Muhammad l'ultime Joyau de la Prophétie

La maison d'Al-Arqam

Devant la gravité de ces persécutions inhumaines, le Prophète ﷺ jugea qu'il serait désormais plus sage pour ses partisans de cacher leur conversion. Il décida de les rencontrer secrètement, de peur que les Qurayshites apprennent ses projets et prennent les mesures qui l'empêcheraient de purifier les Musulmans, en leur enseignant le Livre et la sagesse. Il voulait aussi éviter tout affrontement ouvert avec les polythéistes, car une telle opposition, à ce stade précoce de la Prédication, serait contraire à l'intérêt de la cause de l'Islam encore vulnérable et ne possédant pas d'assises solides.

Un jour, pourtant, au cours de la quatrième année de la mission prophétique, un groupe de mécréants aperçurent les Musulmans qui priaient dans les collines de la Mecque. Aussitôt, ils se mirent à insulter les croyants et les frappèrent. Sa'd Ibn Abî Waqqâs parvint à donner un coup violent à un polythéiste, qui se mit alors à saigner. Ce fut le premier sans versé en Islam.

Le Prophète ﷺ de son côté, continua à proclamer sa foi en Allah et à prêcher l'Islam ouvertement avec insistance, animé d'une profonde conviction, mais pour le bien être des Musulmans et en considération de l'intérêt stratégique de l'Islam, il rencontra depuis la cinquième année de sa mission, ses partisans de manière secrète dans la demeure d'Al-Arqam Al-Makhzûmî, sur le mont As-Safâ.

La première émigration vers l'Abyssinie  1/2

Les persécutions commencèrent vers la fin de la quatrième année de la mission prophétique, timidement d'abord, puis elles se mirent à s'accélérer et à s'aggraver jour après jours et mois après mois, jusqu'à ce que la situation devint extrêmement grave et parfaitement intolérable au milieu de la cinquième année ; les Musulmans se mirent alors à envisager sérieusement les différents moyens qui leur permettraient d'éviter les tortures que les polythéistes leur infligeaient. Ce fut à ce moment, alors que l'amertume et le désespoir accablaient les croyants, que la sourate La Caverne fut révélée, comprenant des versets qui répondaient aux questions soumises par les polythéistes au Prophète ﷺ. Elle comportait aussi trois récits qui incluaient des paraboles très suggestives destinées à être assimilées par les croyants. L'histoire des gens de La Caverne indiquait clairement à ceux-ci qu'ils devaient se retirer des lieux où régnaient l'incroyance et la persécution, dès lors qu'ils craignaient pour leur religion, et qu'il fallait confier leur sort à Allah, c'est à dire en s'abandonnant à lui :

" Les jeunes se dirent mutuellement : maintenant que vous les avez fuis, eux (les mécréants) et ce qu'ils adorent en dehors d'Allah, réfugiez-vous dans la caverne et Allah étendra sur vous les effets de Sa miséricorde et vous apprêtera pour votre séjour des conditions clémentes ".

(Coran 18:16)

L'histoire de la rencontre entre Al-Khidr et Moïse (que la paix soit sur lui) fait explicitement référence aux vicissitudes de la vie. Il y est indiqué que les choses ne sont pas toujours ce qu'elles paraissent ; en d'autres termes, la guerre menée contre les Musulmans pourrait tourner à leur avantage à l'avenir et les tyrans associants pourraient s'il ne revenaient pas à Allah, se retrouver soumis à ces mêmes croyants qui étaient alors en position de faiblesse.

L'histoire de Dhû Al-Qarnayn (Celui qui possède deux cornes), le puissant souverain de l'Occident et de l'Orient précise sans ambiguïtés qu'Allah donne la Terre en héritage à qui Il veut parmi Ses serviteurs. Et Allah ne cesse de susciter des hommes pieux qui soustraient les faibles à l'oppression des tyrans ; les vertueux serviteurs d'Allah étant plus en droit de gouverner la Terre.

La sourate 39, les groupes homogènes, fut alors révélée pour indiquer la solution de l'émigration et préciser que la Terre est suffisamment vaste. Par conséquent, les croyants ne devaient pas se considérer contraints par les forces de la tyrannie et du mal à rester en lieu donné.

" A ceux qui aurait fait le bien en ce bas monde, une bonne récompense leur est destinée et la terre d'Allah est bien vaste ! Seuls les patients reçoivent leur salaire pleinement et sans compter ".

(Coran 39:10)

Le Prophète ﷺ savait que le Négus Ashama roi d'Abyssinie était un souverain juste. Aussi, autorisa t-il les Musulmans à chercher refuge en son royaume.

