Abonnement au blog
Recevez les actualités de mon blog gratuitement :

Je comprends qu’en m’abonnant, je choisis explicitement de recevoir la newsletter du blog "cafenetphilosophie" et que je peux facilement et à tout moment me désinscrire.


Articles les plus lus

· 10 LA NOTION D'INSTINCT CHEZ L'HOMME . COURS.
· 9 LE STATUT DE LA CONSCIENCE SELON NIETZSCHE. COURS.
· 13 CROYANCES, RITES ET FÊTES DU JUDAÏSME
· NATURE HUMAINE ET CONDITION HUMAINE.
· 1 LES FONDEMENTS D'UNE DEMOCRATIE

· 10 LA FONCTION DU MYTHE
· 531 L'ART POUR L'ART OU ART ENGAGE?
· 5 LE BOUDDHISME: COMPARAISON AVEC L'HINDOUISME
· 12 MOÏSE, FONDATEUR DU JUDAÏSME
· 1 COURS DE PHILOSOPHIE: LA PHILOSOPHIE SPONTANEE.
· 289. INCONSCIENT PSYCHIQUE ET CONNAISSANCE DE SOI.
· 286. LES MANIFESTATIONS DE L'INCONSCIENT PSYCHIQUE.
· 411 LES SOURCES DE LA CONNAISSANCE HUMAINE.
· 2 COURS DE PHILOSOPHIE: LE ROLE DE LA RAISON.
· 8 LE STATUT DE LA CONSCIENCE SELON KANT ET PASCAL. COURS.

Voir plus 

Rubriques

>> Toutes les rubriques <<
· 29 Cours: La nature de l'homme (15)
· 8 Les grandes religions (24)
· 36 Cours: L'Art. (14)
· 31Cours: L'inconscient. (6)
· 3 L'esprit démocratique (23)
· 2 Cours: Pourquoi la philosophie? (5)
· 7 Le phénomène religieux (16)
· 30 Cours: La morale. (11)
· 45 Extraits de textes philosophiques (15)
· 35 Cours: La politique. (22)

Rechercher
Thèmes

nature pensée cadre soi mode nature société homme monde vie éléments divers

Statistiques

Date de création : 26.02.2011
Dernière mise à jour : 02.03.2025
4897 articles


499 LE POUVOIR ET LES CONDITIONS DE LA LEGITIMITE.

Publié le 22/01/2013 à 09:45 par cafenetphilosophie Tags : pensée cadre soi mode nature société homme monde vie éléments

Cours de philosophie. Suite du billet N° 494.

 

 

Cependant, s’il n’y a pas de droit naturel, chaque société connaît néanmoins un système de valeurs ou parfois des institutions susceptibles de juger de la légitimité du droit positif. C’est le cas dans les sociétés théocratiques, c’est-à-dire les sociétés où une religion officielle est la gardienne des valeurs qui doivent s’imposer à l’ensemble de la société mais également aux législateurs. Nombre de pays musulmans connaissent aujourd’hui un tel système comme l’Iran ou l’Arabie Saoudite où l’idéal législatif renvoie à ce qu’ils appellent la « charia », en référence à la législation instaurée par le prophète Mahomet à Médine. Mais ce fut également le cas dans les pays  communistes où le parti communiste contrôlait la législation en vue de vérifier si elle était en accord avec l’idéal révolutionnaire tel qu’il était conçu par la doctrine marxiste-léniniste. Toutes ces instances de contrôle ont pour mission de faire en sorte que ce qui est légal soit conforme à ce qui est jugé légitime.

 

L’ensemble des analyses qui précèdent nous invite à nous interroger sur la nature de la compétence en matière politique. L’opinion commune a tendance à penser que cette compétence est d’ordre technique. L’idéal consisterait par exemple, dans le cadre de cette manière de concevoir l’organisation politique, qu’un diplomate soit chargé des affaires extérieures, un inspecteur des finances de l’économie, un enseignant de l’éducation et ainsi de suite.

