1000 films pour aimer le Western

L’HOMME DE L’ARIZONA (THE TALL T) de Budd BOETTICHER – 1957

                 Sortie le 15 septembre 2020  chez  Sidonis Calysta (*)

                       avec des superbes bous et en Combo

Comme attirance dans le western il y eut James Stewart et Anthony Mann —Joel McCréa et Jacques Tourneur ;  John Wayne et Ford ;  Glenn Ford et Delmer Daves. et bien sur Randolph Scott et Budd Boetticher Cette osmose donna les plus beaux westerns et fit introduire dans ce dernier exemple Burt Kennedy comme scénariste et Harry Joe Brown (5) le coproducteur avec Scott de cette association.

L’importance de ce film réside dans son pessimisme, et ce sera la marque de ce quatuor . « L'homme est un loup pour l’homme » et la quiétude n’est point de mise. C’est justement cette dernière que le héros malgré lui recherche .Pour cela il doit affronter des âmes noires et le synopsis devient une tragédie au sens grec du mot dès qu’il y a passion et mort d’hommes. Le cinéma italien gardera cette approche obscure jusqu’à l’user jusqu’à la corde

 Qu’en est-il de ce film qui refuse le commun au profit d’un réalisme sans concession fut-il démoralisant. Les personnages sont déroutants sauvages, irréfléchis et calculateurs à la fois même le couple vedette au demeurant serein vadevenir plus diabolique que le diable

Pat Brennan (Randolph Scott) est un homme tranquille, excontremaître d’un propriétaire terrien, il l’est lui-même devenu. Il traverse une ville pour achats et croise un voisin et son fils à qui il promet de lui ramener des sucres d’orge. Il perd unpari et soncheval et lev voila faire de la diligence stop où il recroisera un vieil ami Ed Rintoon (Arthur Hunnicutt) une femme Doretta Mims (Maureen O’Sullivan) envoyage de noces avec son antipathique époux Willard Mims (John Hubbard) . Accueillis par trois bandits le chef Frank Usher (Richard Boone ) et ses deux acolytes Chink (Henry Silva) et Billy Jack (Skip Homeier ) les passagers à l’exception de Rintoon abattu par l’un des assaillants seront pris en otage . Ces derniers ayant pris cette diligence pour celle de la poste décident de se débarrasser de ces témoins gênants comme ils le firent pour le père et l’enfant visités au début par Brennan.

Ce projet est mis à l’eau quand Williard leur en propose un plus avantageux voire juteux en indiquant que sa femme est la fille d’un riche propriétaire et qu’il peut contre leur liberté ramener une rançon. Frank Usher le leader laisse les prisonniers à ses deux lascars pour ramener la rançon et Pat Brennan va tenter en son absence de reverser les rôles. Passé le premier quart d’heure le film devient prenant et conserve un rythme et une intensité croissante qui font de cette réunion accidentelle de personnages divers un huis clos stressant, tendu et plein de tension.

Approchons les personnages pour mieux étayer nos dires

PATRICK BRENNAN (Randolph Scott) est un homme tranquille, sociable acceptant la plaisanterie et d’être victime consentante de situations drolatiques. Il rêve d’une maison, d’un coin tranquille, d’une vie paisible . Sa métamorphose sera aussi spectaculaire que la foudre en tonnerre, de pacifiste il devient belliciste. Il est le révélateur de l'héroïne, le modèle du geôlier en chef , un résistant qui,va  diviser pour mieux régner.

FRANK USHER  (Richard Boone) est un chef de bande honteux de ses 2 acolytes qu’il avoue ne pas aimer, dira en termes méprisants : « ce sont des animaux ». il partage ; lui aussi rêve d’un lopin de terre, d’une accalmie et envie Brennan dont peu à peu – ô ambiguïté- il admire la personnalité et apprécie le bonhomme . Son ultime réplique sera l’appel du  nom de cet  interlocuteur

DORETTA MIMS  (Maureen O'Sullivan) est une femme effacée, jeune mariée à un pleutre coureur de dot , peu sensuelle, « c’est l’une des femmes les plus fades que j’ai vues » dira Usher  peu féminine qui accepte une union pour échapper à un père indifférent et devient touchante quand elle parle d’isolement, de solitude et de frustrations et va se révéler  dans cette histoire sordide ( il y aura une rançon évoquée et un droit de cuissage évoquée) .De femme éteinte elle va devenir rebelle tenace

