1000 films pour aimer le Western

EL MERCENARIO de Sergio Corbucci Italie 1970

Éditeur : Sidonis Calysta  --Sortie vidéo 7 avril  2023

Présentations par Patrick Brion et Jean-François Giré

DVD & BLU-RAY

Nous répéterons jamais assez que Sergio Corbucci est un maitre du western au même titre que Sergio Léone à qui il rend adroitement hommage dans ce film» Il ne fut jamais aussi brillant lorsqu’il met en scène des personnages ô combien antagonistes avec toujours uns surenchère frôlant volontairement la caricature dans sa démonstration La parodie n’est pas donnée à tout un chacun ; c’est un talent autre et l’homme à la dizaine de westerns (1) va le démontrer.

L’histoire va nous parler de révolution, de ceux qui la font, de ceux qui en pâtissent et de ceux qui en profitent. : Dans cette dernière se trouvent deux individus vénaux : Curly (Jack Palance) un joueur et bandit détestable qui s’offre au plus offrant et Kowalski un mercenaire (Franco Nero) qui va accepter de faire traverser des liquidités au Mexique via les lignes ennemies
Dans les deux autres un être incorruptible , un péon travailleur minier et un révolutionnaire en herbe Paco Roman (Tony Musante) qui aura maille avec les deux précités en prenant la tête d’une insurrection

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Les auteurs (2) renvoient dos à dos les composants humains de ce monde révolutionnaires et mercenaires, utopiques et calculateurs. en ébullition. Ils trouvent ce monde parodique, grotesque parfois si bien que le prologue peut passer pour une métaphore et le discours une mise en garde contre l’utopie « Continue à rêver , mais garde les yeux ouverts » Corbucci insistera dans son discours avec en 1970 : Compañeros (Vamos a matar, compañeros) œuvre tout aussi et même plus virulente. Ici il se complait à peindre ce trio masculin infernal. Mais il n’est pas dupe et pessimiste malgré son regard bienfaisant : un de ces westerns se termine pour la mort du héros laissant le méchant vainqueur (3) partir vers d’autres massacres.

Le film est un véritable champ de bataille ,( plus de morts que d’interprètes) glorifié par une musique signée par Ennio Morricone et Bruno Nicolaï (4) portée aux nues par des acteurs merveilleux et par une mise en scène inventive.

Ce film catalogué dans le genre « Spaghetti Zapata » du nom du révolutionnaire est plus qu’une œuvre ludique mais un film politique – pas ouvertement certes- qui rappelle le malaise de ce pays (l’Italie), fracturé si ce n’est en feu durant une quinzaine d’années ; période appelée « Années de plomb » où la démocratie était en danger avec une série d’attentats , manifestations et autres désordres sociaux
Le cinéma italien de ces décennies 1970-1980 donnera des œuvres fortes, dérangeantes accusatrices et violences dans sa dénonciation aux titres symboliques et explicites (3)
Le cinéma italien non apaisé répandra sa sensibilité dans leur western avec des démonstrations excessives comme les maux de leur société et ce fut durant ces décennies leur âge d’or.

Saluons L’interprétation qui est aussi une réussite avec ces seconds rôles et ce trio masculin infernal ; des premiers nous avons l’inévitable EDUARDO FAJARDO acteur fétiche de Corbucci qui tourna dans une trentaine de westerns où il jouait souvent les militaires cruels GIOVANNA RALLI dans un rôle de prolo intellectuelle est sensuelle à souhait qui tourna avec Rossellini (1959 : Le Général Della Rovere et Les Évadés de la nui1960 - Vive l'Italie 1961) Blake Edwards (: Qu'as-tu fait à la guerre, papa ? 1966 )Ettore Scola (Nous nous sommes tant aimés 1974) sans oublier son passage dans le cinéma français ( Alex Joffé – Robert Hossein-Christian-Jaque ) et des seconds TONY MUSANTE qui cabotine autant que son personnage de paysan frustre et béta le permet est un acteur né dans le Connecticut et qui fit du cinéma durant 4 décennies dans des films certes inégaux , un série superbe « OZ » mais est néanmoins très demandé par James Gray ( La nuit nous appartient (2007)- The Yards (1999) FRANCO NERO est le John Wayne italien avec des yeux plus beau et malheureusement une carrière moins honorable et pourtant bien remplie notamment dans le western pour lequel il joua une bonne quinzaine de fois et grâce à Corbucci qui lui offrit ses meilleurs rôles, son personnage jubile de cet affrontement mi enfantin mi paternaliste avec Paco et de ses plaisanteries facétieuses. Il reste le remarquable JACK PALANCE il écrase par son rôle de méchant croyant , de crapule fière de malade enivré par le danger, il se montre percutant , persuasif quand il décide de quitter ses ennemis nu comme un ver et fier comme un paon . Il est un des rares acteurs américains tournant en Italie dont le jeu fut bien souvent impeccable

(1) De 1964 Massacre au Grand Canyon (Massacro al Grande Canyon) à Le Blanc, le Jaune et le Noir (Il bianco, il giallo, il nero) son moins pertinent

(2) Giorgio Arlorio, Adriano Bolzoni, Sergio Corbucci, Franco Solinas, Sergio Spina et Luciano Vincenzoni qui travailla pour des cinéastes imposants : Giuseppe Tornatore ,--Pietro Germi -- Mario Monicelli -- Sergio Leone (1965 : Et pour quelques dollars de plus et 1966 : Le Bon, la Brute et le Truand et en 1971 : Il était une fois la révolution ) ce qui explique peut-être les similitudes

(3) La Classe ouvrière va au paradis (1971) de Elio Petri -- Au nom du peuple italien (1971) -- Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon (1970) -- Todo modo (1976) --L'Affaire Mattei (1972)-- Un juge en danger (1977)

(4) Le thème du film, L'Arena, composé par Ennio Morricone, a ensuite été réutilisé par Quentin Tarantino dans Kill Bill : Volume 2 (2004) : lequel consacra un documentaire sur cet auteur