afrique amis annonce article base belle bonne cadre carte centre chez coup
Rubriques
>> Toutes les rubriques <<
· CULTURE (65)
· L'ACTUALITE (62)
· JARDIN (80)
· LA LECTURE (114)
· HUMEUR,HUMOUR ! (47)
· LES SCIENCES (85)
· RELIGION (64)
· HISTOIRE DE LA FAMILLE (47)
· PRIER (70)
· POESIE (62)
ouedraogo,jose ph
Par Anonyme, le 31.08.2024
+229 95 67 77 26 retour d'affection immédiat
l e grand maître spirituel gambada djogbe apporte une aide pré
Par lutter-contre-coro, le 18.08.2024
· MILLARDAIRES
· SAINT JOSEPH ,PERE.PAR LE PAPE.
· lES EMIRATS ARABE UNIS
· FORUM DE DAVOS
· LA VAGUE VERTE
· LA TURQUIE
· ALLOCATIONS FAMILIALES
· ELECTIONS AMERICAINES
· ELECTIONS
· AVEC MACRON ?
· LES PARASITES
· MARITAIN
· 1200MILLARDS DE DOLLAR SUR LES INFRASTRUCTURES
· LAFILIERE
· LE CORAIL
Date de création : 30.11.2013
Dernière mise à jour :
31.01.2025
10705 articles
Quatre mathématiciens ont reçu mardi 5 juillet à Helsinki la médaille Fields, dont le Français Hugo Duminil-Copin et l’Ukrainienne Maryna Viazovska, la deuxième femme à recevoir cette prestigieuse distinction depuis la création du prix en 1936. La médaille, remise par l’Union mathématique internationale, célèbre les « découvertes exceptionnelles » de chercheurs de moins de 40 ans.
Les deux autres lauréats de cette récompense délivrée tous les quatre ans, considérée comme l’équivalent d’un « Nobel de mathématiques », sont le chercheur américano-sud-coréen June Huh et le chercheur britannique James Maynard.
L’annonce a été faite lors d’une cérémonie à Helsinki dans le cadre du Congrès international des mathématiciens. Celle-ci aurait initialement dû se dérouler à Saint-Pétersbourg, mais la cérémonie a été relocalisée à Helsinki en raison de Monde/crise-ukrainienne" target="_self">la guerre en Ukraine.
Physique statistique et problème du marchand d’orangeLe Français Hugo Duminil-Copin, 36 ans, consacre ses travaux à la branche mathématique de la physique statistique. Nommé professeur à l’âge de 29 ans, le mathématicien probabiliste partage son temps entre l’Institut des hautes études scientifiques, près de Paris, et l’Université de Genève. Il a été récompensé pour avoir résolu plusieurs « problèmes de longue date dans la théorie probabiliste des transitions de phase », ce qui a permis d’ouvrir « plusieurs nouvelles directions de recherche », selon le jury.
Deuxième femme à gagner le prix en quatre-vingts ans d’histoire, Maryna Viazovska est née il y a trente-sept ans en Ukraine, à l’époque en Union soviétique. Elle est, depuis 2017, professeure à l’École polytechnique fédérale de Lausanne, en Suisse. La mathématicienne a reçu la récompense pour avoir résolu une version d’un problème géométrique vieux de plusieurs siècles, en démontrant l’empilement le plus dense de sphères identiques au-delà de l’espace en trois dimensions. En l’occurrence, l’étonnante dimension 8, où la symétrie est optimale.
Le « problème d’empilement compact », plus communément appelé « problème du marchand d’oranges », taraude les mathématiciens depuis le XVIe siècle, lorsque s’est posée la question de l’empilement le plus dense possible des boulets de canon.
Âgé de 35 ans, le Britannique James Maynard est professeur à l’Université d’Oxford, au Royaume-Uni. Il reçoit la médaille « pour(ses) contributions à la théorie analytique des nombres, qui ont mené à des avancées majeures dans la compréhension de la structure des nombres premiers et dans l’approximation diophantienne ».
Professeur à l’Université de Princeton aux États-Unis, June Huh, 39 ans, a lui été sélectionné pour avoir « transformé » le domaine de la géométrie combinatoire, « en utilisant des méthodes de la théorie de Hodge, la géométrie tropicale et la théorie des singularités ».
L’homme se faufile derrière notre interlocuteur, casque de chantier sur la tête et baudrier autour des hanches. Preuve discrète qu’en ce mercredi de juin, il reste quelques boulons à serrer sur Atlas, l’un des quatre instruments qui équipent le LHC. Derrière cet acronyme se cache l’accélérateur de particules du centre européen pour la recherche nucléaire (Cern), le plus grand du monde.
Dans ce cercle de 27 kilomètres, enterré à une centaine de mètres sous la frontière entre la France et la Suisse, on fait se percuter des protons lancés à très grande vitesse. Objectif ? Mettre à nu la structure physique du monde. Après trois ans de travaux, le LHC doit reprendre du service ce début de semaine. Dix ans pile après l’annonce d’une découverte fondamentale : celle du boson de Higgs, le 4 juillet 2012.
L’excroissance d’une courbe et l’euphorie d’une vie« Les gens campaient devant la porte de l’auditorium depuis la veille au soir »,se souvient Rosy Nikolaidou, physicienne à l’Institut de recherche sur les lois fondamentales de l’Univers (Irfu-CEA) et membre de la collaboration Atlas, l’un des deux instruments à avoir mis en évidence le boson.
« Dix-sept ans que je le cherchais ! Vous imaginez bien l’euphorie », sourit de son côté la physicienne Chiara Mariotti qui, elle, travaille sur CMS, l’autre outil à avoir détecté le fameux boson. À l’époque, la crainte du « trop beau pour être vrai » ne la quittait pas, car « quand on cherche avec un marteau, tout ressemble à un clou ». La détection conjointe par CMS et Atlas, très différents dans leur conception, est venue apporter de la robustesse aux résultats.
Cet été-là, deux heures durant, graphiques et lettres grecques se succédèrent dans des équations incompréhensibles pour le commun des mortels. Soudain, une minuscule excroissance de points noirs sur une courbe et les applaudissements tonitruants du public. Voilà la preuve de l’existence du très fugace boson de Higgs.
« C’est assez peu impressionnant quand on regarde seulement ces quelques points », rigole aujourd’hui Marumi Kado, porte-parole adjoint d’Atlas. Pourtant, la nouvelle a fait le tour du monde et s’est affichée en ouverture des journaux télévisés. Car le boson de Higgs est responsable de rien de moins que l’existence de la matière dans l’Univers. « C’est lui qui donne la masse aux particules de l’Univers », précise Yves Sirois, physicien impliqué dans l’expérience CMS.
