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Date de création : 26.02.2011
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31.01.2025
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Extrait du "Cours de philosophie" d'Albert Mendiri aux éditions Scripta, chap. IV " Conscience de soi et connaissance de soi" pp.75-77.
Nous avons vu que ce qui caractérise l’inconscient psychique et ce qui, en définitive pose problème, ce n’est pas tellement qu’il constitue une mémoire oubliée mais qu’il continue à vivre, c’est-à-dire à inspirer nos actes, nos émotions, nos pensées, nos paroles brefs tous nos comportements. Cette vie de l’inconscient psychique se manifeste donc en permanence et à l’occasion de tous les petits faits de la vie quotidienne, y compris ceux qui semblent dépourvus de sens et dont l’origine est attribuée à la fatigue, à l’inattention ou au hasard. Voici ce qu’écrit Freud à ce propos dans « Cinq leçons sur la psychanalyse » :
« … tous ces actes innombrables de la vie quotidienne, que l’on rencontre aussi bien chez les individus normaux que chez les névrosés et qui se caractérisent par le fait qu’ils manquent leur but : on pourrait les grouper sous le nom d’actes manqués. D’ordinaire, on ne leur accorde aucune importance. Ce sont des oublis inexplicables (par exemple l’oubli momentané des noms propres), les lapsus linguae, les lapsus calami, les erreurs de lecture, les maladresses, la perte ou le bris d’objets, etc., toutes choses auxquelles on n’attribue ordinairement aucune cause psychologique et qu’on considère simplement comme des résultats du hasard, des produits de la distraction, de l’inattention, etc. A cela s’ajoutent encore les actes et les gestes que les hommes accomplissent sans les remarquer et, à plus forte raison, sans y attacher d’importance psychique : jouer machinalement avec des objets, fredonner des mélodies, tripoter ses doigts, ses vêtements, etc. ces petits faits, les actes manqués, comme les actes symptomatiques et les actes de hasard ne sont pas si dépourvus d’importance qu’on est disposé à l’admettre en vertu d’une sorte d’accord tacite. Ils ont un sens et sont, la plupart du temps, faciles à interpréter. On découvre alors qu’ils expriment, eux aussi, des pulsions et des intentions que l’on veut cacher à sa propre conscience et qu’ils ont leur source dans des désirs et des complexes refoulés, semblables à ceux des symptômes et des rêves. Considérons-les donc comme des symptômes ; leur examen attentif peut conduire à mieux connaître notre vie intérieure. C’est par eux que l’homme trahit le plus souvent ses secrets les plus intimes. S’ils sont habituels et fréquents, même chez les gens sains qui ont réussi à refouler leurs tendances inconscientes, cela tient à leur futilité et à leur peu d’apparence. Mais leur valeur théorique est grande, puisqu’ils nous prouvent l’existence du refoulement et des substituts, même chez des personnes bien portantes ».
Ce texte met bien en évidence que de multiples faits anodins de la vie quotidienne ne sont pas innocents, qu’ils revêtent un sens dans la mesure où ils parlent de nous, de notre vie intérieure cachée et cachée à nous-mêmes, à notre introspection. Pour mieux faire comprendre ces théories de Freud, on peut retenir l’image ou l’analogie d’un puzzle : les éléments de ce dernier, pris isolément semblent dépourvus de sens ; mais au fur et à mesure que l’on retrouve les liens entre les éléments, qu’on les assemble, se dessine une figure précise. Il en va de même à propos de ces petits faits de la vie quotidienne : isolément, ils peuvent apparaître sans importance et dus au hasard ; rassemblés, ils dessinent les contours de notre personnalité inconsciente.
Les conceptions de Freud conduisent donc à la négation du hasard intérieur, puisque tout est signifiant. Qu’une feuille me tombe dessus lors d’une promenade renvoie, vraisemblablement, à un hasard : il s’agit de la rencontre fortuite entre deux séries causales indépendantes l’une de l’autre, celle qui a conduit à faire tomber cette feuille ; celle qui m’a amené à me trouver sur le chemin à ce moment- là. Il y aurait donc un hasard extérieur mais non un hasard intérieur.
Cette conviction selon laquelle tout comportement humain possède un sens est particulièrement affirmée à propos des rêves. Ces derniers sont souvent étranges voire absurdes. Pourtant Freud les considère comme la « voie royale permettant d’explorer l’inconscient ». A la lumière de ses théories, cela se comprend fort bien. En effet, lorsque le sujet rêve, la conscience est neutralisée et relâche donc sa vigilance. En conséquence, les désirs interdits peuvent refaire surface. Néanmoins, les désirs en question doivent être déguisés, masqués afin de ne pas réveiller le dormeur, qui serait effrayé par la révélation de ces désirs ordinairement refoulés et censurés. Ces déguisements expriment là encore un mécanisme de défense de nature psychologique. Dès lors, tout rêve doit être interprété pour pouvoir en retrouver le sens derrière ses apparences parfois étranges. Dans « L’interprétation des rêves » Freud expose et interprète notamment le rêve suivant :
« Vous dites toujours, déclare une spirituelle malade que le rêve est un désir réalisé. Je vais vous raconter un rêve qui est tout le contraire d’un désir. Comment accorderez-vous cela avec votre théorie ? Voici le rêve :
Je veux donner un dîner mais je n’ai pour toutes provisions qu’un peu de saumon fumé. Je voudrais aller faire des achats mais je me rappelle que c’est dimanche après-midi et que toutes les boutiques sont fermées. Je veux téléphoner à quelques fournisseurs mais le téléphone est détraqué. Je dois renoncer au désir de donner un dîner.
