1000 films pour aimer le Western

WINCHESTER 73 de Anthony Mann 1950 USA

Comme Ford a réussi tous ses westerns ou presque (1), Parmi eux cinq sont interprétés par son acteur fétiche avec qui il tournera d’autres films (2) Rarement dans le genre à l’exception de John Wayne-Ford et Scott –Boetticher, osmose ne fut aussi parfaite et ce film fut le premier des huit collaborations qui les unirent.

Et déjà le personnage « Mannien » se dessine (3)  : un homme droit , habile généreux , courageux même la peur au ventre à qui la deuxième chance est offerte et décidé pour arriver à ses fins ce qui en fera un homme rageur , violent et hystérique par endroit (la scène où les deux protagonistes se retrouvent et portent instinctivement la main à leurs hanches pour dégainer , se rappelant bêtement et en colère que leurs armes ont été confisquées à l’entrée de la ville) et crime de lèse-majesté est attirée par la femme de l’autre ; données rendant le personnage complexe insolite détermine (4). De cette peinture James Stewart -qui traverse durant cette décennie les plus beaux films de sa carrière et croise de grands réalisateurs ( Hitchcock – Mann- Preminger-Billy Wilder ) déjà commencée sous de bons hospices dans les années 30-40 (Capra-Cukor-Borzage) – en fera un archétype un symbole comme il fut celui des républicains en son temps. L’histoire comme le laisse figurer son titre évoque la célèbre carabine, mais elle n’est qu’un prétexte pour raconter une histoire de vengeance principalement ; celle de Lin McAdam (James Stewart) envers un dénommé Dutch Henry Brown (Stephen McNally) . Quand l’histoire commence le premier arrive en compagnie de son fidèle ami High Spade (Millard Mitchell ) dans la ville célèbre de Dodge City où a lieu pour le centenaire de l’indépendance un concours de tir qui rapportera au vainqueur la fameuse Winchester .

Lin se retrouve finaliste face à Dutch et remporte le trophée, ce dernier va l’agresser et lui voler son bien. Dès lors Lin et High vont courir après lui. Mais le fusil va passer de main en main : dans celle de Waco Johnnie Dean un tueur malin et violent (Dan Duryea) , de Young Bull un chef indien(Rock Hudson) qui combattra l’armée où se réfugient un moment donné les deux amis , de Joe Lamont un trafiquant d’armes (John McIntire) et de Steve Miller (Charles Drake ) le compagnon lâche de la belle Lola Manners (Shelley Winters) que Lin défend à son arrivée en ville et dont le charme ne le laisse pas indifférent. Le chasseur retrouvera sa proie et nous apprendrons que Dutch est en fait le frère de Lin et qu’il a commis un parricide avant de s’enfuir.

Donc première rencontre du couple, premier western de Mann qui en signera deux autres la même année dont le premier pro-indien «La porte du diable » deux autres œuvres emplies de pragmatisme. Ce réalisme se retrouve dans la peinture ses personnages tout aussi noir et fourbes les uns et les autres et Borden Chase l’adaptateur et le dialoguiste du film aux répliques sympathiques mais cinglantes

BORDEN CHASE est un excellent scénariste à qui l’on doit les scripts deLa Rivière rouge (Red River) d'Howard Hawks , en 1948 ; de 1954 : Vera Cruz (Vera Cruz) de Robert Aldrich, d'après son roman

 deL'Homme qui n'a pas d'étoile (Man Without Star) de King Vidor en 1955, de Coup de fouet en retour (Backlash) de John Sturges en 1956 et deL'Étoile brisée (Ride a Crooked Trail) de Jesse Hibbs en 1958 que des histoires palpitantes aux personnages fouillées. Il inspirera Raoul Walsh qui adaptera un de ses romansRivaux (Under Pressure) en 1938 et l’emploiera pourLe monde lui appartient (The World in his Arms) 1952 et pourLa Belle Espionne (Sea Devils) en 1953. Sa participation avec Anthony Mann  qui adaptera aussi un de ses écritsDr. Broadway 1942 est légendaire : 1952 :Les Affameurs (Bend of the River) , 1954 : Je suis un aventurier (The Far Country) 