 

Cette conception repose sur le préjugé selon lequel la politique, dans les fins qu’elle assigne à la société et les moyens qu’elle se donne pour y parvenir, repose sur une compétence technique, au même titre qu’en matière de soins il convient de s’adresser à un médecin ou en matière de pédagogie à un enseignant. Il découle de cette conception que les solutions à apporter aux problèmes politiques sont uniques, adéquates ou inadéquates techniquement parlant, témoignant d’une compétence ou d’une incompétence.

 

C’est en ce sens que ceux qu sont convaincus de cela s’esclaffent lorsqu’il constate qu’un même acteur politique peut successivement prendre en charge des départements ministériels très différents et qui plus est étrangers à sa formation professionnelle initiale. Une telle conception est fondée sur une ignorance profonde concernant la nature de l’activité politique et son mode de fonctionnement, quelle que soit par ailleurs la nature du régime en place.

 

En effet, l’acteur politique a pour mission de fixer les fins collectives de la Cité. Il le fait au nom d’une certaine idée du bien public au même titre qu’une personne privée donne des orientations à sa vie personnelle en fonction de l’idée qu’elle se fait de son bien. Chacun comprend aisément qu’un homme politique animé par un idéal révolutionnaire n’aura pas les mêmes priorités en matière de respect des libertés publiques, de redistribution des richesses, de prise en compte de la propriété privée etc. qu’un démocrate classique, soucieux de l’équilibre des pouvoirs, de la recherche du juste milieu entre le souci de la liberté et de l’égalité, acceptant les mécanismes de la liberté économique etc.

 

En d’autres termes, la fixation des fins collectives pour une société ne relève pas d’une compétence technique mais de convictions idéologiques et se rattachent à ce titre à des considérations éthiques. On comprend dès lors que n’importe quel citoyen ait potentiellement compétence à exercer de telles fonctions. Sans quoi, il faudrait postuler, comme le faisait Platon, que la raison est à même de déterminer en quoi consiste le bien collectif, qu’il existe donc une vérité unique en la matière et qu’en conséquence il est souhaitable de confier à des sages le gouvernement de la Cité.

 

Certes, il convient ensuite de déterminer les meilleurs moyens pour parvenir à ces fins. Doit-on dire alors que cette détermination des moyens relève d’une compétence technique ? C’est à la fois vrai et faux. Il est vrai qu’un acteur politique, chargé de la politique économique et n’ayant pas de formation en la matière aura recours à des experts économiques afin qu’ils lui proposent des solutions techniques en fonction des fins qu’il aura souverainement fixées. Mais il est vrai aussi que parmi les solutions proposées il fera des choix tenant compte de considérations morales, idéologiques, électorales et donc il arbitrera en dernier ressort d’un point de vue non pas purement technique mais politique au sens plein du terme, c’est-à-dire à nouveau en fonction de priorités relevant du monde des valeurs et donc de l’éthique.

 

Ajoutons à ces éléments d’analyse que Machiavel nous a opportunément rappelé que la compétence d’un homme politique était davantage d’ordre psychologique que technique. Les gouvernants doivent connaître et tenir compte de la psychologie des gouvernés. N’oublions pas de surcroît que l’activité politique, dans le cadre des régimes qui délèguent la souveraineté, devient un métier et qu’en conséquence les acteurs politiques connaissent les dossiers relatifs aux problèmes soulevés par les sociétés concernées, d’autant plus qu’ils ont tendance, dans le cadre de leur activité politique, tout en conservant une compétence d’ordre général, à se spécialiser dans tel ou tel domaine. Mais quoi qu’il en soit et ce, pour les raisons énoncées ci-dessus, la compétence politique est essentiellement d’ordre éthique et psychologique et non d’abord d’ordre technique.

