L'Histoire du Sultan Salâh Al-Dîn

Yûsuf Ibn Ayyûb, alias Salâh Al-Dîn " Al-Malik Al-Nâsir Abû Al-Muzaffar " est peut être la figure politique et militaire la plus connue de l'ère islamique. Sultan d'Égypte et de Syrie, revivificateur de l'Islam, " bon prince " parmi les Sarrasins, il est avant tout rentré dans l'Histoire pour avoir repris aux Croisés la cité Sainte de Jérusalem. Respecté et apprécié à la fois en Europe et en Orient, et ce, à travers les âges, Salâh Al-Dîn est depuis la seconde moitié du XX ^e siècle devenue une véritable icône dans les pays arabes. En difficulté face à la colonisation, puis devant les création d'Israël et les multiples invasions internationales l'ayant frappé, le monde arabo-musulman en faillite a tout naturellement cherché dans l'Histoire des figures à observer en héros. Salâh Al-Dîn est l'un d'eux. Personnage fort et rassembleur, Salâh Al-Dîn est aussi, pour beaucoup, l'incarnation du leader musulman par excellence. Pieux, désintéressé, simple et miséricordieux, le sultan Kurde semble avoir réuni toutes les qualités attendues de l'homme que l'on espère voir partir au secours de l'Islam. Le contraste avec les dirigeants que connaît le monde musulman d'aujourd'hui est évidemment saisissant, et la tentation de projeter sur Salâh Al-Dîn ses fantasmes et espérances est vive.

Encensée à des fins politiques dans le Moyen Orient sous Nasser et Saddam Hussein à la fin du XX ^e siècle Chrétien, étudiée par des historiens du monde entier depuis quelques décennies, la vie de Salâh Al-Dîn, hors ses grandes lignes, n'est pourtant guère connu du grand public. Beaucoup ne l'ont en réalité découvert qu'après la sortie de Kingdon of Heaven, un film de Ridley Scott sorti en 2005, dans lequel le sultan est incarné par l'acteur Syrien Ghassan Massoud. Difficulté d'ailleurs, de s'imaginer Salâh Al-Dîn sous d'autres traits depuis, tant l'interprétation sur écran du personnage paraît avoir été si proche de la réalité. En France, exceptée la mémorable œuvre d'Anne-Marie Eddé [qui a été l'une de nos plus importantes sources] les publications à son compte ont été très rares. Un constat qui contraste avec le monde anglophone et arabophone, où les auteurs se sont bousculés depuis des générations, à lui faire son portrait.

Les croisades ont pourtant et d'abord, été un phénomène franc, et ce sont contre les Francs que Salâh Al-Dîn avait eu pour l'essentiel, à mener son combat. Le sultan Kurde devrait en conséquence occuper une partie essentielle de l'historiographie Française. Nous en sommes pourtant loin. René Grousset, peut être le fameux des spécialistes des croisades [qui n'a certes jamais caché son parti pris pour les armées du pape], ne lui consacre que de modestes lignes dans son immense Histoire des croisades.

La présente biographie ne présente à bien des niveaux rien de révolutionnaire, elle devrait ainsi à sa modeste échelle, aider à combler certaines bibliothèques. Complète mais concise, riche en informations mais abordable, la biographie de Salâh Al-Dîn permet une véritable plongée dans l'ensemble de son récit de vie. Sa jeunesse, son vizirat, son action politique et militaire, l'homme de religion qu'il a été. Aucune facette du personnage n'a été élucidé. Faire la biographie de Salâh Al-Dîn sans l'insérer dans son contexte serait pécher, c'est pourquoi un récit des croisades est aussi présent en conclusion. Plus long et plus fourni encore que la biographie du concerné.