Les poupées russes de la matièreReprenons. La matière est composée d’atomes. En ouvrant ces atomes, on trouve d’autres particules emboîtées, puis encore d’autres, comme des poupées russes, jusqu’à atteindre des particules dites « élémentaires », indivisibles et les plus petites connues. À ces particules élémentaires de matière, la physique ajoute des bosons vecteurs, particules qui sont responsables des interactions au sein de la matière. C’est un peu comme un livre : le livre serait l’atome, les particules élémentaires formeraient les pages, et la reliure symboliserait les bosons vecteurs.
Seulement voilà, les pages du livre ne pèsent rien ou presque. Pourtant, le livre, lui, est un vrai pavé. Quelque chose doit donc lui donner sa masse : la reliure. Problème ! La théorie prédit que les bosons vecteurs – la reliure – ont une masse nulle, ce qui n’est pas ce que l’on constate pour tous en pratique. D’où le besoin de trouver d’où vient cette masse.
Trouver puis caractériser le boson de HiggsEn 1964, trois équipes indépendantes planchent sur la question. D’un côté, les Belges François Englert et Robert Brout, de l’autre les Anglo-Saxons Tom Kibble, Gerald Guralnik et Carl Hagen, et enfin, tout seul, le Britannique Peter Higgs. C’est son nom qui sera finalement attribué au mécanisme, le champ de Higgs.
La solution se résume facilement : les particules interagissent avec le champ de Higgs et acquièrent ainsi leur masse. « Le champ de Higgs existe partout et tout le temps dans l’Univers », intervient Yves Sirois. Le rapport entre ce champ et le boson du même nom ? Le dernier est la manifestation tangible du premier. Un peu comme l’envol d’une plume signale le vent. Détecter le boson de Higgs revient donc à valider l’existence du champ, et à confirmer qu’il donne de la masse là où il en faut.
La réalité colle alors à la théorie, l’Univers est équilibré, et tout va mieux. Reste à le prouver. « Quand nous avons démarré les expériences au LHC en 2009, nous ne savions pas si ce boson et ce champ existaient vraiment, se rappelle le physicien. Et c’est quand même gênant de penser aux vacances d’été quand l’existence de l’Univers paraît hautement improbable !» Les scientifiques accumulent les données pendant deux ans, sans même les analyser. « Nous ne voulions pas nous affoler ou avoir de faux espoirs en les regardant au fur et à mesure », se remémore un responsable de l’instrument CMS.
Depuis, et après avoir trouvé la particule la plus recherchée de la physique, le LHC a repris le boulot pour dresser sa carte d’identité complète. « Sa masse, son temps de vie, son spin, sa parité, ses produits de désintégration... », Chiara Mariotti liste les différentes caractéristiques sur le bout des doigts. « Un nouveau domaine de la physique s’est ouvert : la physique de Higgs », sourit Marumi Kado.
« Décrire le vide dans lequel on vit »Une pression sur un bouton, et le mur derrière Marumi Kado, que l’on pensait en placoplâtre, devient transparent. L’équipe de l’instrument Atlas se dévoile derrière la vitre, dans la salle de contrôle. Les ingénieurs sont en train de peaufiner les derniers réglages avant la reprise des collisions. « Nous avons une précision de l’ordre de 100 microns sur un instrument qui fait 44 mètres de long »,se félicite Marumi Kado. Du nouveau matériel a été installé, mais aussi de nouveaux logiciels, car le volume de données produit – et donc à stocker et analyser – dépasse l’entendement.
À compter de 2026, l’accélérateur de particules qui alimente ces instruments, le LHC, deviendra « haute luminosité » et s’appellera le « HL-LHC ». Les chercheurs espèrent notamment voir l’interaction entre deux bosons de Higgs… et quelques nouveautés. « Attention, ne pas trouver certaines choses, c’est aussi une information, philosophe Chiara Mariotti. Nous éliminons des théories pour mieux cerner le monde. »« Mais les théoriciens ne sont pas à court d’idées à nous faire tester !, rigole Rosy Nikolaidou. La matière ne représente que 5 % de l’Univers. Il reste donc 95 % d’inconnu, et beaucoup de questions sur le vide dans lequel on vit. »
---------------
Un projet de plusieurs décenniesSeptembre 1954. Création du Cern, l’organisation européenne pour la recherche nucléaire.
Mars 1984. Une première réunion d’experts détermine les grandes lignes du LHC, le plus grand des accélérateurs de particules au monde. La construction démarre en 1998.
Mars 2010. Les toutes premières collisions de particules ont lieu dans le LHC.
Juillet 2012. Le Cern annonce la détection du boson de Higgs, clé de voûte du modèle standard de la physique.
Juillet 2022. Le LHC redémarre ses activités scientifiques après trois ans de travaux.
2026. Le LHC arrêtera à nouveau ses opérations pour des travaux d’amélioration.
La Science, l’épreuve de Dieu ?
de François Euvé
Salvator, 186 p., 18 €
Sans le dire explicitement, ce petit livre répond à Michel-Yves Bolloré et Olivier Bonnassies qui, avec leur récent ouvrage Dieu, la science, les preuves(Guy Trédaniel, 2021, 577 p., 24 €), ont semé le trouble pour certains, de faux espoirs pour d’autres. Les auteurs en question cherchent à apporter « des preuves de l’existence de Dieu, modernes, claires, rationnelles, multidisciplinaires, confrontables objectivement à l’univers réel ». Un sujet qui passionne, les quelque 100 000 exemplaires écoulés à grand renfort de marketing en sont… la preuve.
Ce à quoi François Euvé, jésuite et physicien, rétorque que « c’est plus complexe qu’il n’y paraît ».Loin d’être affirmatif – d’ailleurs le titre de son essai est ponctué d’un point d’interrogation –, l’auteur qui est aussi rédacteur en chef de la revue Études, pose les questions autour de « l’existence de Dieu », avant de décrypter « les théories(scientifiques) nouvelles ». Il se demande alors si « Science et foi peuvent dialoguer ». Avec une conviction : « Je ne crois pas que le mélange des genres soit profitable aux deux partis. Que la science soulève plus de questions fondamentales qu’on ne pouvait le penser il y a un siècle est une chose, qu’elle démontre l’existence de Dieu ou la pertinence de la religion en est une autre », affirme-t-il en préambule.