 

La distinction entre la légalité et la légitimité peut conduire dans certaines situations extrêmes à des actes de désobéissance civile. Nous l’avons rappelé concernant Antigone, le personnage de Sophocle, ou plus près de nous à propos du général de Gaulle. Bien entendu ces actes d’insoumission par rapport à la légalité ne peuvent relever de cette légalité. Par nature, la loi ne saurait prévoir sans contradiction mortelle, la possibilité qu’on lui désobéisse. La désobéissance, l’insoumission, la révolte ne peuvent s’effectuer qu’au nom d’exigences morales ou au nom de valeurs supérieures, c’est-à-dire ne peuvent relever que de la légitimité. D’ailleurs les auteurs de la « Déclaration des droits de l’homme et du citoyen » de 1789 prévoient explicitement dans son préambule « le droit de résistance à l’oppression ». Ce droit relève du droit naturel et non du droit positif. Il est non seulement un droit mais il devient, dans l’esprit de la pensée de Rousseau, un devoir. Car aucun homme, qui veut honorer sa nature profonde, sa qualité d’homme, ne peut accepter d’être privé de sa liberté native, de sa dignité même.

 

Remarquons que chaque philosophie politique prévoit des motifs légitimes de révolte. Pour ne s’arrêter qu’à deux exemples, il va de soi que dans le cadre de la pensée de Hobbes, si les citoyens constatent que l’Etat autoritaire appelé de leurs vœux afin d’assurer la sécurité des personnes et des biens n’assure plus sa mission suite à des dérives arbitraires rétablissant l’insécurité, ces citoyens n’ont plus aucune raison d’obéir à un tel Etat. De même, dans le cadre des conceptions de Marx, la prise de conscience du caractère partial de l’Etat au service de l’exploitation de l’homme par l’homme conduit tout naturellement vers des actions révolutionnaires visant à abolir l’Etat et à transformer radicalement l’ordre social.

 

Néanmoins, ces invitations à la désobéissance civile suscitent parfois des réserves théoriques qui possèdent leur part de légitimité. Pascal (XVII°siècle) notait qu’un acte de révolte demandait beaucoup de réflexion et de prudence préalables. Car même si les motifs de la révolte s’avèrent légitimes, ils conduisent dans un premier temps à un quasi retour à l’état de nature puisque la guerre civile suppose que l’autorité des lois devient inopérante et par là même l’organisation sociale qui en découle. Or, il n’y a sans doute rien de pire que l’état de nature en termes d’arbitraire, d’injustice, de violence, de domination des plus forts. Il convient alors de se demander ce qui vaut le mieux : un ordre injuste mais assurant la paix civile ou l’absence d’ordre et son cortège de déchaînement de violences ?

 

D’autant qu’en dehors du risque de retour transitoire à l’état de nature, deux autres risques se présentent : en premier lieu l’acte de révolte n’assure évidemment pas d’aboutir à un succès ; s’il y a échec, ce dernier s’accompagnera la plupart du temps par des règlements de compte et par une répression accrue, aggravant la situation antérieure. En second lieu, le succès éventuel du mouvement de désobéissance n’offre aucune garantie quant aux qualités du pouvoir qui va alors se mettre en place. Nombre de révolutions conduisent au désenchantement, à la substitution d’un pouvoir arbitraire par un autre pouvoir tout aussi arbitraire même quand ses finalités affichées sont différentes du précédent.

 

C’est en ce sens qu’une révolte est toujours, comme d’ailleurs à l’autre extrême les comportements de non-violence, le fait d’une minorité. Dans les deux cas, cela exige beaucoup de courage et de vertu, voire de sens du sacrifice. C’est également un pari mais un pari risqué. C’est sous cet angle qu’il faut comprendre les réserves de Pascal vis-à-vis des actes de désobéissance civile. Il ne s’agit pas de prôner la résignation mais de rappeler que ce type de choix requiert réflexion et précautions.

A. Mendiri

 

Rappel: cet ouvrage est disponible sur le site des éditions SCRIPTA ainsi que sur les librairies du net (Amazon, Chap. com, Decitre, etc.)

 

     

 

     

 

     

 .