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07.02.2025
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Rubrique " Nature et impasses philosophiques". Suite du billet N°4430.
Extrait de Philosophie pour tous, Tome VI, A.MENDIRI, Amazon.
Prochain billet demain jeudi 01 juin.
Nous avons vu que le marxisme-léninisme, en oubliant de prendre en compte la notion de nature aboutissait à une conception du monde et des relations sociales très réductrice, amputant son mode d’interprétation des phénomènes sociaux d’un élément capital, ce qui explique, à nos yeux, son échec historique retentissant dans tous les pays où sa gouvernance a suivi aveuglément sa doctrine.
En effet, en bons matérialistes, les marxistes-léninistes étaient convaincus que les comportements humains se voyaient uniquement façonnés par les conditions matérielles d’existence et qu’en conséquence il suffisait de modifier celles-ci pour faire émerger un « homme nouveau », un homme seulement préoccupé par l’intérêt général et oubliant ses intérêts particuliers et égoïstes. Certes, ce processus demandait du temps et d’ailleurs c’est sur ce point fondamental que les disciples de Marx se séparaient des anarchistes, tel Bakounine, persuadés les concernant que cette métamorphose humaine et sociale se verrait immédiatement concomitante de la révolution sociale. Dès lors, l’État pouvait disparaître aussitôt et il n’y avait nul besoin d’un État prolétarien provisoire et sa dictature temporaire afin de faire émerger cet « homme nouveau ».
De ce point de vue, les disciples de Marx et plus tard de Lénine se réclamaient d’une forme de réalisme que les anarchistes, à leurs yeux, passaient à la trappe. Pourtant ce réalisme s’avérait bien incomplet puisque les marxistes ne prenaient pas en compte la notion de nature, indépendamment des inflexions que le milieu ou l’éducation pouvaient lui apporter. Lorsque nous évoquions la notion de nature, nous faisions allusion aux caractéristiques originales de l’homme, être conscient et dépourvu d’instincts et ne connaissant de ce fait aucune limite naturelle à la poursuite et à la recherche de satisfactions individuelles, démarche d’autant plus impérieuse que l’homme possède une claire conscience de son individualité.
Il est vrai que l’idée de nature chez l’homme est originale voire paradoxale, puisque sa nature consiste précisément, contrairement à toutes les autres espèces animales, à ne pas posséder de manière innée des limites naturelles, à son action et à ses besoins de satisfaction. Il n’en reste pas moins que cette absence relève de la nature et qu’il faut bien en tenir compte, sans quoi cela revient à nier la réalité.
Certes, l’éducation peut agir sur cet état de fait. C’est même sa fonction première et fondamentale. Nous devrions aller plus loin et dire que c’est la vocation de l’homme de s’arracher à cette nature originelle et de construire un homme en fonction de valeurs culturelles. « L’homme invente l’homme » proclamait, avec raison nous semble-t-il, JP Sartre. Mais cet état de fait s’avère indépendant des conditions matérielles d’existence et celles-ci ne constituent qu’un facteur parmi d’autres des influences pouvant jouer sur ce modelage de l’être humain. Ajoutons pour faire bonne mesure que cet état de fait naturel est permanent, constitue une constante de l’histoire humaine et qu’une éducation quelconque, quel que soit le mode de société au sein duquel elle s’exerce, doit prendre en compte cette donnée originaire contre laquelle elle doit lutter avec plus ou moins de succès et de durabilité. Celle-ci ne s’efface point face à l’action transformatrice de l’éducation.
Cela explique que se donner pour but une condition humaine où cette donnée naturelle serait entièrement et définitivement éradiquée est une illusion idéologique fatale et qui enferme l’échec comme l’orage enferme la foudre ; surtout lorsqu’on assigne aux seules conditions matérielles d’existence la vertu de pouvoir parvenir à un tel résultat parfait. La réalité rattrape toujours ceux qui veulent l’ignorer et d’ailleurs, sur ce point, l’histoire récente a tranché avec éclat.
Loin de nous l’idée de nous en réjouir puisque, après tout, le marxisme-léninisme se faisait une très haute idée de l’homme, des fins dernières de son histoire et de la noblesse de ses objectifs.
Ces considérations semblent très éloignées du thème annoncé, à savoir une comparaison implicite entre le marxisme et le christianisme concernant cette notion de nature. Pourtant, là encore, comme nous nous proposons de le développer, c’est la notion de nature qui constitue le « point aveugle » de la théologie catholique. Rappelons que d’un point de vue strictement anatomique, le point aveugle de la rétine est le seul point de celle-ci qui ne voit pas, qui est aveugle et ce, pour des raisons de confluence de divers vaisseaux et nerfs en ce point.
S’agit-il, comme pour le marxisme-léninisme, d’une négation de l’idée de nature ? Sûrement pas. L’erreur idéologique est d’un autre ordre, mais tout aussi handicapante et porteuse de conséquences qui obscurcissent le message de l’Église et rend compte des difficultés qu’elle rencontre au sein du monde contemporain afin de faire connaître et comprendre l’essence de son message.