CHINK  (Henry Silva) est un malade, un tueur patenté, une crapule. Il est l’une des figures les plus crapuleuses du genre tuant même les enfants et s’étonnant de ne pas avoir éliminer encore de femmes

BILLY JACK (Skip Homeier) l’autre sauvage de service avec une noix à la place du cerveau sera la première cible de Brennan

 Bien sur qu’avant de parler du célèbre scénariste, faisons entrer en scène l’auteur du roman ELMORE LEONARD qui a vu la plupart d’entre eux adaptés :3 h 10 pour Yuma (3:10 to Yuma) 1957 de Delmer Daves---Hombre de Martin Ritt 1967-- Valdez (1971) de Edwin Sherin et le célèbre Jackie Brown de Tarentino . Donc le synopsis avait déjà une armature solide. L’écrivain est réputé pour ses écrits sur le western et sur le polar

BURT KENNEDY travaillera  fois avec le duo Randolph Scott et Budd Boetticher (5) filmera etpersévéra dans l’écriture pour Gordon Douglas (1958 : Sur la piste des Comanches (Fort Dobbs) 1959 : Le Géant du Grand Nord (Yellowstone Kelly) et pour lui-même signant une bonne dizaine de westerns(6) dont nous retiendrons le singulier Welcome to Hard Times (Frontière en flammes) en 1967 avec Henry Fonda d’après un roman de E.L. Doctorow l’auteur de Ragtime 1975 Son apport est néanmoins indéniable sur tous ces films notamment ceux de Budd Boetticher. Malheureusement il fut un scénariste qui a mal tourné dans tous les sens du terme.

 Quant au sieur BUDD BOETTICHER il demeure l’un des 5 ou 6 grands du  western.il montre un savoir faire indéniable avec un budget moyen et des vedettes hormis les 2 principales peu connues et cela dans un laps de temps ( 80 mn , ce qui de nos jours passerait pour un court métrage) .Il propose une action serrée qui ne débute qu’après un bon quart d’heure , ; la symbolise avec un  huis-clos étouffant et une violence rarement soulignée de cette force  – même si elle n’est jamais montrée dans le détail- les morts sont spectaculaires et brutales . il instaure un jeu relationnel conflictuelle et contradictoire. Il signe de nouveau un petit chef d’œuvre tout comme ceux – devenus des icônes _ qu’il fit interpréter par son acteur fétiche.

SKIP HOMEIER eut une aussi grande carrière que Henry Silva et fut tout autant présent que lui dans le genre : 1950 :La Cible humaine (The Gunfighter)  où il est la petite frappe qui tue Gtrégory Peck  --1954 :Vengeance à l'aube (Dawn at Socorro) de George Sherman--1955 :Dix hommes à abattre (Ten Wanted Men) où déjà il avait croisé Randolph Scott et Richard Boone --- 1955 :Le Doigt sur la gâchette (At Gunpoint --  1956 :Guet-apens chez les Sioux (Dakota incident) ; Budd Boetticher leréutilisera dans Comanche Station--1963 :Le Collier de fer (Showdown) et 1964 :La Patrouille de la violence  de R. G. Springsteen

HENRY SILVA fut un des méchants de service dans le 1966 : Les Fusils du Far West (The Plainsman) de David Lowell Rich  1958 :L'Étoile brisée (Ride a Crooked Trail) de Jesse Hibbs et Bravados (The Bravados) d'Henry King-- 1959 :Le Trésor du pendu (The Law and Jack Wade)  et 1961 :Les Trois Sergents (Sergeants 3) de John Sturges --Sa démarche chaloupée et  son regard inquiétant lui conférent une personnalité redoutée et lui  ouvrirent  la  porte  aussi du polar : 1962 : Un Crime dans la tête (The Manchurian Candidate) de John Frankenheimer-- 1963 :La Revanche du Sicilien (Johnny Cool) (en) de William Asher  son rôle le plus connu en tête d’affiche -1983 : Meurtres en direct (Wrong is Right) de Richard Brooks ---

A la fin de sa carrière ( les années 90 ) une nouvelle génération de cinéastes l’honorât : Steven Soderberg 2001 :Ocean's Eleven (Ocean's eleven)  ( sa dernièreapparition en caméo) --- Jim Jarmusch : 1999 : Ghost Dog, la voie du samouraï (Ghost dog) 1997 : Wim Wenders -The End of Violence --- Warren Beatty 1990 :Dick Tracy . Il a aujourd’hui 92 ans.

