La complicité entre Bronson et Delon est patente, eux qui eurent  trois ans plus tôt l’opportunité de tourner ensemble pour Jean Herman dans Adieu l’ami, thriller franco-italien dans lequel le rôle de Bronson devait être initialement tenu par Richard Widmark ; Delon faisant ici derechef couler le sang en supprimant l’alter ego de Toshiro Mifune pour ravir un sabre d’apparat destiné au président des Etats-Unis.

Non content de son énième forfait criminel, Delon tente de doubler Bronson en dynamitant un wagon où celui-ci s’était attardé, le laissant pour mort avant que Mifune ne le capture et s’en aille cheminer en sa compagnie à la poursuite de Delon qui en parallèle exécute à la volée ses sbires pour n’avoir rien à partager avec personne.

La traditionnelle séquence de bivouac entre les deux poursuivants nous vaut quelques dialogues savoureux, Mifune révélant à Bronson tout en lui cuisinant des mets japonais qu’il est capable de dormir en marchant, éradiquant au passage un moustique d’un coup de sabre lors d’un plan demeuré fameux.

Plus loin, Bronson tente de semer Mifune mais il découvre vite à ses dépens que ce dernier est aussi bien aguerri au maniement du sabre qu’aux arts martiaux, mordant ainsi la poussière sans plus tenter de se rebeller.

On l’aura compris, Bronson n’est pas un authentique méchant, plutôt un outlaw sympathique, quand Delon incarne la vilénie même, laissant augurer d’un final où il lui faudra en payer violemment le prix.

Quelques péripéties plus loin, Ursula Andress fait enfin son entrée en scène dans le rôle de la petite amie de Gauche, plus de trois quarts d’heure après l'entame du film, au sein d’un établissement de plaisir tenu par Capucine.

Les deux actrices agrémentent de leur belle féminité un film d’hommes dont le scénario aurait tout aussi bien pu se dispenser de cette parenthèse à huis clos, pour ne pas dire en maison close, d’une frivolité narrative convenue, Mifune honorant une jeune femme d’origine mexicaine tandis que Bronson s’octroie un repos du guerrier bien mérité auprès de Capucine.

Et Delon... ? Et bien il disparait visuellement de l’intrigue durant tout ce temps-là, qu’on ait droit à une algarade dans le boxon de Capucine ou que Bronson, Mifune et Andress cheminent en plein territoire neigeux ; Andress demeurant leur otage pour ne pas dire leur appât dans la quête de Gauche, qui bien qu’absent physiquement constitue le véritable moteur d'une intrigue s'apparentant à une patiente chasse à l’homme.

Avant qu’on ne le retrouve depuis sa planque caverneuse, toujours aussi menaçant, puis qu’il soit question de la présence de comanches dans les parages du village abandonné où stationnent Mifune et Bronson, qui voit Andress se dénuder sous ses yeux pour mieux tenter de le berner.

Délivrant plus loin cette dernière des griffes des comanches qui allaient lui infliger un supplice dont ils avaient le secret, Mifune et Bronson tombent dans celles de Delon, venu récupérer sa petite amie, notamment épaulé par son compatriote Luc Merenda (familier du cinéma populaire transalpin aux faux airs de Bernard Tapie, revu ensuite dans le feuilleton Châteauvallon).

Contraints de tous s’allier pour tenir tête à un bataillon de comanches les encerclant soudain, ce trio rappelant par certains aspects celui de Le Bon, La Brute et le Truand relègue au second plan ses rancœurs même si chacun se méfie de l’autre, Young contrairement à Sergio Leone cadrant en plans larges ou serrés mais jamais en gros plans les regards de ses interprètes, aux yeux pourtant photogéniques au possible. Un peu comme s’il refusait de céder aux codes du western spaghetti.

La bataille qui s’ensuit voit le trio se mesurer aux Comanches au beau milieu d’un champ en feu, nous offrant un final rehaussant l’intérêt de l’ensemble, où comme de bien entendu malgré sa morgue et son arrogance, le méchant fort bien campé par Delon va payer de sa vie ses forfaitures, d’une rafale de Winchester assénée par Bronson qui prend là le risque de ne jamais revoir le magot initial ; Mifune se sacrifiant avec le sens de l'honneur caractéristique d'un grand seigneur guerrier nippon. 

Alain Delon renouera avec le western durant la même décennie, en revêtant la cape et le loup noirs de Zorro, pour une transposition sur grand écran des aventures du vengeur masqué sous la houlette de Duccio Tessari qui battit des records de recettes en Russie, dans un rôle nettement plus positif que celui de Gauche, sorte de pendant westernien de son Ripley de Plein… Soleil.

Comme quoi pour lui à l’écran, le soleil, qu’il soit plein ou rouge, s’avère toujours être un astre nimbé de mort, la sienne hélas bien réelle nous amenant à saluer ici sa mémoire.

Non sans vous recommander la (re)lecture de l’excellent ouvrage que lui avait consacré notre ami Christopher Leclerc en février 2020, toujours disponible et plus que jamais d’actualité :

https://www.editions-harmattan.fr/livre-alain_delon_l_acteur_qui_offre_son_ame_christophe_leclerc-9782343194141-65144.html

 

Sébastien SOCIAS