Au mois de Rajab de la cinquième année de la mission prophétique, un groupe composé de douze hommes et de quatre femmes prit le départ pour l'Abyssinie. Parmi les émigrants, il y avait Uthmân Ibn Affân et son épouse Ruqayya la fille du Prophète ﷺ. Concernant ces deux derniers, le Prophète ﷺ a dit : " C'est la première famille qui, depuis les familles d'Abraham et de Loth (que la paix sur lui lui), émigre sur la voie d'Allah ".

Ils se faufilèrent hors de la Mecque à la faveur de l'obscurité épaisse d'une nuit sans lune et se dirigèrent vers la mer où deux embarcations les emmenèrent pour l'Abyssinie, leur lieu de destination. La nouvelle de leur départ, minutieusement préparé, parvint aux oreilles des Qurayshites, mais il était déjà trop tard, car les Musulmans avaient déjà quitté le port de Shu'ayba. Les émigrants furent chaleureusement accueillis et se virent accorder l'hospitalité qui leur était due.

Au mois de ramadan de la même année, le Prophète ﷺ se rendit dans le Sanctuaire Sacré où se trouvait alors un grand nombre de polythéistes Qurayshites, notamment les notables et se mit subitement à réciter la sourate 53, L'Étoile. C'était la première fois que la Révélation parvenait jusqu'à eux de façon aussi directe et sans que rien ne vienne perturber la récitation. Par le passé, les associants s'enjoignaient de ne pas écouter les versets du Coran et de faire du chahut lors de sa récitation :

" N'écoutez pas ce Coran et opposez lui verbiage et vacarme, peut être serez-vous vainqueurs ".

(Coran 41:26)

Lorsque les paroles d'Allah atteignirent directement les cœurs, ils furent littéralement transportés par un verbe divin merveilleux et fascinant dont la splendeur et la majesté ne sauraient être cernées par l'éloquence de l'homme. Ils se trouvèrent soustraits à leurs occupations, cela les plongea dans un état de concentration extrême vis à vis des paroles divines. Aussi le Prophète ﷺ récita les derniers versets dont la teneur ébranle les cœurs et qu'ils se prosterna après la récitation de ce verset :

" Prosternez-vous donc à Allah et adorez-Le "

(Coran 53:62)

Ils ne purent s'empêcher de se prosterner tous à leur tour. C'était en fait la force merveilleuse de la Vérité qui avait entamé l'obstination des esprits des négateurs arrogants et railleurs ; ils ne purent s'empêcher de tomber en prosterner devant Allah.

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Ils ne surent que dire lorsqu'ils s'aperçurent de la majesté des paroles d'Allah avait conquis leurs cœurs et produit exactement ce qu'ils avaient essayé d'étouffer et d'annihiler, c'est à dire la foi authentique. Leurs amis polythéistes qui n'étaient pas présents à ce moment là les blâmèrent sévèrement. Par conséquent, ils se mirent  à forger des mensonges et à calomnier le Prophète ﷺ, prétendant qu'il avait attribué le pouvoir d'intercession auprès d'Allah en disant : " Ces idoles sont de grands seigneurs dont l'intercession doit être espérée ". Ce furent là des tentatives désespérées en vue de présenter une justification pour leur prosternation auprès du Prophète ﷺ ce jour là. Ce comportement était évidemment en parfaite continuité avec leur habitude désormais solidement ancrée de mentir et de monter des complots.

La nouvelle de cet incident fut transmise aux Musulmans qui avaient émigré en Abyssinie, mais de façon déformée. En effet, il leur fut annoncé que tous les membres de Quraysh s'étaient convertis à l'Islam, ce qui les décida à retourner chez eux. Ils arrivèrent à la Mecque au mois de Shawwâl de la même année. Lorsqu'ils ne furent plus qu'à une heure de trajet de la Mecque, ils apprirent la vérité. Certains d'entre eux reprirent alors le chemin de l'Abyssinie, tandis que d'autres se glissèrent discrètement dans la cité ou bien réapparurent au grand jour mais sous la protection d'un notable local.

Cependant, les polythéistes devinrent furieux lorsqu'ils finirent par savoir que les Musulmans avaient reçu un accueil chaleureux et avaient trouvé une amicale hospitalité en Abyssinie, et dès lors ils durcirent encore plus les tortures et les mauvais traitements qu'ils infligeaient aux Musulmans.

Suite à cette aggravation de la situation, le Messager d'Allah ﷺ jugea qu'il était impératif d'autoriser une seconde émigration en Abyssinie pour les Musulmans les plus défavorisés, afin qu'ils y trouvent refuge. Mais cette nouvelle entreprise fut difficile, car les Qurayshites s'y attendaient et étaient déterminés à la faire échouer.

Toutefois, les Musulmans réussirent à s'organiser si rapidement, que les Qurayshites ne purent contrer leur fuite. Les Musulmans étaient cette fois ci au nombre de quatre vingt trois hommes et dix neuf femmes ou, selon certaines versions, dix huit. La présente de Ammâr Ibn Yâsir parmi eux n'est pas certaine.