Pas de preuves, mais des signesReprenant l’évolution chronologique de la réflexion sur l’existence de Dieu, François Euvé rappelle que « s’il n’existe pas – et ne peut exister par principe – de “preuves” formelles et définitives de l’existence de Dieu, on peut néanmoins en trouver des signes ». Une réflexion qui passe évidemment par Thomas d’Aquin, pour qui « il y a donc un être intelligent par lequel toutes choses naturelles sont ordonnées à leur fin, et cet être, c’est lui que nous appelons Dieu ».
Parallèlement aux avancées théologiques, la science se déploie progressivement, butant sur les mêmes énigmes. Ainsi, à son tour, Voltaire l’affirmera poétiquement : « L’univers m’embarrasse et je ne puis songer que cette horloge existe et n’ait pas d’horloger. » L’auteur évoque ensuite les théories successives et complexes des progrès scientifiques qui butent principalement sur deux questions : l’origine du monde et l’intervention « miraculeuse » de Dieu dans le cours des choses humaines. Or, « on ne peut pas voir le commencement de l’univers, simplement l’extrapoler à partir de ce que nous connaissons. Plus on s’en approche, plus il devient difficile d’accès ». Et l’auteur jésuite d’en référer à une figure tutélaire : « La rigueur intellectuelle d’Albert Einstein ne l’empêchait pas de se sentir troublé par le mystère du monde. »
Deux dimensions à faire dialoguerL’important réside sans doute dans ce dialogue de deux dimensions portant leur regard sur le monde tel qu’il est : « L’émergence d’une science autonome ne met pas en péril la confession d’un Dieu créateur,poursuit François Euvé. Chaque domaine a son espace de validité, qu’il convient de ne pas transgresser. Mais, à l’inverse, il serait dommage de ne pas tirer profit d’une pluralité des approches du monde, scientifique, philosophique, théologique, poétique. »
Un texte alerte, qui s’achève avec un entretien entre l’auteur et physicien Étienne Klein, ce dernier insistant encore : « Prétendre prouver scientifiquement l’existence de Dieu serait également faire preuve de naïveté à l’égard de la science elle-même. (…) Cela impliquerait qu’elle aurait complètement terminé sa propre construction au point de pouvoir trancher toutes les questions qui se posent à nous, y compris celles qui ne sont pas scientifiques. »
L’Univers recèle bien des mystères. Mais depuis mi-mai, c’est un mystère informatique et non stellaire que la Nasacherche à comprendre. La sonde Voyager 1, envoyée en 1977, a un problème d’attitude. Une crise de la quarantaine pour le plus vieil appareil spatial encore en fonctionnement ?
Les données de télémétrie, qui parviennent à l’agence spatiale américaine après plus de vingt heures et 23 milliards de kilomètres de voyage, sont faussées. Le problème vient du système dit « AACS ». « Ce système contrôle l’attitude, c’est-à-dire la façon dont la sonde est orientée dans l’espace, décrit Rosine Lallement, astrophysicienne à l’observatoire de Paris. Il assure notamment que l’antenne de communication reste bien pointée vers la Terre. » Or, les données d’attitude qui parviennent désormais à la Terre forment un charabia.
→ RELIRE. Monde/Voyager-1-a-officiellement-quitte-le-systeme-solaire-2013-09-14-1015786" target="_self">Voyager 1 a officiellement quitté le système solaire
« C’est un message complètement aléatoire et qui ne fait aucun sens, raconte Michel Blanc, astrophysicien à l’Irap (Institut de recherche en astrophysique et planétologie). Ce n’est même pas comme si les données indiquaient une mauvaise orientation, elles sont complètement incompréhensibles. » Pourtant, le système fonctionne et l’antenne est manifestement bien orientée puisque la Nasa parvient à échanger sans souci avec l’appareil. « Si le système était défectueux, nous aurions perdu la liaison », rappelle le chercheur.
Un milieu interstellaire qui aurait détraqué l’appareilLa sonde n’est pas non plus entrée en mode dégradé et les données scientifiques, également transmises via l’antenne, correspondent bien à ce qui est attendu et prédit par la théorie. Alors d’où vient le problème ? « Quelque chose dans l’électronique ou dans le logiciel a dû prendre un coup, avance Rosine Lallement. Peut-être qu’il s’agit d’une réaction à des collisions avec des particules de hautes énergies ? »
Depuis août 2012, Voyager 1est en effet entrée dans le milieu interstellaire, la région entre les étoiles, plus loin que tous les objets humains envoyés dans l’espace. La sonde a quitté l’héliosphère, la zone d’influence du Soleil. « Jamais aucune mission n’a duré aussi longtemps et jamais aucune sonde n’a voyagé dans ce milieu. Cela nous confronte forcément à beaucoup de nouveautés et beaucoup d’inconnues », philosophe la spécialiste de l’héliosphère.
L’appareil jumeau, la sonde Voyager 2, a franchi la barrière du cocon solaire, l’héliopause, en 2018. Et ne semble pas connaître de problème pour l’instant. Peut-être est-ce simplement parce que son séjour interstellaire dure depuis moins longtemps et que l’appareil a subi moins d’attaques des particules. Ou peut-être que la partie de l’Univers où Voyager 2 avance se comporte différemment de celle de Voyager 1, les deux sondes n’étant pas parties dans la même direction.
Un correctif possible si le « bug » vient du logicielPour y voir plus clair, la Nasa a lancé un diagnostic des logiciels et du matériel de Voyager 1. Si le défaut est logiciel, il sera possible d’envoyer un correctif. « Les logiciels de bord sont régulièrement améliorés, par exemple pour le format et la compression des données », commente Michel Blanc. Si le problème est matériel, il faudra par contre espérer qu’il existe une redondance. En 2017, la Nasa avait ainsi eu recours à des propulseurs secondaires pour remplacer les moteurs principaux. « Il est aussi possible que l’équipe ne trouve jamais la source du problème et s’adapte simplement », a confié Suzanne Dodd, en charge du programme Voyager à l’agence américaine.
De toute façon, la sonde ne devrait fonctionner que quelques années encore. Les experts estiment qu’elle ne produira plus suffisamment d’énergie pour continuer à émettre autour de 2025. Trois piles nucléaires au plutonium, des RTG (générateurs thermoélectriques à radioisotope), assurent son alimentation. Avec le temps, elles fournissent moins de 250 watts, l’équivalent de quelques ampoules. Et bien longtemps après avoir perdu contact avec sa planète de départ, dans quelque trente-huit mille ans, Voyager 1passera « à proximité » d’une étoile dans la constellation de la Petite Ourse. Loin, très loin de l’humanité, qui l’avait minutieusement assemblée.
