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Date de création : 26.02.2011
Dernière mise à jour :
31.01.2025
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Rubrique "Foi et Raison". Suite du billet N°4771.
Extrait de La Foi au défi de la Raison, A.MENDIRI, Amazon.
Prochain billet demain mercredi 27 novembre.
La question du Mal est incontestablement la question philosophique sans doute la plus fondamentale sans compter qu’elle est au cœur de toutes les interrogations religieuses. L’existence du Mal est d’abord un mystère auquel s’est heurté sans succès toute la philosophie occidentale depuis maintenant plus de vingt-cinq siècles et au-delà, toutes les traditions spirituelles, métaphysiques et religieuses de toutes les époques et de tous les continents car aucune d’entre elles ne semble à même d’en expliquer et surtout d’en justifier la réalité douloureuse et absurde en apparence. Le Mal est la source véritable de toutes les formes d’athéisme. Et il faut bien admettre qu’il s’agit là d’une raison difficilement réfutable.
Mais avant toutes choses, il nous faut rappeler ce que nous entendons par le Mal. Comme nous l’avons déjà souligné, il convient d’en distinguer deux formes distinctes. En premier lieu le Mal d’origine naturelle renvoie aux désordres de toutes sortes ainsi qu’à tous les aspects souvent horrifiants de la lutte pour la vie, qui peuvent heurter à juste titre nombre de sensibilités. Ces désordres naturels affectent l’humanité à travers les hasards malheureux de l’hérédité, les maladies, les souffrances physiques, la longue dégradation de nos forces, le terme inéluctable de nos vies enfin. A cela, il faut ajouter le déchaînement des éléments naturels, incendies, inondations, séismes, tsunami, raz de marée, éruptions volcaniques dévastatrices, qui frappent indistinctement les « bons » et les « méchants » et ruinent ou détruisent quantité de vies innocentes.
En second lieu il concerne les péripéties de l’histoire des sociétés humaines où se déploient des injustices innombrables, des discriminations insupportables, des pratiques barbares propres à l’espèce humaine comme la guerre, la torture, le viol, les violences de toute nature, sans oublier les souffrances morales souvent liées à des comportements bafouant la dignité humaine ou accompagnant des deuils douloureux.
Ces rappels ne noircissent pas le tableau mais se contentent de rappeler des faits connus de tous. Dès lors, nombre de consciences humaines s’interrogent sur la pertinence de la proclamation de l’existence d’un Dieu tout-puissant et présenté de surcroît comme infiniment bon. Face aux données que nous venons de rappeler, de telles affirmations, d’après Schopenhauer, apparaissent indécentes et surtout invraisemblables. Selon le bon mot de Woody Allen, si un tel Dieu existe, espérons qu’il dispose d’une bonne excuse.
Pourtant, la réflexion philosophique doit se méfier des apparences, qui ne sont jamais un critère de vérité et surtout ne peut se contenter de confier à l’émotion, au sentiment, le soin de trancher quelque problème que ce soit. La réflexion rationnelle doit reprendre ses droits car elle possède la capacité de recul suffisante par rapport à la force irrationnelle de l’émotion et détient une expertise lorsqu’il s’agit d’aborder des problèmes métaphysiques sensibles et complexes. C’est ainsi qu’à l’affirmation « si Dieu existe, pourquoi le Mal », il est possible d’opposer « si Dieu n’existe pas, alors pourquoi le Bien ».
Car le Bien, concurremment au Mal, existe également et constitue au même titre que le Mal un mystère de l’Etre, ce qui est vraiment au-delà des apparences. Qu’appelons-nous le Bien ? Il s’agit de tous les aspects qui rendent compte de notre attachement viscéral et en même temps raisonné à l’existence : les plaisirs et les satisfactions de toutes sortes, physiques, affectives, morales, intellectuelles, spirituelles ; les beautés naturelles ainsi que celles créées par l’art et qui élèvent notre âme et semblent nous arracher à notre destin mortel ; des sentiments répondant aux attentes les plus profondes des êtres humains comme l’amour, et plus particulièrement l’Amour-Agapè, l’amour gratuit, l’amour qui veut du bien aux êtres autres que le sien propre et qui n’attend aucune contrepartie, plus encore que l’Amour-Eros plus centré sur nos intérêts.
D’ailleurs, la perte sans espoir de retour de ces multiples facettes du Bien rendent compte de la plupart des actes de suicide. Or l’existence de tous ces aspects du Bien ne vont pas de soi, contrairement à ce qu’est tentée de croire la majorité des êtres humains. Ils sont aussi mystérieux que l’existence du Mal. Car, d’un point de vue strictement logique, l’Etre pourrait se déployer sans la présence de ce que nous appelons le Bien. C’est le cas du plaisir en général, de la beauté des formes, de sentiments comme l’Amour enfin. C’est d’ailleurs très exactement ce qui se passe au sein du monde minéral et végétal. Dès lors l’existence de ce que nous appelons le Bien soulève une interrogation métaphysique aussi profonde que celle du Mal.
