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4725 DE LA NECESSITE DES LOIS

Publié le 15/03/2024 à 06:05 par cafenetphilosophie Tags : course sur vie moi place monde soi animal homme société nature cadre pouvoir demain

Rubrique "La liberté au sein de la Cité". Suite du billet N°47 18.

 

Extrait de Philosophie pour tous, Tome VII, A.MENDIRI, Amazon.

 

Prochain billet demain samedi 16 mars.

 

 

L'homme est un être paradoxal. D'un point de vue strictement biologique, il est à la fois très faible et potentiellement très puissant . Il est très faible car il ne possède ni crocs, ni griffes, ni musculature puissante et il ne court pas vite. Il demeure potentiellement très puissant grâce à son cerveau d'une complexité inégalée dans la nature et lui permettant de développer éventuellement la pensée et d' exécuter les projets de cette pensée potentielle grâce à une véritable main, c'est-à-dire une caractéristique naturelle originale puisque le pouce peut rejoindre les autres doigts, donnant à celle-ci une véritable capacité d'emprise sur son environnement.

Mais comme ce descriptif le souligne les atouts de l'espèce humaine, quoique autorisés par sa nature biologique, restent potentiels s'ils ne trouvent pas un milieu favorable pour se développer et s'actualiser véritablement. Or ce milieu favorable renvoie à l'état social, au contact et aux interactions avec les membres d'une société, autrement dit d'un ensemble organisé et donc réglé par des coutumes ou des lois. Car seul l'état social permet d'actualiser les possibilités individuelles et naturelles d'un être humain, c'est-à-dire sa pensée et un langage pour la traduire et seul cet état social est à même d'exploiter, grâce à la division sociale des taches, les potentialités de l'espèce humaine.

Ainsi, s'il est vrai que l'homme se voie dépourvu d'instincts, autrement dit de savoirs naturels innés mais limités et rigides et qu'il dispose en lieu et place de ces instincts la pensée lui permettant de tout apprendre et de se dépasser sans cesse dans le cadre d'une évolution culturelle permanente, il n'en reste pas moins que même si ce n'est pas une nécessité absolue, la vie en société reste la condition naturelle et souhaitable pour les individus humains.

Or une société quelconque mérite cette appellation à condition de former un tout organisé et réglé par des exigences collectives sans lesquelles les dispositions potentielles de l'espèce humaine ne pourraient pas voir le jour. Ainsi retrouvons-nous le paradoxe de l'homme. Il est libre assurément par nature puisqu'il possède une conscience, une pensée qui le délivrent des instincts rigides et non-évolutifs des autres espèces animales. Mais dans le même temps il se voit naturellement amené à vivre au sein d'un corps social avec les limites, les exigences, les contraintes que suppose celui-ci.

Doit-on en conclure qu'il est conduit par là-même à sacrifier sa liberté naturelle? Sûrement pas. Car tout homme, qu'il vive de manière très hypothétique à l'état naturel, hors d'une société ou dans le cadre de l'état social, recherche avant tout son bien. Certes, l'absence de savoir naturel ou d'instinct l'expose à tous les excès possibles inspirés par des désirs non bridés naturellement ou par des passions déréglées. Il est tenté de faire ce qu'il lui plaît et non ce qu'il veut, à savoir son bien véritable. Pourtant, la liberté naturelle authentique qui caractérise son espèce exige qu'il fasse son bien et que c'est là que réside sa véritable liberté.

Bref, il n'y a pas de liberté sans société, de société sans loi, mais faut-il encore que ces lois soient au service du bien collectif et donc par ricochet au service du bien de chacun des composantes de cette société. Ces rappels appellent quelques précisions sur le statut des lois qu'il nous faut maintenant aborder.

En premier lieu, il va de soi que si les hommes étaient spontanément et continûment raisonnables, les lois ou les exigences collectives s'avéreraient totalement inutiles. C'est ce que soutient Spinoza (XVII° siècle) dans son "Traité politique" :" Si les hommes étaient disposés par la Nature qu'ils n'eussent de désirs pour ce qu'enseigne la vraie Raison, certes, une société n'aurait besoin d'aucunes lois. Il suffirait absolument d'éclairer les hommes par des enseignements moraux pour qu'ils fissent d'eux-mêmes...ce qui est vraiment utile. Mais tout autre est la disposition de la nature humaine; tous observent bien leur intérêt, mais ce n'est pas suivant l'enseignement de la droite Raison; c'est le plus souvent entraînés par leur seul appétit de plaisir et les passions de l'âme (qui n'ont aucun égard à l'avenir et ne tiennent compte que d'elles-mêmes) qu'ils désirent quelque objet et le jugent utile. De là vient que nulle société ne peut subsister sans un pouvoir de commandement et une force, et conséquemment sans des lois qui modèrent et contraignent l'appétit de plaisir et les passions sans frein".

Cette nécessité des lois ne peut nous faire regretter un état de nature qui n'a jamais existé et pour cause car si ce fut le cas, il y a bien longtemps que l'espèce humaine aurait disparu, victime de la violence sans frein des autres hommes. C'est exactement ce que met bien en exergue Hobbes (XVII) siècle) dans son ouvrage "Du citoyen": "Hors de la société civile chacun jouit d'une liberté très entière, mais qui est infructueuse, parce que comme elle donne le privilège de faire tout ce que bon nous semble, aussi elle laisse aux autres la puissance de nous faire souffrir tout ce qu'il leur plaît. Mais dans le gouvernement d'un État bien établi, chaque particulier se réserve qu'autant de liberté qu'il lui en faut pour vivre commodément, et en une parfaite tranquillité, comme on n'en ôte aux autres que ce dont ils seraient à craindre."