Les attentes sont fortes. Plus d’une centaine de participants de 40 pays différents se réunissent, mardi 15 et mercredi 16 février, à l’initiative du comité d’éthique de l’Inserm, pour deux jours consacrés aux « volontaires sains » dans la recherche médicale. Biologistes, soignants, pharmaciens et éthiciens auront pour objectif de définir des lignes de conduite et des recommandations sur le sujet, revenu dans l’actualité avec l’épidémie de Covid-19.
→ EXPLICATION. Contre le Covid-19, un vaccin en spray nasal mais pas avant fin 2023
Pour tester les vaccins contre le coronavirus, il a fallu recruter des centaines de milliers de volontaires non contaminés. Une démarche qui tranche avec les essais cliniques de la plupart des médicaments, réalisés sur les malades concernés. Plusieurs voix se sont aussi fait entendre dans le monde anglo-saxon en faveur d’un procédé discutable : le challenge infectieux.
Au lieu d’attendre que les personnes vaccinées rentrent d’elles-mêmes en contact avec le virus pour voir si le vaccin est efficace, on les infecte directement, avec leur consentement et à condition qu’elles soient en bonne santé, pour limiter les risques. « Exposer sciemment les volontaires à l’agent infectieux pose un problème éthique », reconnaît sans peine François Eisinger, membre du comité d’éthique de l’Inserm et du Haut Conseil de santé publique.
→ ANALYSE. La bioéthique, essentielle mais pas universelle
Pourquoi l’envisager alors ? Pour certaines maladies peu transmissibles, c’est le seul moyen d’être sûr de l’efficacité d’un vaccin ou d’un traitement préventif. Cela permet aussi d’aller plus vite. « En général, ne pas attendre une éventuelle infection permet de gagner plusieurs mois sur le développement d’un traitement », avance Hervé Chneiweiss, coorganisateur du colloque et ancien président du Comité international de bioéthique de l’Unesco. Des mois gagnés, c’est autant de vies épargnées. Sauf que dans le cas du Covid-19, la maladie circulait déjà largement, et l’exposition naturelle des participants aux essais cliniques était bien suffisante. L’hypothèse n’a donc pas été retenue.
Pas de quoi freiner le Royaume-Uni ; le pays a tout de même lancé un challenge infectieux en octobre 2020, avec 36 volontaires âgés de 18 à 29 ans, en parfaite santé. Ces participants étaient suivis en continu à l’hôpital, et le protocole prévoyait l’injection d’anticorps monoclonaux Regeneron dès la survenue de symptômes graves.
Les résultats, disponibles en prépublication depuis le 1er février, montrent qu’heureusement aucun des volontaires n’a été gravement atteint. Une majorité a développé des symptômes légers à modérés après l’inoculation du virus. Il ne s’agissait pas là de tester l’efficacité des traitements, mais de mieux connaître la maladie : quelle quantité de virus faut-il pour une infection, au bout de combien de temps les symptômes apparaissent, combien de temps est-on contagieux, etc.
Reste que l’intérêt des résultats britanniques est plus que limité : la souche virale utilisée était l’une des premières, proche de celle de Wuhan, alors que le coronavirus a connu moult variants depuis. Et les volontaires, étant jeunes et en bonne santé, ne représentent pas la majorité des victimes du Covid-19. « Chercher uniquement à acquérir plus de connaissances ne justifie pas un challenge infectieux », estime François Eisinger. Cette position, largement partagée en France, marque un fossé avec les Anglo-Saxons, plus enclins à ces procédures.
Bien que la pratique ne soit pas interdite dans l’Hexagone, l’idée d’un challenge infectieux pour le Covid-19 a été unanimement rejetée par les spécialistes français. « La question doit être considérée au cas par cas. Est-ce que le jeu en vaut la chandelle ? », résume Hervé Chneiweiss, qui rappelle aussi que le procédé est plus acceptable lorsqu’un traitement existe en cas de problème.
En temps normal, ces démarches servent à tester des génériques ou des traitements alternatifs pour des maladies contre lesquelles il existe déjà des solutions. « Les challenges ont du sens s’ils permettent d’avoir un accès élargi ou plus rapide aux médicaments, confirme François Eisinger. Dans le cas du Covid-19, la grande disparité vaccinale entre les populations n’est pas une question de science, et les challenges infectieux n’y auraient rien changé. »
-------------------
À la fin du XIXe siècle, le Britannique Almroth Wright, pour tester son vaccin, inocule la fièvre typhoïde à une poignée d’hommes préalablement vaccinés. L’université du Maryland mène des travaux similaires entre 1950 et 1975. Aujourd’hui, de tels challenges infectieux ont encore lieu au Royaume-Uni.
Depuis les années 1960, plusieurs centres américains ont infecté, en tout, plus d’un millier de volontaires avec les parasites responsables du paludisme, pour évaluer l’efficacité de différents traitements.
Dans les années 1980,des vaccins contre le choléra sont testés en contaminant des cobayes. Ces travaux ont lieu dans les pays pauvres où sévit le choléra et beaucoup d’interrogations éthiques entourent le choix des volontaires.
L’un s’est exilé de l’autre côté de la Lune, et tourne le dos au Soleil pour observer le glacial Univers lointain. L’autre s’aventure, au contraire, dans un périple à des centaines de millions de kilomètres, pour étudier au plus près la couronne solaire. Le télescope spatial James Webb et l’observatoire solaire spatial Parker ont des directions et des missions scientifiques opposées. Pourtant, tous deux ont livré des images marquantes ces derniers jours. Pas tant pour leur beauté, mais pour leur histoire.
La sonde Parker a dévoilé des clichés en noir et blanc de la surface de Vénus. La deuxième planète en partant du Soleil est recouverte en permanence par d’épais nuages qui lui donnent l’aspect d’une boule blanchâtre et opaque. À l’occasion de deux survols, en juillet 2020 et février 2021, l’observatoire solaire a tourné son imageur vers cette épaisse et toxique atmosphère.
Et à la grande surprise des astronomes, les clichés ont dévoilé les masses continentales sous les nuages, que l’on ne connaissait jusque-là que par radar. Les zones gris foncé correspondent aux hauts plateaux, tandis que les parties blanches brillantes indiquent les régions basses. Ces régions luisent telles des charbons ardents en raison des très hautes températures qui y règnent, au-dessus de 500 °C.
→ RELIRE. France/Venus-mysterieux-gaz-lemballement-vie-extraterrestre-2020-09-15-1201114119" target="_self">Vénus : le mystérieux gaz et l’emballement pour une vie extraterrestre
Deux missions américaines ainsi qu’une mission européenne doivent décoller pour Vénus au tournant des années 2030. La planète, actuellement impropre à la vie, aurait pu ressembler à la Terre dans un lointain passé. Avant qu’un effet de serre incontrôlable ne s’emballe et transforme Vénus en destination la plus chaude du système solaire.