…Ce qui vient (d’abord) à l’esprit (de la malade) n’a pu servir à interpréter le rêve. J’insiste. Au bout d’un moment, comme il convient lorsqu’on doit surmonter une résistance elle me dit qu’elle a rendu visite hier à une de ses amies ; elle en est fort jalouse parce que son mari en dit toujours beaucoup de bien. Fort heureusement l’amie est maigre et son mari aime les formes pleines. De quoi parlait donc cette personne maigre ? Naturellement de son désir d’engraisser. Elle lui a aussi demandé : « Quand nous inviterez-vous à nouveau ? On mange toujours si bien chez vous. »
Le sens du rêve est clair maintenant. Je peux dire à ma malade : « C’est exactement comme si vous lui aviez répondu mentalement « Oui-da », je vais t’inviter pour que tu manges bien, que tu engraisses et que tu plaises plus encore à mon mari ! J’aimerais mieux ne plus donner de dîner de ma vie »…Le rêve accomplit ainsi votre vœu de ne point contribuer à rendre plus belle votre amie…
Il ne manque plus qu’une concordance qui confirmerait la solution. On ne sait encore à quoi le saumon fumé répond dans le rêve : « D’où vient que vous évoquez dans le rêve le saumon fumé ? » « C’est, répond-elle le plat de prédilection de mon amie. » Certes ce rêve relève d’une interprétation aisée. Mais comme on le voit, tous les éléments du rêve remplissent une fonction précise. Nous retrouvons là l’image du puzzle ; lorsqu’on relie les éléments entre eux l’ensemble ainsi que tous les détails prennent sens. »
L’inconscient psychique, par essence inaccessible au sujet conscient puisque c’est ce dernier qui censure les désirs interdits, continue à vivre et à se manifester. Comme nous venons de le voir, l’inconscient psychique se manifeste en permanence et par la médiation de petits faits en apparence sans importance. Ce processus a conduit Freud à imaginer une structure de l’inconscient psychique comportant trois niveaux : le niveau des pulsions, des besoins de satisfaction ou le « ça » ; le niveau des interdits inconscients ou le « sur-moi » ; les relations inconscientes et plus ou moins équilibrées entre ces deux niveaux ou le « moi » inconscient.
L’individu a besoin de satisfactions. Dès lors, si les interdits sont trop importants, si le déséquilibre entre les besoins de satisfactions et les interdits est excessif, alors le sujet peut sombrer dans le trouble mental. Ce dernier revêt des formes multiples mais celles-ci présentent néanmoins un point commun, à savoir la perte de la liberté intérieure. L’expression commune "C'est plus fort que moi", lorsqu'elle n'est pas pas galvaudée, qu’elle correspond à une situation réelle, traduit bien cette perte de liberté intérieure.
Cette perte de liberté intérieure revêt des formes plus ou moins graves, selon que le déséquilibre ou le conflit intérieur entre les besoins de satisfaction et les interdits sont plus ou moins marqués. Cette idée de déséquilibre entre satisfactions et interdits souligne qu’il n’y a, selon Freud, qu’une différence quantitative entre le normal et le pathologique dans le domaine des troubles mentaux.
La nosologie ou la classification des troubles mentaux distingue trois grands types : les névroses ; les perversions ; les psychoses. Les névroses se caractérisent par le fait que le sujet est conscient du trouble qui l’affecte et qui d’une manière générale perturbe les actions qu’il désire mener, qu’il en mesure l’absurdité ou l’irrationalité et en souffre, mais qu’il est dans l’incapacité de le surmonter. Il peut s’agir des phobies diverses ou peurs irrationnelles ; d’obsessions ; de l’angoisse qui se distingue de la peur en ce sens qu’elle n’a pas d’objet précis ; de troubles de la sexualité comme l’impuissance ou la frigidité etc.
Les perversions se présentent en quelque sorte comme l’envers des névroses : le sujet est là encore conscient de son trouble mais il ne peut s’empêcher de passer à l’acte lorsque les circonstances réveillent en lui ses fantasmes : voyeurisme, exhibitionnisme, mais aussi crime sans raison en sont quelques exemples.
Enfin, les plus graves de ces troubles renvoient aux psychoses, troubles qu’on désignait au XIX° siècle sous le nom de folie. Le sujet ne prend pas conscience de son trouble et lors de ses crises ne fait plus la distinction entre le réel et son imaginaire. Toutes les nuits nous connaissons un état identique, à savoir le rêve, mais heureusement pour nous, nous nous réveillons et prenons clairement conscience de la nature onirique des scènes vécues. Les troubles psychotiques les plus connus sont la schizophrénie, où le sujet ne distingue plus réel et imaginaire ; la paranoïa où le sujet se croit persécuté en dépit des preuves qui démentent cette conviction ; la psychose maniaque dépressive où le sujet passe de la tristesse à l’euphorie, sans raison. Bien entendu, il convient de ne pas assimiler cette grave affection avec la cyclothymie ordinaire ou changements brusques d’humeur, qui semble se traduire par le même phénomène mais où le sujet pourrait, si les circonstances l’exigeaient, se maîtriser. Telles sont, à grands traits, les principales manifestations pathologiques de l’inconscient psychique.