Cependant, force est de constater que le Mal semble détenir toujours le dernier mot. Il est vrai que notre Univers observable manifeste un ordre remarquable mobilisant une quinzaine de paramètres physiques extraordinairement réglés au plus fin mais il est vrai également que cet ordre n’est pas pérenne et que, selon toute vraisemblance, l’Univers tel que nous le connaissons connaîtra une fin. A vrai dire, tout ce qui fait la valeur de nos vies, tout ce qui explique notre attachement à celle-ci, est appelé à avoir un terme. La mort est notre seule certitude empirique même si, prétend Freud, affectivement nous n’y croyons pas.
Aussi il semble nécessaire de considérer le sens ou le fameux « Logos » des philosophes grecs avec un recul critique plus soupçonneux. Le « Logos » qu’ils proclamaient était d’abord lié à la fascination qu’exerçaient sur eux les mathématiques. Les propositions mathématiques s’avéraient démontrables, entièrement rationnelles et relevaient, semble-t-il d’une vérité éternelle. Bien entendu toutes les facette du Bien évoquées précédemment ne restaient évidemment pas étrangères à la proclamation du sens ou du « Logos ».
Cependant, comme nous l’avons déjà noté, le « Logos » en question restait partiel au regard des individualités humaines. Celles-ci n’étaient jamais que les incarnations provisoires, éphémères, imparfaites, approximatives d’un sens qui les dépassait et qui était de nature transcendante. L’idée d’homme était à certains égards immortelle mais non l’homme singulier. De ce point de vue, les religions et plus particulièrement les religions monothéistes comme le Judaïsme, le Christianisme, l’Islam, en posant l’immortalité de l’homme individuel, allaient jusqu’au bout de l’affirmation du sens, sauvant le singulier, le contingent, l’accidentel aurait dit Aristote, du non-sens.
Car il faut bien reconnaître que les individualités en général et donc les individualités humaines non seulement ne bénéficient en apparence des bienfaits du Bien que de manière éphémère mais surtout de façon très incomplète. Chacun d’entre nous n’héritons que de certains aspects du Bien et parfois avec une grande parcimonie. Il n’en reste pas moins vrai, qu’aussi ténus soient ces apports du Bien, ils justifient la valeur et d’une certaine manière le sens que nous accordons à l’existence.
Pourtant le caractère éphémère et parcimonieux du Bien peut être considéré, sans doute à juste titre, comme un aspect du Mal. Le bilan global et surtout final, puisqu’il est ponctué par l’inévitable terme de nos existences, semble donc pencher au bénéfice du Mal. Mieux, certains penseurs, le cosmologiste Aurélien Barrau notamment, proposent des hypothèses qui ruinent l’un des fondements du sens accordé à l’Univers et à l’ordre étonnant qui préside à son organisation et à son devenir.
C’est ainsi, nous dit Aurélien Barrau que s’il existe un multivers, c’est-à-dire une infinité d’Univers distincts et différents du nôtre, comme semble le prévoir la quasi-totalité des théories physiques contemporaines, alors il n’y a rien d’étonnant à ce que parmi cette infinité d’Univers possibles, de combinaisons matérielles envisageables, surgisse à l’Etre un Univers ordonné comme le nôtre. En apparence, c’est même, intellectuellement, une nécessité. Point besoin dès lors d’affirmer, comme le font d’autres cosmologistes, tel Trinh Xuan Thuan, que les réglages extrêmement précis et fins réglant l’organisation de notre Univers ne puissent pas, raisonnablement, être attribués au seul hasard.
Certes, le multivers est, à l’heure actuelle, une hypothèse purement spéculative. Admettons-en cependant l’augure. Ruine-t-elle pour autant toute idée de finalité et donc, par-là même de sens possible attribuable à l’Univers ? Selon nous, il n’en est rien et voici pourquoi. Notons en premier lieu qu’en avançant l’idée d’une infinité d’Univers, Aurélien Barrau semble épuiser à ses yeux toutes les possibilités d’Univers envisageables. Or, cela revient à supposer l’infini comme une réalité qui ne se dépasse pas, qui est figée dans son actualité présente, ce qui est contradictoire avec l’essence de l’infini conçue comme absence radicale de limite. Cela revient à penser l’infini sur le mode d’une réalité finie, bref à concevoir de manière anthropomorphique l’idée d’infini. A ce titre, l’infini actuel n’épuise pas les possibilités envisageables de combinaisons « matérielles ».
Mais indépendamment de cette remarque, les possibilités envisageables, aussi infinies soient-elles, enferment au moins une possibilité d’un Univers ordonné et réglé de manière très précise. Cet univers existe puisque nous en sommes les témoins et les observateurs. Il était donc possible et ce depuis toute éternité. La substance constitutive du multivers est telle qu’un Univers de ce type peut surgir à l’Etre. Il convient alors de s’interroger sur cette possibilité, source de sens, et sur son fondement, c’est-à-dire sur les justifications ultimes de sa présence à l’Etre.