De l’autre côté de la Terre, France/Lancement-telescope-James-Webb-comment-derouler-sejour-lespace-2021-12-26-1201191913" target="_self">le télescope spatial James Webb a lui capturé d’autres points très brillants. Dix-huit très exactement, un pour chacun des segments qui composent son miroir en béryllium, qui collecte la lumière. Tous représentent en réalité le même objet, l’étoile HD 84406, dans la constellation de la Grande Ourse.
Sur cette première photo prise par le télescope James Webb, les 18 points différents correspondent en réalité à une même étoile de la constellation de la Grande Ourse. / NASA
Une erreur ? Non, bien au contraire. Pour les astronomes, c’est avant tout la preuve que James Webb voit, ce qui est déjà une excellente nouvelle pour le télescope lancé fin décembre avec une bonne décennie de retard. Ce premier cliché – ou plutôt les 1 560 premiers clichés réunis ici en un seul – va servir à calibrer et aligner les segments. L’objectif étant de n’avoir plus qu’un seul et unique point, à la précision inégalée.
→ GRAND FORMAT. Télescope James Webb : à la recherche des origines de l’univers
Après son arrivée à destination fin janvier, à 1,5 million de kilomètres de la Terre, les scientifiques ont commencé à préparer le télescope spatial pour les observations des confins de l’Univers, qui devraient débuter à l’été 2022. L’un des objectifs de la mission est de mieux connaître la naissance des étoiles et des galaxies.
La recherche sur les prions va-t-elle pouvoir reprendre ? L’étude de ces protéines pathogènes est à l’arrêt en France depuis juillet 2021, après la découverte d’un cas de la maladie de Creutzfeldt-Jakob touchant Pierrette C., une ancienne employée de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), et le décès d’Émilie Jaumain, une autre technicienne ayant travaillé sur les prions à l’Inrae.
→ ENQUÊTE. Recherche sur les prions, la sécurité des laboratoires français mise en cause
Une mission d’inspection interministérielle avait alors été mandatée pour faire la lumière sur cette deuxième contamination, et tracer une piste vers l’amélioration des conditions de sécurité dans les laboratoires concernés. Publié mercredi 26 janvier, le rapport d’inspection a permis d’identifier deux accidents du travail « par coupure », impliquant du matériel contaminé, dont un survenu en 2005 ayant pu provoquer le déclenchement de la maladie de Creutzfeldt-Jakob chez Pierrette C., finalement décédée le 4 novembre dernier à l’âge de 67 ans.
Si les conditions de sécurité au travail ont fortement évolué au fil des années, le rapport note que cette personne a effectué l’intégralité de sa carrière sans gants anticoupure, fournis à partir de 2020 après le décès d’Émilie Jaumain. De nombreux témoignages recueillis par les inspecteurs indiquent également l’existence dans cette unité de recherche d’une forte pression et d’une culture « où la nécessité du gain de savoir a pu prendre le pas sur d’autres contingences ».
En complément d’un guide des bonnes pratiques établi par les différents instituts de recherche travaillant sur les prions et visant à actualiser et harmoniser les procédures de sécurité, la mission d’inspection a émis plusieurs recommandations afin de permettre une sortie progressive du moratoire. Elles prévoient notamment le renforcement de la traçabilité des expositions des personnels, la mise en place d’un suivi médical adapté et l’amélioration de la formation et de l’information des agents.
Le rapport insiste également sur le besoin de garantir l’indépendance des responsables de sécurité des laboratoires vis-à-vis de leur direction afin d’éviter toute interférence. À court et moyen termes, la mission souligne la nécessité d’animer un « comité prions » pour réfléchir aux questions de sécurité à l’échelle nationale, et d’envisager l’extension de ces nouvelles mesures de sécurité aux recherches concernant les « prion-like », comme la maladie de Parkinson ou d’Alzheimer, dont le mode de déclenchement est comparable.
« Nous considérons que les préconisations faites par ce rapport sont enfin une réelle prise de conscience par les pouvoirs publics du danger subi par les agents travaillant sur le prion et qu’elles vont dans le bon sens », réagit Me Julien Bensimhon, avocat de la famille d’Émilie Jaumain, qui indique demeurer vigilant quant à leur mise en œuvre.
Presque un mois après son lancement, le télescope spatial James-Webb a atteint son orbite finale, à 1,5 million de kilomètres de la Terre, depuis laquelle il pourra notamment permettre d’observer les premières galaxies de l’Univers, a confirmé la NASA lundi 24 janvier.
Il a activé ses propulseurs à environ 20 heures afin d’atteindre le point de Lagrange 2 ou « L2 », idéal pour observer le cosmos. « Bienvenue à la maison, Webb !, s’est exclamé le patron de l’agence spatiale américaine, Bill Nelson, dans un communiqué. Nous avons fait un pas de plus vers la mise au jour des mystères de l’Univers. Et j’ai hâte de voir les premières nouvelles images de l’Univers par Webb cet été ! »
A cette orbite minutieusement choisie, la Terre, le Soleil et la Lune se trouveront tous de l’autre côté de son pare-soleil, ce qui lui assurera d’opérer dans l’obscurité et dans un très grand froid, indispensables à l’étude des premiers rayonnements cosmiques par ses capteurs infrarouges.
Lire aussiL’œil du télescope spatial James-Webb s’est ouvertC’est la troisième fois que le télescope actionne ainsi ses propulseurs depuis son lancement à bord d’une fusée Ariane 5, le 25 décembre.
Une mission de vingt ansLa grande impulsion fournie par la fusée avait en effet été sciemment minimisée pour éviter que l’instrument dépasse son objectif, sans véritable espoir de retour, et il devait encore, par petites poussées successives, s’y placer de lui-même.
La durée de la mission pourrait être de vingt ans, selon Keith Parrish, l’un des responsables du projet. Une possibilité, qui n’est pas envisagée pour le moment, serait qu’une mission future aille dans l’espace pour alimenter le télescope en carburant.
Le télescope James-Webb, dont le coût pour la NASA est estimé à 10 milliards de dollars, est l’un des équipements scientifiques les plus chers jamais construits, comparable à son prédécesseur Hubble ou à l’immense accélérateur de particules de l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN).
Mais, tandis qu’Hubble était placé en orbite autour de la Terre, Webb gravitera dans la zone de l’espace baptisée point de Lagrange 2, où les forces d’attraction de la Terre et du Soleil sont contrebalancées par la force centrifuge du télescope, permettant une trajectoire stable avec une moindre utilisation de carburant.