De quoi s’agit-il ? Il nous faut rappeler le cheminement historique du christianisme afin de bien comprendre les enjeux dont il est question. En premier lieu, n’oublions pas que les fondements du message chrétien se situent au sein des Évangiles. Sans entrer dans des développements trop importants, rappelons que St Jean proclame que « Dieu est amour », amour agapè, amour gratuit, amour qui n’attend aucune contrepartie et qu’à ce titre Dieu s’est fait homme en la personne du Christ afin que l’homme puisse accéder à la plénitude divine, à la plénitude sur le mode de la finitude, condition inaccessible à l’essence de la finitude repliée sur les seules frontières de son essence. Il appartient aux hommes de faire bon accueil à ce message et de se comporter à l’image de ce Dieu-Amour, condition ontologique sans laquelle la plénitude divine nous resterait par nature étrangère.
Dès lors, des conséquences capitales découlent du cœur de ce message. En premier lieu l’Esprit prend le pas sur la loi, c’est-à-dire les dix commandements. Il ne s’agit pas de les abolir mais de les considérer pour ce qu’ils sont, autrement dit des chemins en vue de vivre selon la loi d’Amour ou selon la charité dit St Paul (« Si vous n’avez pas la charité, vous auriez beau avoir une foi qui soulève des montagnes ou bien distribuer tous vos biens aux pauvres, vous n’êtes rien » sous-entendu vous n’êtes que finitude avec ses limites ontologiques indépassables) et qui doivent, dans leur application, être subordonnés à l’Esprit, c’est-à-dire à l’exigence d’amour. Ainsi, on comprend mieux pourquoi, comme le proclame de manière révolutionnaire les Évangiles, « ce n’est pas l’homme qui est au service de la loi mais c’est la loi qui est au service de l’homme ».
En second lieu, l’homme a pour vocation de s’arracher à sa nature originelle, telle que nous l’avons analysée, afin de se hisser à une nature maîtrisée et choisie, mais en fonction d’un choix ontologique fondamental, autrement dit soit comme une forme d’humanité sur le mode de la finitude et coupée de Dieu, soit comme humanité sur le mode de l’amour agapè, reliée à Dieu.
Ainsi, il découle de ces observations que la véritable vocation de l’homme fidèle au message évangélique consiste à s’arracher à sa nature originelle et à s’élever à l’Amour agapè. L’Amour agapè n’est pas de nature biologique, n’est pas constitué par des exigences liées à la finitude initiale. C’est une visée ontologique choisie et qui rompt non seulement avec les caractéristiques de la nature originelle mais également qui se refuse à un modèle d’humanité inventée mais coupée de Dieu et donc de l’Amour agapè. A ce titre, afin de dissiper tout malentendu, ce choix ontologique est le choix d’une certaine condition humaine plutôt que d’une nature ou si l’on préfère le choix d’une condition sinon divinisée tout au moins d’une condition se donnant pour raison d’être cette divinisation. Nous préférons le terme de condition humaine à celui de nature humaine, car, par définition, la notion de nature renvoie à des nécessités incontournables et non à des choix. La bactérie, la fourmi, l’éléphant ne choisissent pas d’être bactérie, fourmi, éléphant. L’homme choisit quel type d’homme il veut être. La nature originelle de l’homme possède d’ailleurs pour originalité radicale d’amener l’homme à effectuer des choix. La nature profonde de l’homme consiste à ne pas en avoir, en tout cas de manière définitive et indépassable.
Or que s’est-il passé historiquement ? L’Église a voulu traduire en termes grecs le message chrétien, initialement de nature hébraïque, ce qui demandait un effort redoutable d’acculturation, de traduction des éléments d’une culture dans ceux d’une autre culture. A cet effet, St Thomas d’Aquin, au XIII° siècle a choisi de s’appuyer sur le philosophe grec Aristote, car celui-ci affirmait, comme les Hébreux, qu’il n’y avait pas de séparation entre le corps et l’âme et que l’homme était constitué par leur union indissociable. Il est vrai que cet emprunt s’est vu entaché par des influences du néo-platonisme, de Plotin en particulier, qui considéraient que l’âme était de nature radicalement distincte du corps, et il faut bien avouer que l’entrechoc entre ces deux influences contraires n’ont pas peu contribué à la difficulté de lisibilité de la théologie catholique.
Mais à vrai dire, il y a plus. Car même si l’on s’en tient à la seule influence d’Aristote, il faut aussitôt souligner que la notion de nature ou d’essence de l’homme est sans doute le concept central de sa doctrine avec toutes les ambiguïtés par rapport au message évangélique et à la tradition juive que cela suppose. Il ressort de la philosophie d’Aristote que la nature constitue une réalité figée, des caractéristiques essentielles qu’il convient de respecter si l’homme désire véritablement demeurer un homme et non un « monstre » pris au sens rigoureux du terme, autrement dit celui qui s’écarte du chemin qu’il doit suivre.
Il nous faudra donc entreprendre l’analyse de cette notion aristotélicienne de la nature pour voir en quoi elle conduit à un éloignement voire peut-être même à une trahison du message évangélique et plus largement celui délivré par la culture biblique.