 IL inspirera des films surtout des westerns  signés Joseph Kane (1945 : La Belle de San Francisco (Flame of Barbary Coast)  -- Henry Levin (1948 : La Peine du talion (The Man from Colorado) -- Ray Enright (1950 : Montana (Montana) avec Errol Flynn) - il eut droit à moult remakes 1968 :Un colt nommé Gannon (A Man Called Gannon) de James Goldstone, 2 épisodes de « Le virginien » 1963 et 1965,La rivière rouge (1988) tiré du film homonyme de 1948 et un remake de celui-ciWinchester 73 (1967 de Herschel Daugherty ) que nous traiterons plus tard

 L’interprétation homogène grandit le film avecSTEPHEN MCNALLY un second rôle pas assez connu vu dans une dizaine de westerns qui joue Dutch la crapule intégrale, un Caïn des temps modernes qui a commis l’irréparable. Il était présent dans Dangereuse mission (1950) Wyoming Mail de l’inégal Reginald Le Borg et dans  le superbe  Quand les tambours s'arrêteront (Apache Drums) de Hugo Fregonese en 1951, dans Duel sans merci (The Duel at Silver Creek) de Don Siegel western à reconsidérer , dansTornade sur la ville (The Man from Bitter Ridge) de Jack Arnold  en 1955 et dans La Loi de la prairie (Tribute to a Bad Man) de Robert Wise l’année d’après  et dans  Le Diable dans la peau (Hell Bent for Leather) de George Sherman où il affronte de nouveau Audie Murphy. Cet excellent acteur fut remarqué dans d’autres genresLa porte s'ouvre (1950) No Way Out un drame social de Joseph L. Mankiewicz et dans 2 classiques du polar des années 40  : 1948 :Johnny Belinda de Jean Negulesco et 1949 :Pour toi j'ai tué (Criss Cross) de Robert Siodmak en seconds rôles

 Stephen McNally & Shelley Winters & Dan Duryea

 DAN DURYEA un second rôle fort remarquable employé à foison dans 25 westerns où il croisera l’inévitable Audie Murphy :Chevauchée avec le diable (1954) de Jesse Hibbs ,Six chevaux dans la plaine (1962) de Harry Keller ; aussi Gary Cooper : 1945 :Le Grand Bill (Along Came Jones) de Stuart Heisler

 acteur anticonformiste rarement dans le faux qui tourna autant de westerns que de polars ; les premiers furent signés George Sherman, Anthony Mann, Allan Dwan et Jesse Hibbs pour les bons jours et R. G. Springsteen, et Spencer Gordon Bennet pour les  mauvais. Qu’importe les premiers rachèteront les autres et le feront demander par ; Robert Siodmak, Fritz Lang  dans 3 œuvres importantes : en 1944 :Espions sur la Tamise (The Ministry of Fear)-- La Femme au portrait (Woman in the Window-- 1945 : La Rue rouge (Scarlet Street) ,Anthony Mann qui aima le diriger (1945 : La Cible vivante (The Great Flammarion) , 1953 : Le Port des passions (Thunder Bay) Howard Hawks, WilliamWyler. L’acteur étonne à chaque fois et prouve qu’il demeure l’un des plus grands seconds du western par son jeu subtil. Il figurera dans le remake de celui-ci.

 Will Geer & Millard Mitchell &James Stewart

SHELLEY WINTERS grande artiste aux 2 oscars (5) qui fut sublime dans les œuvres ambitieuses (La nuit du chasseur(1955) The Night of the Hunter l’unique film de l’acteur  Charles Laughton avec un Robert Mitchum terrifiant  et le célèbre Lolita (1962) de Stanley Kubrick où elle joue la mère de celle-ci  ) et les films modestes ( «Bloody mama » de Corman) et qui dans le western retrouvera un fort et de surcroit exubérant dans« Les chasseurs de scalps » et es personnages de femme pas si béta que cela et plus combattive que les hommes qui l’entourent comme dansLe trésor de Pancho Villa (1955) The Treasure of Pancho Villa de George Sherman , ou dansLa brigade héroïque Saskatchewan (1954) du grand Raoul Walsh, dansPassage interdit (1952) Untamed Frontier du sous-estimé Hugo Fregonese et dans un moins bon western où elle est dort attrayante et drôleLa femme sans loi (1950)  de Louis King dont le titre original « Frenchie » est le nom de son interprète