Lire aussiLe télescope James-Webb, un titan pour révolutionner l’astronomie En contact permanent avec la Terre " alt="Dans les locaux de la NASA, le 8 janvier." width="664" height="443" data-srcset="https://img.lemde.fr/2022/01/24/0/0/4500/3543/1328/0/45/0/a82b25a_5395961-01-06.jpg 1328w, https://img.lemde.fr/2022/01/24/0/0/4500/3543/664/0/75/0/a82b25a_5395961-01-06.jpg 664w" data-sizes="(min-width: 768px) 664px, 100vw" data-reader-unique-id="31" /> Dans les locaux de la NASA, le 8 janvier. BILL INGALLS / AFPLe nouveau télescope ne sera pas exactement au point L2, mais oscillera autour de lui en « halo » à une distance similaire à celle de la Terre et de la Lune, selon un cycle de six mois.
D’autres missions spatiales ont auparavant été placées sur L2, comme le télescope spatial infrarouge Herschel développé par l’Agence spatiale européenne ou un satellite de la NASA qui avait déjà pour objectif d’étudier le big bang.
Le positionnement de James-Webb lui permettra également de rester en contact permanent avec la Terre par le Deep Space Network, un réseau de trois grandes antennes en Australie, en Espagne et en Californie.
La NASA avait réussi au début de janvier à déployer l’immense miroir du télescope qui lui permettra de recevoir des rayonnements émis par les premières étoiles et galaxies, formées il y a plus de 13,4 milliards d’années, moins de 400 millions d’années après le big bang.
Avec l’expansion de l’Univers, cette lumière parcourt toujours plus de chemin pour atteindre l’observateur, et ce faisant elle « rougit ». Comme le bruit d’un objet qui s’éloigne s’assourdit, l’onde lumineuse s’étire et passe de la fréquence visible à l’œil nu à celle de l’infrarouge.
Explorer les exoplanètesOr, Webb, contrairement à Hubble, est équipé pour percevoir ces signaux infrarouges, ce qui lui permettra de voir non seulement des objets plus anciens, mais aussi les nuages de poussière interstellaire qui absorbent la lumière des étoiles et les cachent au regard d’Hubble.
Il doit également faire un grand pas dans l’exploration des exoplanètes, en orbite autour d’autres étoiles que le Soleil. Il examinera leur atmosphère, en quête de conditions propices à l’apparition de la vie.
Prochaine étape : ses instruments scientifiques doivent encore refroidir avant d’être très précisément calibrés. Ses premières images devraient être transmises en juin ou juillet.
Lire aussiLe télescope spatial James Webb, une aventure de trois décenniesLe Monde avec AFP
À l’apparition des premiers symptômes, en mars, Alain C. a d’abord cru que son épouse Pierrette éprouvait une grande fatigue. Peut-être était-ce le déménagement dans leur maison de la banlieue de Toulouse qui avait épuisé cette jeune retraitée d’un laboratoire de recherche de l’École nationale vétérinaire de Toulouse (ENVT).
Les analyses demandées par le médecin de famille n’indiquent rien d’anormal. « Une dépression, peut-être. » Mais à la fatigue s’ajoutent bientôt des comportements incohérents. Début avril, Pierrette, 67 ans,dresse le couvert pour six personnes au lieu de deux. Quelques jours plus tard, Alain l’entend dire que ses parents sont attendus pour le déjeuner. Ils sont pourtant décédés depuis vingt ans. Serait-ce Alzheimer?
→ À LIRE. Alzheimer : « l’espoir immense » d’un nouveau remède
De nouveaux examens sont réalisés. Le scanner reste muet, mais des taches inquiétantes apparaissent à l’IRM. La maladie de Creutzfeldt-Jakob est évoquée. Des tests complémentaires à l’hôpital Purpan de Toulouse confirment bientôt le diagnostic. Alain n’ose y croire, mais Pierrette sait bien qu’il n’existe aucun remède à cette dégénérescence du système nerveux : « Tu me porteras des fleurs, lui dit-elle. Je suis foutue. » Son état ne cessera alors d’empirer, jusqu’à son décès le 4 novembre.
Rendue publique dès juillet, la maladie de Pierrette C. a provoqué une vive inquiétude dans le milieu de la recherche, et pour cause : elle est la deuxième agente d’un laboratoire français à perdre la vie après avoir travaillé sur les prions, des protéines pathogènes dont certaines sont à l’origine de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. Une situation suffisamment grave pour convaincre les cinq établissements de recherche concernés (1) de suspendre leurs travaux.
Contrairement aux déclarations de son laboratoire, Pierrette C. avait bien déclaré deux accidents du travail susceptibles d’entraîner une contamination.
La recherche en ce domaine est en effet susceptible de faire progresser la compréhension de maladies neurodégénératives comme Alzheimer et Parkinson, qui partagent des mécanismes communs avec les maladies à prions. Initialement prévu jusqu’à fin octobre, ce moratoire a été prolongé jusqu’à la fin de l’année, le temps qu’une mission d’inspection publique évalue à nouveau la sécurité de ces laboratoires. Combien d’autres personnes ayant travaillé au contact de prions risquent de contracter cette maladie ?
Coupures et piqûresAvant Pierrette C., Émilie Jaumain, une assistante ingénieure de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), qui s’était coupée en 2010 en manipulant des prions infectieux, avait déjà perdu la vie en juin 2019, à l’âge de 33 ans. Sa famille avait immédiatement déposé plainte contre l’Inrae. En parallèle, son décès avait motivé une première mission d’inspection dans les neuf laboratoires prions de France.
Préparation d’échantillon de tissu pour l’histologie dans un laboratoire de type P3 de l’Inrae / Inrae
Publié en septembre 2020, son rapport avait conclu à un respect satisfaisant des protocoles de sécurité dans ces laboratoires classés P3 (lire ci-dessous), tout en notant des disparités d’une équipe à une autre, et un cadre réglementaire méritant d’être amélioré. Compte tenu du délai d’incubation (parfois des décennies) et du caractère incurable des maladies à prions, la mission conseillait de mettre en place un suivi pour les personnes exposées durant leur carrière. Au terme d’un recensement approfondi, les inspecteurs avaient estimé à cinq le nombre d’agents à s’être coupés ou piqués avec des outils contaminés au cours des vingt dernières années.