MAUREEN O'SULLIVAN excellente , juste dans ce personnage de vieille fille presque jamais vu dans le western est la célèbre Jane des six premiers films de «Tarzan », interprété par Johnny Weissmuller et produit par la MGM et dont le premier choqua du fait de la tenue dénudée de l’actrice en 1932 avant la parution du fameux code Hays (7) Elle est la mère de Mia Farrow et tournera des films imposants aussi : 1935 :Anna Karénine (Anna Karenina) de Clarence Brown & David Copperfield de George Cukor  --  1936 :Les Poupées du diable (The Devil-Doll) de Tod Browning -- 1940 :Orgueil et Préjugés (Pride and Prejudice) de Robert Z. Leonard -- 1953 :All I Desire de Douglas Sirk -- 1986 :Hannah et ses sœurs (Hannah and her sisters) de Woody Allen &  Peggy Sue s'est mariée (Peggy Sue got married) de Francis Ford Coppola

RICHARD BOONE fort crédible dans ce rôle de double du héros mais du côté du mal  fut un acteur  impressionnant au point que des grands cinéastes le quémandèrent : John Huston en  1969  pour La Lettre du Kremlin (The Kremlin Letter),  et  Elia Kazan  en 1969 pour L'Arrangement (The Arrangement) ; ce qui ne l’empêchera pas  d’être fut un des grands méchants du western :1952 :Le Gaucho (Way of a Gaucho), de Jacques Tourneur à 1954 :L'Attaque de la rivière rouge (The Siege at Red River) Rudolph Maté-- 1955 :L'Homme qui n'a pas d'étoile (Man without a Star), de King Vidor et Dix hommes à abattre (Ten wanted men), de H. Bruce Humberstone -- 1961 :Tonnerre Apache (A Thunder of drums), de Joseph M. Newman-- 1964 :Rio Conchos, de Gordon Douglas son meilleur rôle dans le genre.

RANDOLPH SCOTT était dans la dernière ligne droite de sa carrière qu’il allait clore 5 ans plus tard avec 7 autres westerns, genre qu’ilaffectionnât et qu’ilprivilégiât puisque des années quarante  à soixante il ne fit que cela comme John Wayne, Audie Murphy, Joel McCréa qui eux aussi avaient abordé d’autres genres : Polar, film de guerre ou d’aventures en somme que du cinéma d’action Il est pour une rare fois comique par sa maladresse et ses mésaventures du moins lors du premier quart d’heure.

Randolph Scott en 1957 avait tourné plus de 50 westerns il était dans sa dernière ligne droite – avant d’être demandé par Peckinpah (1962 : Coups de feu dans la Sierra (Ride the High Country)  celle qui allait contribuer à sa légende de cowboy altruiste et droit participant jusqu’à produire en partie ses derniers films . Effectivement Budd Boetticher et ses scénaristes vont peu à peu peaufiner le personnage de Scott le rendant plus profond, plus sensible plus réaliste et humain à part entière montrant ses faiblesses, ses peurs et sa solitude. il sera tantôt un être tourmenté, vivant dans le doute et parfois dans l’erreur et sortant de ses aventures pas toujours vainqueurs, il tournait le dos à ses anciens personnages parfois stéréotypés pour d’autres plus riches et plus complexes qu’avec ses autres réalisateurs de prédilection (Ray Enright--  'Edwin L. Marin -- Henry Hathaway) .Seul André De Toth  avait tracé les sillons du Scott nouveau il savait qu’il avait atteint le firmament avec ces 7 films.

 Il avait auparavant tourné des films honorables westerns (1952 :À feu et à sang (The Cimarron Kid) &Le Traître du Texas (Horizons West) 1953 :L'Expédition du Fort King (Seminole) & 1953 :Le Déserteur de Fort Alamo (The Man from the Alamo) ) ou non (1956 :Le tueur s'est évadé (The Killer is loose) un des meilleurs polars de la décennie et l’autre tout aussi culte 1960 :La Chute d'un caïd (The Rise and Fall of Legs Diamond) Son avant dernier filmsera unwestern surprenant : 1969 :Qui Tire le premier ? (A Time for Dying)œuvres qui ne sont point dénués de talent.Il a apporté unedramaturgie  différente voire non conventionnelle.

(*) film en Combo (DVD et BLU-RAYsans  livret intercalaire et plusieurs bonus dont un making-of , et une présentation du film par Patrick brion , Bertrand Tavernier et Mzrtine Scorsese

A cela s’ajoute un documentaire de 50 minutes sur BUDD BOETTICHER