James Stewart une des grandes stars du cinéma américain et du western  qui rivalisera avec John Wayne et Gary Cooper. Et comme ce dernier il fricota avec les plus grands dans tous les genres.IL fut chronologiquement parlant l’acteur fétiche de 1938  de FRANK CAPRA :Vous ne l'emporterez pas avec vous (You Can't Take It with You)--- 1939 : Mr. Smith au Sénat (Mr. Smith Goes to Washington)--- 1946 :La vie est belle (It's a Wonderful Life), deANTHONY MANN ; d’ALFRED HITCHCOCK ( 1948 : La Corde (Rope) -- 1954 : Fenêtre sur cour (Rear Window) --- 1956 : L'Homme qui en savait trop (The Man Who Knew Too Much) --- 1958 :Sueurs froides (Vertigo) ; de JOHN FORD (1961 :Les Deux Cavaliers (Two Rode Together)-- 1962 :L'Homme qui tua Liberty Valance (The Man Who Shot Liberty Valance)--- 1964 : Les Cheyennes (Cheyenne Autumn) ----) et deAndrew V. McLaglen ( ce furent ses westerns les moins bons : 1965 :Les Prairies de l'honneur (Shenandoah) --- 1966 :Rancho Bravo (The Rare Breed) --- 1968 : Bandolero!  ) Ajoutons quelques westerns mémorables( 1939 : Femme ou Démon (Destry Rides Again) de George Marshall  (6) -- 1950 : La Flèche brisée (Broken Arrow) de Delmer Daves -- 1976 : Le Dernier des géants (The Shootist) de Don Siegel  ) et quelques fortes personnalités du 7 ième art (  1957 :L'Odyssée de Charles Lindbergh (The Spirit of St. Louis) de Billy Wilder --- 1959 : Autopsie d'un meurtre (Anatomy of a Murder) d'Otto Preminger ------) diantre quelle carrière !

Le film d’ANTHONY MANN demeure une réflexion sur l’homme et la violence et comment celui-ci s’en accommode (non pas que celle des méchants mais aussi celle des hommes de loi et du héros qui l’utilisent pareillement), sur la famille désunie présentée sous forme de tragédie grecque où la aussi la loi est bafouée. Anthony Mann à impressionner la pellicule avec sa relecture du genre (C’était l’ère  des westerns emplis de tourments, où psychologie et psychanalyse font partie de la recette) et son premier western est un coup de maitre.

 (1) Onze westerns en 10 ans de «Winchester 73 » (1950) à« La Ruée vers l'Ouest » (1960) en passant en 1954 par : Je suis un aventurier(The Far Country) et  en 1955 :L'Homme de la plaine (The Man from Laramie) ; deux perles La Charge des tuniques bleues (The Last Frontier) est le moins réussi avec Victor Mature un interprète qui ne collait pas à son univers. Cependant il faut réévaluer son premier 1950 :Les Furies (The Furies) qui est remarquable

 Rock Hudson & John McIntire dans des rôles brefs

 (2 )Strategic Air Command -Romance inachevée -Le port des passions de 1953- 1954 et 1955

 (3 ) Ses polars réalisés confirment notre regard tels :La brigade du suicide T-Men ( (1947)--Marché de brutes (1948) Raw Deal --Incident de frontière Border Incident  (1949 ---

(4 ) "La force d’un personnage n’est pas dans sa manière de distribuer les uppercuts ou de faire saillir ses muscles : elle est dans sa personnalité, c’est la force de sa détermination…" disait Anthony Mann.

(5 ) Le journal d'Anne Frank (1959).-A patch of blue 1965

 (6 )Qui sortira en DVD en septembre ou octobre 2018

(*) Edition collector limitée, comprenant :

• le Blu-ray du film original Winchester 73, d’Anthony Mann (1950)
• le DVD du remake Winchester 73, de Herschel Daugherty (1967)
• un livret de 30 pages sur l’histoire du fusil Winchester 73

Image et son restaurés

 Dan Duryea & Stephen McNally

Bonus du Blu-ray :

• Présentation du film par Patrick Brion et Bertrand Tavernier
• Enregistrement original du Lux Radio Theatre le 12 novembre 1951 joué en direct par James Stewart, Steven McNally et Julia Adams (VOST)
• Présentation du film par Patrick Brion et Bertrand Tavernier