→ ARCHIVE. Le prion, agent secret de la biologie
Sauf que Pierrette C. ne figurait pas parmi ces accidents identifiés. L’Inrae – établissement de tutelle du laboratoire de l’ENVT – avait, dans un premier temps, indiqué ne pas avoir trace d’un accident la concernant. Des informations obtenues par La Croix montrent cependant que Pierrette C. avait bien déclaré non pas un, mais deux accidents du travail susceptibles d’entraîner une contamination, mais n’ayant pas fait l’objet d’un suivi, en 2004 et en 2005. « Nous avons trouvé sur le registre Hygiène et sécurité de l’ENVT la déclaration de deux coupures concernant notre collègue », reconnaît Pierre Sans, directeur de l’ENVT, dans un mail interne que nous avons pu consulter.
Point commun des derniers cas d’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) connus : tous travaillaient dans des laboratoires sur les prions.
Une redécouverte a posteriori qui questionne la capacité de l’établissement à mettre en place un suivi rigoureux des accidents. Et comment expliquer l’absence d’évolution des pratiques après les coupures de Pierrette C. ? Une interrogation qui a poussé Me Julien Bensimhon, avocat de la famille Jaumain, à demander au parquet de Paris d’enquêter sur ce second décès. En deuil, le mari de Pierrette C. ne s’est pour l’heure pas tourné vers la justice.
Deux cas en France, un en ItalieReste, remarque Pierre Sans, à établir le « lien potentiel entre ces coupures et la contamination », en identifiant les souches de prions que manipulait Pierrette C. Des analyses indiquent que Pierrette C. souffrait de la variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (vMCJ), qui est le plus souvent provoquée par la consommation de viande de bœuf contaminée par l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB). La fameuse « maladie de la vache folle ».
Dans un laboratoire universitaire classé au niveau de sécurité « P3 ». (Illustration) / JEFF PACHOUD/AFP
Distincte par ses symptômes de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, cette variante est rarissime : seulement 28 cas en France depuis 1996. Or, d’après le neurologue Jean-Philippe Brandel, responsable de la Cellule nationale des maladies de Creutzfeldt-Jakob, les trois derniers cas de vMCJ dans le monde seraient Pierrette C., Émilie Jaumain, et une chercheuse italienne décédée en 2016. Point commun : toutes trois travaillaient sur les prions.
→ DEBAT. Faut-il autoriser le retour des farines animales ?
Depuis l’annonce de la maladie de Pierrette C., au moins une autre personne ayant subi un accident s’est fait connaître. Il s’agit d’une technicienne retraitée de la même unité de recherche qu’Émilie Jaumain, qui, en 2005, s’est aussi coupé le pouce gauche avec « un outil piquant ayant servi à manipuler des cerveaux de souris infectées par du prion humain », rapporte la CGT dans un communiqué. Le syndicat déplore que l’Inrae ne l’ait jamais recontactée pour s’enquérir de son état de santé.
« Je préfère ne pas étaler ça »Qu’en pensent les chercheurs et agents travaillant actuellement sur les prions ? Difficile à dire. La recherche sur ces protéines pathogènes est un microcosme soudé qui ne compte qu’une centaine de personnes en France. Plusieurs syndicalistes font part de leurs difficultés à recueillir des témoignages en interne. Si un directeur d’établissement contacté reconnaît « des interrogations » parmi le personnel, deux chercheurs joints par La Croix, qui préfèrent demeurer anonymes, confirment que ces décès ont avivé une certaine inquiétude chez plusieurs de leurs collègues qui, comme eux, étudient ou ont étudié les prions.
« En labo comme ailleurs, le risque zéro n’existe pas, et les accidents ne sont pas toujours déclarés. »
« C’est difficile bien sûr d’éviter tout geste contaminant, on reste humain, chacun peut faire des erreurs », reconnaît l’un d’eux. « En labo comme ailleurs, le risque zéro n’existe pas, et les accidents ne sont pas toujours déclarés. Donc ces gestes contaminants sont forcément sous-estimés. »A-t-il lui-même des craintes pour sa santé ? « Oui et non… Quand je me suis décidé à travailler sur les prions, je savais que ça incluait un risque. Je sais aussi que quand je prends ma voiture, je risque de ne pas arriver à destination. C’est ma philosophie de vie. » Mais lorsqu’on lui demande s’il s’est lui-même déjà coupé ou piqué, sa réponse n’arrive qu’après un temps, évasive : « Je préfère ne pas étaler ça. »
Découverts il y a seulement quarante ans, les prions conservent des zones d’ombre. Ainsi du risque d’une contagion par aérosol, mis en lumière en 2011 par un article scientifique dirigé par le professeur Adriano Aguzzi. Un argument pour les partisans d’une réglementation plus stricte, qui ne va pas sans susciter une certaine controverse. S’il trouve cette étude « solide et intéressante », le docteur Jean-Philippe Brandel fait ainsi remarquer qu’il n’existe qu’un seul article à ce sujet, et que ses conditions de réalisation ne sont pas celles d’un laboratoire. Une querelle qui illustre le besoin de poursuivre la recherche sur les voies de contamination, comme le faisait remarquer le rapport d’inspection de 2020.
Laboratoire de recherche sur le prion, à Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine) en 2004. (illustration) / SIMON ISABELLE/SIPA/SIMON ISABELLE/SIPA
Outre les chercheurs, on trouve aussi en laboratoire des techniciens, qui n’ont pas nécessairement la même abnégation, ni la même formation théorique et pratique. C’était le cas de Pierrette C. comme d’Émilie Jaumain. « Émilie était très jeune, elle était en CDD, elle n’avait aucune expérience, et on l’a mise directement dans un labo P3 prions », affirme Armel Houel, son mari, lui-même ancien agent à l’Inrae. « Un technicien suit les ordres que ses responsables lui donnent. Il lui avait été demandé de récupérer des organes de souris infectées par du prion humain avec une pincette pointue en acier dans un bloc froid. Elle avait les mains engourdies. Elle n’avait pas de gants anti-coupures. »
« Aujourd’hui, les labos tournent avec des personnes précaires (…) Ça multiplie le risque d’accidents. »
Un syndicaliste
D’après l’avocat de la famille Jaumain, seule une autre technicienne était présente dans le laboratoire au moment où Émilie s’est piquée avec cette pincette, aucune d’entre elles n’était formée à la conduite à tenir en cas d’accident, et le laboratoire ne contenait pas le matériel nécessaire à la désinfection de sa plaie. La question de la formation est d’autant plus importante que le recours aux contrats courts devient plus fréquent dans la recherche. « Aujourd’hui, les labos tournent avec des personnes précaires, on en change tout le temps, on ne garde pas les gens formés, déplore un syndicaliste. J’ai vu des labos où un titulaire encadrait huit précaires, ça multiplie le risque d’accidents. »
→ CHRONIQUE. Marasme dans la recherche
Plusieurs laboratoires ont renforcé leur sécurité une fois connue la maladie d’Émilie Jaumain. Une source à l’Inrae nous dresse la liste des changements survenus dans les mois qui ont suivi : remplacement des pincettes en métal par des pincettes en plastique, achat de gants anti-coupures, réexamen des protocoles de décontamination, adoption d’une procédure de conduite à tenir en cas d’accident, installation d’un bidon d’eau de Javel prévu à cet effet… Sans toutefois abandonner d’autres pratiques discutables, comme celle de laisser des doctorants travailler seuls, sans supervision, le week-end, dans un laboratoire P3.
