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4641 LEVI-STRAUSS OU LA MORT DE L'HOMME

Publié le 22/12/2023 à 06:08 par cafenetphilosophie Tags : sur france place coup homme mort société histoire pouvoir demain

Rubrique "Pensées du chaos". Suite du billet N°4634.

 

Extrait de Philosophie pour tous, Tome VIII (en cours de rédaction), A.MENDIRI, Amazon.

 

Prochain billet demain samedi 23 décembre.

 

 

Claude Lévi-Strauss, (1908-2009), est un anthropologue et ethnologue français qui a exercé une influence majeure à l'échelle internationale sur les sciences humaines et sociales dans la seconde moitié du XXᵉ siècle. Il est devenu l'une des figures fondatrices du structuralisme à partir des années 1950 en développant une méthodologie par laquelle il a renouvelé en profondeur l'ethnologie et l'anthropologie en leur appliquant les principes issus de la linguistique. Professeur de philosophie il se tourne à partir de 1935 vers l'ethnologie. Il cherche à expliquer la société et ses manifestations comme un tout doté d'une cohérence interne échappant à la conscience des individus. Professeur au Collège de France en 1959 il se consacre à une approche structurale des mythes. Ses principales œuvres : Les structures élémentaires de la parenté (1949); Tristes tropiques (1955) ; Anthropologie structurale (1958); Totémisme aujourd'hui et La pensée sauvage (1962).

 

Revenons à la définition du structuralisme tel que l'a pensée son fondateur Lévi-Strauss. C'est une  théorie selon laquelle l'être humain ne peut être appréhendé qu'à travers un réseau de relations symboliques qui sont autant de structures auxquelles il participe sans en être conscient. Le structuralisme s'inspire du modèle linguistique, notamment du "Cours de linguistique générale" de Ferdinand de Saussure (1916) qui appréhende toute langue comme un système dans lequel chacun des éléments n'est définissable que par les relations d'équivalence ou d'opposition qu'il entretient avec les autres éléments de ce langage.

 

Le structuralisme constitue donc une tentative de généralisation du langage, c'est-à-dire de ramener tout ce qui touche l'homme à des effets de langage. Mais aussi, à un langage lui-même ramené à la syntaxe.  Dès lors le structuralisme se limite a une analyse synchronique des institutions pour en dégager la structure. Il applique à l'ethnologie sa méthode d'analyse qui explique la diversité des faits sociaux par un nombre limité de possibilités logiques tributaires de l'architecture du cerveau humain.

 

La méthode que Lévi-Strauss initie et qu'il appelle l’anthropologie structurale,associe donc les principes généraux des sciences naturelles et ceux de la linguistique, pour appréhender une société en tant que système complexe doué de propriétés autonomes invariables (« structurales ») et découlant des relations entre les éléments (les individus) qui le composent, non perceptibles consciemment a priori par eux. Lévi-Strauss précise sa pensée à cet égard dans "Tristes tropiques": « L’ensemble des organisations sociales d’un peuple est toujours marqué par un style, elles forment des systèmes. Je suis persuadé que ces systèmes n’existent pas en nombre illimité, et que les sociétés humaines comme les individus […] ne créent jamais de façon absolue, mais se bornent à choisir certaines combinaisons dans un répertoire idéal qu’il serait possible de reconstituer. En faisant l’inventaire de toutes les organisations sociales observées, de toutes celles imaginées […] on parviendrait à dresser une sorte de tableau périodique comme celui des éléments chimiques où toutes les organisations réelles ou simplement possibles apparaîtraient groupées en familles, et où nous n’aurions plus qu´à reconnaître celles que les sociétés ont effectivement adoptées ».

 

Afin de mieux saisir la notion de structure inspirée par la linguistique, voyons ce qu'il en est au sein d'un langage quelconque.Par exemple,dans un idiome ou pour signifier"rouge, roux, orange, cuivré, etc.." on ne disposerait que du seul mot "rouge", on déclarerait que "la lune est rouge". En outre, ces différences de couleur n'étant plus dites, cesseraient d'être consciemment perçues.Elles ne joueraient plus aucun rôle dans la culture ignorant les ressources linguistiques pour les représenter. Le sens attribué à un mot ne découle donc pas de la réalité extra-linguistique à laquelle il renvoie, mais il est lié à la structure du langage à laquelle il appartient. Par exemple,la signification de "rouge" est déterminée par les rapports que ce terme entretient avec les autres noms de couleurs au sein du champ sémantique français de la couleur. Cette signification change si la structure sémantique s'appauvrit ou s'enrichit.