Hobbes précise alors que la liberté dans l'éventuel état de nature est un leurre et que seul l'état social fait accéder l'homme à une liberté authentique et raisonnable: "Hors de la société civile, chacun a tellement droit sur toutes choses, qu'il ne peut s'en prévaloir et n'a la possession d'aucune; mais dans la république, chacun jouit paisiblement de son droit particulier. Hors de la société civile, ce n'est qu'un continuel brigandage et on est exposé à la violence de tous ceux qui voudront nous ôter les biens et la vie; mais dans l'État, cette puissance n'appartient qu'à lui seul. Hors du commerce des hommes nous n'avons que nos propres forces qui nous servent de protection, mais dans une ville, nous recevons le secours de tous nos concitoyens".

Ainsi, Hobbes, ainsi d'ailleurs que Spinoza, rejoignent la formule célèbre de Weber (XX° siècle) qui proclamera que l'État détient "le monopole de la violence légitime", autrement dit celle qui s'exerce à l'encontre de ceux qui violent les lois et mettent en danger l'ordre social et la sécurité des citoyens. Cependant, il convient de s'interroger sur le caractère peut-être artificiel des lois lorsque celles-ci briment les possibilités de tel ou tel membre de la société qui, entravé par les limites que les lois leur assignent, n'est plus en mesure d'exploiter l'éventail de leurs capacités ou de leurs compétences et des valorisations personnelles que leur apporterait la libre disposition de celles-ci. Tel est le point de vue que soutient Calliclès, ce personnage du "Gorgias" de Platon, créé tout exprès afin d'exposer une ligne de conduite et une conviction que cet auteur réprouve.

Voici ce que déclare Calliclès : "Selon moi, les lois sont faites pour les faibles et le grand nombre. C'est pour eux et dans leur intérêt qu'ils les font et qu'ils distribuent les éloges ou blâmes; et, pour effrayer les plus forts, ceux qui sont capables d'avoir l'avantage sur eux, pour les empêcher de l'obtenir, ils disent qu'il est honteux et injuste d'ambitionner plus que sa part et que c'est en cela que consiste l'injustice, à vouloir posséder plus que les autres; quant à eux .j'imagine qu'ils se contentent d'être sur le pied de l'égalité avec ceux qui valent mieux qu'eux".

Calliclès en conclut que les lois sont injustes par essence, par nature car elles conduisent à une situation paradoxale où les meilleurs sont artificiellement limités dans l'exercice de leurs capacités, ce qui valorise de manière indue une égalité sociale sans fondement et contraire à ce qui se passe dans la nature où ce sont les meilleurs qui font prévaloir leurs forces et qui bénéficient, dirait Darwin, des exigences de la sélection naturelle ;"Voilà pourquoi, dans l'ordre de la loi, on déclare injuste et laide l'ambition d'avoir plus que le commun des hommes, et c'est ce qu'on appelle injustice; Mais je vois que la nature elle-même, proclame qu'il est juste que le meilleur ait plus que le pire et le plus puissant plus que le faible".

Une telle analyse soulève des interrogations légitimes auxquelles il convient de réfléchir et de s'efforcer d'y répondre. Car d'un côté Calliclès fait l'apologie de l'état de nature, état où prévalent la force, l'insécurité et les inégalités les plus criantes. D'un autre côté, il met en évidence une autre forme d'injustice, celle qui serait engendrée par les lois lorsque celles-ci étouffent les qualités des meilleurs.

Remarquons tout d'abord que Calliclès se fait de l'état naturel une idée tout à fait contestable. Au sein de la nature, la lutte pour la vie entre les proies et les prédateurs ne tournent pas systématiquement en faveur des prédateurs, sans quoi aucun écosystème vivant ne pourrait subsister. Un équilibre naturel est assuré entre la force des lionnes en chasse et la rapidité des gazelles que les lionnes ne contournent qu'une fois sur quatre grâce à des stratagèmes souvent infructueux. Cependant Calliclès pourrait rétorquer qu'en tout état de cause c'est la meilleure qualité qui gagne, soit la force de la lionne, soit la rapidité de course de la gazelle et qu'il n'existe aucune loi pour limiter l'une ou l'autre de ces qualités.

Cependant Calliclès oublie que seule l'espèce humaine connaît des luttes fratricides, la guerre intraspécifique notamment et que seuls les hommes se massacrent entre eux, mettant en danger leur propre espèce. Cette seule remarque justifierait la nécessité d'une société régie par des lois et des contraintes évitant cet état de fait.

Dès lors, les véritables enjeux de la loi apparaissent en contrepoint. Le premier enjeu consiste à garantir la sécurité des membres d'une société humaine en les protégeant de l'exercice sans frein de la supériorité des plus forts. La loi introduit au sein des sociétés humaines des valeurs morales inconnues du monde animal. La loi se doit de protéger les plus faibles, y compris par conséquent les handicapés. Certes cela semble au premier abord heurter le principe qui régit la nature, à savoir celui de la sélection naturelle, mais l'homme n'a-t-il pas vocation à s'arracher à l'ordre de la nature, à exercer ses talents créateurs pour fonder une culture ou une civilisation qui se donne pour objectifs de maîtriser ou de se libérer de toutes les contraintes naturelles?

Restent certes les contraintes sociales. En premier lieu, celle dénoncée par Calliclès concernant les limites artificielles affectant les meilleurs. Mais les lois ne peuvent-elles être telles que les meilleurs puissent exercer leurs talents sans pour autant écraser les plus faibles? De plus, est-ce si évident que cela que les lois soient au service des plus faibles? Ne peut-on envisager que ce soit l'inverse? C'est ce que nous nous proposons d'examiner lors de notre prochaine analyse.