Un « guide de bonnes pratiques » visant à harmoniser les normes de sécurité doit être présenté ce mardi 7 décembre en comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Une première étape avant la parution du rapport d’inspection publique, et peut-être une levée du moratoire. Pas sûr pour autant que cela suffise à rebâtir la confiance. Jointe par La Croix, la secrétaire du CHSCT, Lorena Klein, a d’ores et déjà fait savoir qu’elle demanderait sa prolongation.
Les laboratoires de recherche haute sécurité
Les P1 et P2, laboratoires « pathogène de classe 1 » et « pathogène de classe 2 »
Les laboratoires sont classés suivant les degrés de dangerosité des agents pathogènes, de 1 à 4. Le groupe 1 étudie ceux qui ne sont « pas susceptibles de provoquer une maladie chez l’homme » et le 2 ceux modérément dangereux pour lesquels « il existe une prophylaxie ou un traitement efficace ».
Les P3.Ces unités travaillent sur les pathogènes qui peuvent « provoquer une maladie grave chez l’homme » et « présenter un risque de propagation dans la collectivité », mais pour lesquels il existe généralement une prophylaxie (des mesures sanitaires préventives jugées efficaces) ou un traitement reconnu. Outre le prion, cela comprend les recherches sur la tuberculose, le VIH, le H1N1 (grippe porcine), le Sars-CoV-2…
Les P4.Il en existe une soixantaine dans le monde (trois en France dont deux militaires). Ces laboratoires étudient des agents pathogènes qui provoquent « des maladies graves chez l’homme », présentent « un risque élevé de propagation dans la collectivité » et qui n’ont aucun traitement. Y sont étudiées les fièvres hémorragiques de type Ebola, la variole et les infections de type Nipah.
.
Analyse
Lecture en 3 min.
Promis par le gouvernement en 2020, au moment de la réintroduction temporaire des néonicotinoïdes pour les cultivateurs de betteraves à sucre, le plan national en faveur des insectes pollinisateurs a été dévoilé le dimanche 21 novembre. Il était attendu, alors que, selon différentes études menées en Europe, 60 à 70 % des populations d’insectes ont disparu en une décennie et que 10 % des espèces d’abeilles sauvages sont menacées d’extinction.
→ CONTEXTE. Betteraves, le retour sous conditions des néonicotinoïdes
Le dispositif annoncé par l’exécutif se fonde sur 8 « actions phares », dont les trois premières, en réalité se bornent à renforcer les connaissances scientifiques dans ce domaine. Il s’agit de « mieux connaître les comportements et ressources alimentaires des pollinisateurs », de mieux comprendre leurs « facteurs de stress » et surtout d’« objectiver » le déclin. Cela doit passer, estime le gouvernement, par la publication de « listes rouges d’espèces particulièrement menacées ».
« Une bonne mesure », salue Maud Lelièvre, directrice France de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). « À ce jour, en France, les listes n’existent pas pour toutes les espèces ou ont besoin d’être remises à jour », souligne-t-elle. Ce bilan sera dressé en tenant compte de la nomenclature élaborée par son organisation et reconnue au niveau mondial pour chaque espèce végétale ou animale (éteinte, éteinte à l’état sauvage, en danger critique, en danger, vulnérable, etc.).
Cet effort de connaissance est nécessaire, estime aussi Philippe Grandcolas, directeur de recherches au Muséum national d’histoire naturelle. « Sur les 40 000 espèces d’insectes qui vivent en France métropolitaine, quelques milliers exercent un impact significatif en termes de pollinisation. Or on compte dans notre pays tout au plus quelques dizaines de scientifiques qui se penchent sur la question, avec des terrains d’observation relativement circonscrits », déplore-t-il.
Néanmoins, ce spécialiste de la biodiversité met en garde : « On ne peut pas se contenter de mener ce travail de recherche, qui doit aider à endiguer la raréfaction des insectes pollinisateurs (abeilles domestiques, abeilles sauvages, bourdons, mouches, guêpes, etc.). On ne peut pas se permettre d’avancer au rythme habituel de la science et de ses appels d’offres, qui portent souvent leurs fruits à dix ou vingt ans. Il y a urgence ! Il faut en parallèle de vraies mesures. »
Or le nouveau plan n’apparaît pas suffisamment ambitieux. On y mentionne par exemple, comme axe majeur, l’établissement d’un partenariat avec le conseil national des villes et villages fleuris pour « renforcer l’engagement des collectivités » et « impliquer la société civile ». C’est utile. Mais l’enjeu décisif - l’usage des produits phytosanitaires dans l’agriculture - n’intervient qu’en huitième et dernière position…
À cet égard, le plan s’accompagne d’un arrêté publié le 20 novembre, qui vise à limiter l’usage des pesticides pendant la période de floraison « sur les cultures attractives pour les pollinisateurs » et les « zones de butinage ». Chacun des produits devra, à compter du 1er janvier 2022, faire l’objet d’une évaluation. Si, au terme de cet examen, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) autorise son usage en période de floraison, le traitement devra, « sauf cas particulier, être réalisé dans les deux heures qui précèdent le coucher de soleil et dans les trois heures qui suivent le coucher de soleil », précise le texte, pour tenir compte de l’activité essentiellement diurne de ces insectes.
« Que l’on ne puisse pas épandre des pesticides n’importe où et n’importe quand, constitue un certain progrès. Mais un progrès très limité », estime Philippe Grandcolas, qui insiste sur l’effet rémanent des intrants chimiques, qui restent actifs dans le milieu naturel sur des périodes plus ou moins longues. Pour le scientifique, « sauver les insectes pollinisateurs suppose d’aller vers plus d’agroécologie et des systèmes de production agricole moins intensifs ».
De son côté, la FNSEA, premier syndicat agricole, voit dans le plan et l’arrêté une dimension pénalisante. « L’instauration d’un processus franco-français d’évaluation des produits phytosanitaires, en anticipation par rapport au cadre européen met les agriculteurs français en situation de distorsion de concurrence pour la protection de leurs cultures », soutient la fédération.