 

Il en va de même concernant une société quelconque. Une société exprime des structures dont les formes valent indépendamment des contenus particuliers qui les concrétisent.Elles sont un jeu qui se jouent selon certaines règles ou une combinatoire d'éléments qui n'existent que par rapport au système dans lequel ils ont leur fonction. L'expérience brute du réel, indépendamment de ce maillage symbolique serait informe et chaotique, dépourvu de toute signification. Ces structures s'imposent à l'homme de manière inconsciente et déterminent son comportement.

 

Le sujet est donc coupé de ce qui le conditionne et qu'il ne peut connaître par introspection. Il doit renoncer aux explications spontanées qu'il conçoit s'il veut accéder à une connaissance effective de lui-même et de la société et de l'histoire. Les raisons et les justifications que la société ou les individus donnent aux coutumes ou aux actions sont donc illusoires.

 

Quant audevenir et à la succession des sociétés, elles n'obéissent à aucune logique et restent étrangères à toute rationalisation. Une structure naît, est détruite ou remodelée, au gré des causes aléatoires qui s'exercent, sans raison. L'origine de ces structures est contingente mais devient nécessaire dès lors qu'elle est en place. De ce point de vue, le structuralisme est une forme du nihilisme contemporain. Il prolonge la philosophie du soupçon en remettant en cause la conception de l'homme, être conscient, libre, responsable de ses paroles et gestes.

 

C'est en conséquence une démarche réductrice puisqu'elle réduit l'homme à de simples structures. L'énergie motrice de ces structures inconscientes irrigue le pouvoir et le désir, manifestations anthropologiques de forces et de causes dépourvues de sens. C'est pourquoi Michel Foucault pourra évoquer ce type d'approche des sociétés humaines comme signant "la mort de l'homme", tout au moins de l'homme tel que le conçoivent la philosophie rationaliste et vingt siècles de christianisme. Ainsi après la proclamation de la 'mort de Dieu" par Nietzsche, autrement dit la mort de l'idée de vérité, les sciences humaines telles que le structuralisme les conçoit conduisent-elles à la "mort de l'homme traditionnel, conscient, libre, responsable de ses actes.

 

Le structuralisme a dominé la pensé philosophique pendant plus d'une décennie à partir des années 60. avec Althusser, Lacan, Foucault, Derrida, Deleuze Merleau-Ponty...Seul le spiritualisme chrétien y échappe avec Paul Ricoeur. Pour Lévi-Strauss l'herméneutique ou l'interprétation des phénomènes porteurs apparemment d'un sens (comportements, mythes, langages, institutions, rites...) pêcheraient par subjectivisme. De telles interprétations seraient arbitraires et non scientifiques.

 

Paul Ricoeur et l'herméneutique , c'est-à-dire l'interprétation des phénomènes, refuse de ramener le sens au non-sens des structures sous-jacentes qui seules, sont objectives Il cherche un sens aux structures alors que pour Lévi-Strauss c'est une attitude plus religieuse que scientifique. Pour sa part Ricoeur plaide la complémentarité entre expliquer et comprendre. Expliquer révèle la genèse et le mécanisme d'une structure. Comprendre en dévoile le sens.

 

Certes Lévi-Strauss défend l'égale dignité de toute les cultures mais il récuse l'idée d'un progrès continu, marque à ses yeux d'un esprit colonialiste.Le barbare, c'est d'abord l'homme qui croit à la barbarie". L'idée de barbarie est une opinion, un préjugé, une croyance et non une réflexion. Le véritable barbare c'est celui qui n'a pas compris que tous les hommes ont une culture.

 

Cependant, en vertu même de ses principes et de ses présupposés méthodologiques, le structuralisme ne ménage aucune place sérieuse pour une philosophie morale de l'action. Il s'en tient à la question "Que puis-je connaître?" et ignore la question "Que dois-je faire?" Le structuralisme s'accommode parfaitement de l'indifférence et de l'inaction, face par exemple aux souffrances et aux injustices engendrées par les structures.

 

De plus et comme nous l'avons déjà noté, le structuralisme ignore la dimension historique, les liens unissant le passé, le présent, l'avenir. Le processus temporel se caractérise par une série de discontinuités sans raison. Les récits que l'on peut construire après coup ne sont que des fables sans intérêt , des rationalisations non fondées.

 

Ainsi, le structuralisme constitue bien un mouvement de pensée qui nie toute forme de sens, que ce soit le sens attribuable à l'homme comme être conscient, à son action étrangère par nécessité à toute préoccupation morale et à toute valeur délibérément choisie, à l'organisation des sociétés commandée par des structures qui échappent à son action volontaire, à l'histoire humaine constituée par des successions de moments sans lien entre eux, et à vrai dire à toute réalité quelle qu'elle soit. Le structuralisme est bien une pensée du chaos et du non-sens et, à ce titre, le témoignage par excellence d'une forme de nihilisme contemporain.