L’année 2022 a débuté par un scandale à Hong Kong impliquant 13 fonctionnaires et 20 membres du Conseil législatif nouvellement élus qui ont violé les politiques de contrôle des pandémies de la ville en assistant à une fête d’anniversaire réunissant plus de 200 invités. L’incident a été surnommé le « Hung’s partygate » (洪門宴) et certains accusent les dirigeants de la ville d’incohérence et d’hypocrisie.
La soirée était organisée par Witman Hung, député de Hong Kong au Congrès national du peuple chinois. M. Hung est également l’agent de liaison principal de l’autorité de Hong Kong, Shenzhen Qianhai, un organe de coordination d’un projet de développement régional qui intègre Hong Kong dans la région de la Grande Baie de Chine méridionale.
Le Partygate de Hung
La fête d’anniversaire a eu lieu le 3 janvier, quatre jours seulement après la découverte à Hong Kong du premier cas de transmission communautaire de la variante Omicron, hautement contagieuse. Le gouvernement était en état d’alerte, car une épidémie locale pourrait compromettre l‘‘ouverture des frontières avec la Chine continentale dans le cadre de la politique chinoise du « zéro COVID ».
Pourtant, en pleine crise, plus d’une douzaine de hauts fonctionnaires ont assisté à cette opulente fête d’anniversaire. Selon des photos et des rapports, les participants ont enfreint les politiques de contrôle de la pandémie de l’administration en ne portant pas de masques et en ne procédant pas à l’enregistrement obligatoire via l’application de suivi des contacts de l’État, LeaveHomeSafe.
Des photos de l’événement montrant Witman Hung et ses invités ne portant pas de masque ont largement circulé sur les réseaux sociaux.
Leaked photo of the birthday party Secretary for Home Affairs Caspar Tsui attended, where a #COVID19 patient was present, shows everyone at the party had their masks off#animalfarm #allanimalsareequal pic.twitter.com/TJ1lhd1njK
— Real Hong Kong News (@RealHKNews) January 6, 2022
Parmi la douzaine de fonctionnaires qui se sont joints à la fête figurent Casper Tsui, le secrétaire aux affaires intérieures chargé d’appliquer les mesures de lutte contre la pandémie, et trois hauts fonctionnaires des autorités chargées de l’application de la loi : Au Ka Wang, directeur de l’immigration, Raymond Siu, commissaire de police, et Simon Peh, commissaire de la Commission indépendante contre la corruption (ICAC). Au Ka Wang, qui a été condamné en juillet à une amende pour avoir enfreint les règles du COVID-19 après avoir assisté à un dîner de luxe organisé par le groupe China Evergrande. Il faisait partie de ceux qui ne s’étaient pas enregistrés auprès de LeaveHomeSafe lors de la fête d’anniversaire. Au et Siu sont tous deux membres du Comité de sécurité nationale de Hong Kong.
Les contrevenants auraient pu passer inaperçus, si ce n’est que deux jours après l’événement, un invité a été testé positif à la variante Omicron. Le même jour, le gouvernement a renforcé les règles de contrôle de la pandémie en interdisant les repas à l’intérieur après 18 heures et en fermant les piscines, les centres sportifs, les bars, les gymnases, les musées, etc. pendant au moins deux semaines.
« Connaître la loi et l’enfreindre »
Depuis la mise en œuvre des règles d’enregistrement obligatoire en novembre 2021, de nombreux restaurateurs ont été condamnés à des amendes parce que certains de leurs clients ne s’étaient pas enregistrés avec “LeaveHomeSafe”. En outre, en vertu des mesures actuelles de lutte contre la pandémie, toute personne entrant en contact avec un patient confirmé d’Omicron doit se soumettre à une quarantaine obligatoire de 21 jours au centre de quarantaine de Penny Bay. Les personnes qui enfreignent l’ordre de rassemblement public en cas de pandémie sont passibles d’une amende de 25 000 HKD (3 200 USD) et d’une peine d’emprisonnement de six mois. De nombreux critiques réclament un « traitement égal » pour les contrevenants.
Après l’identification, le 7 janvier, d’un cas provisoirement positif lié à la fête, environ 170 participants à la fête ont été envoyés au centre de quarantaine de Penny Bay pendant 21 jours. Mais 90 d’entre eux ont été libérés au bout d’un jour, car il s’agissait d’une fausse alerte, le résultat du test ayant été contaminé.
Toutefois, le 9 janvier, les autorités ont identifié un autre cas positif lié à la fête, mais la personne ne figurait pas sur la liste des invités. Selon le Centre de protection de la santé, les autorités ont jusqu’à présent identifié 192 participants à la fête. Toutefois, la liste est encore incomplète, car l’organisateur a déclaré qu’il ne savait pas exactement combien de personnes avaient participé à la fête sans y avoir été invitées.
Alors que le camp pro-Pékin tente de critiquer la compagnie aérienne Cathay Pacific après que deux de ses équipages ont enfreint les restrictions de quarantaine et infecté des membres de la communauté avec le COVID-19, de nombreux citoyens demandent des mesures disciplinaires à l’encontre de tous les fonctionnaires impliqués.
L’expression la plus courante pour critiquer les fonctionnaires est « connaître la loi et l’enfreindre » (知法犯法), comme on peut le voir sur diverses plateformes de médias sociaux, notamment Twitter et Facebook :
Même si le partygate n’a pas entraîné d’épidémie, nous devrions blâmer les fonctionnaires et les législateurs. L’enjeu est que ces salauds connaissent la loi et l’enfreignent. Ils sont de connivence et après que le scandale a été révélé, ils se sont couverts les uns les autres.
Maintenant que je le sais, le chef de l’autorité de lutte contre la corruption peut traîner et fréquenter les gens de cette manière. Qu’en est-il du code de conduite du commissaire ? Maîtriser la loi pour pouvoir l’enfreindre ?
Pour éviter de porter un « coup sérieux à la crédibilité de la gouvernance » », la chef de l’exécutif Carrie Lam a affirmé que le gouvernement enquêterait sur les fonctionnaires et déterminerait s’ils ont enfreint les règles par le biais d’une enquête interne. Toutefois, certains internautes doutent qu’une enquête interne soit suffisante :
Ne détournez pas l’attention du public, il s’agit d’une violation flagrante des règles de contrôle des pandémies. Ce qu’il faut, c’est un procès public, pas une enquête interne.
Enquête interne = parapluie protecteur pour leur propre espèce et solution interne à la violation de la loi au sein du bloc dirigeant. Ils ne sont pas obligés de démissionner après avoir enfreint la loi, Pékin ne veut pas les renvoyer et ils sont à la tête d’organes gouvernementaux importants. Qui peut être responsable de l’enquête interne ?
Oiwan Lam
Traduit par Fidèle Juliette Ngo Ngimbous
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