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Date de création : 26.02.2011
Dernière mise à jour : 31.01.2025
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752 COMPARAISONS INDUES ENTRE L'HOMME ET L'ANIMAL

Rubrique "Philosophie au fil des textes".

Prochain billet demain 08 novembre (Lecture philosophique de la Bible).

 

   Notre réflexion critique portera ce jour sur le texte de Pascal extrait de la « Préface pour le traité du vide » :

 

      «  N’est-ce pas indignement traiter la raison de l’homme que de la mettre en parallèle avec l’instinct des animaux, puisqu’on en ôte la principale différence, qui consiste en ce que les effets du raisonnement augmentent sans cesse, au lieu que l’instinct demeure toujours dans un état égal ? Les ruches des abeilles étaient aussi bien mesurées il y a mille ans qu’aujourd’hui, et chacune d’elles forme cet hexagone aussi exactement la première fois que la dernière. Il en est de même de tout ce que les animaux produisent par ce mouvement occulte. La nature les instruit à mesure que la nécessité les presse ; mais cette science fragile se perd avec les besoins qu’ils en ont : comme ils la reçoivent sans étude, ils n’ont pas le bonheur de la conserver ; et toutes les fois qu’elle leur est donnée, elle leur est nouvelle, puisque, la nature n’ayant pour objet que de maintenir les animaux dans un ordre de perfection bornée, elle leur inspire cette science nécessaire, toujours égale, de peur qu’ils ne tombent dans le dépérissement, et ne permet pas qu’ils y ajoutent, de peur qu’ils ne passent les limites qu’elle leur a prescrites. Il n’en est pas de même de l’homme, qui n’est produit que pour l’infinité. Il est dans l’ignorance au premier âge de sa vie ; mais il s’instruit sans cesse dans son progrès : car il tire avantage non seulement de sa propre expérience, mais encore de celle de ses prédécesseurs, parce qu’il garde toujours dans sa mémoire les connaissances qu’il s’est une fois acquises, et que celles des anciens lui sont toujours présentes dans les livres qu’ils en ont laissés. Et comme il conserve ces connaissances, il peut aussi les augmenter facilement. »

 

     Ce passage de Pascal nous donne l’occasion de revenir sur des considérations qui ont déjà fait l’objet de développements dans des contextes différents. Nous sommes à une époque où des raisons multiples conduisent à minimiser voire effacer les différences fondamentales entre l’homme et l’animal. La première de ces raisons, même si elle est rarement explicitée ou même peut-être clairement pensée, c’est le souci de rompre avec l’héritage religieux constitué par le judéo-christianisme et dans la foulée avec l’humanisme classique qui reprend en le laïcisant l’idée de primauté de l’homme dans tous les domaines, que ce soit sur le plan moral ou dans ses rapports avec la nature. Nous allons préciser ce point.

 

   La deuxième raison, à nos yeux, de ce rapprochement idéologique entre l’homme et l’animal, c’est le souci de respecter la nature, ses équilibres indispensables, et par là même de fustiger les comportements de l’homme et de la culture consistant à « piller » les ressources naturelles, à mettre en danger l’atmosphère et les océans, deux sources fondamentales pour la survie de l’humanité, à ne se préoccuper que de l’exacerbation de besoins nouveaux très éloignée de l’indispensable vie frugale selon diverses écoles dites écologistes.

 

    Cette double inspiration idéologique rejaillit sur certains secteurs de l’activité scientifique ou plus précisément sur le contenu de publications scientifiques officielles ou de vulgarisation. L’objectif est de montrer que l’homme, si longtemps porté au pinacle, n’a à vrai dire rien de si extraordinaire que cela. Le langage, l’outil, voire la conscience et  même le phénomène culturel ne sont pas son apanage. On consent simplement à reconnaître que toutes ces caractéristiques sont un peu plus développées chez l’homme, sans que cela ne laisse soupçonner une différence qualitative entre l’homme et l’animal.

 

  Tous ces écrits réjouissent et confortent ceux qui, en Occident, investissent affectivement dans nombre d’animaux familiers, substituts réparateurs d’une société de plus en plus dure et qui développe dans des secteurs entiers de la population, notamment les plus âgés, solitude et sentiment d’abandon à des sorts souvent peu enviables, la dureté des temps et la recherche effrénée des profits par les mieux lotis ne laissant que peu de place à la solidarité, à la compassion humaines, au maintien de liens sociaux authentiques.

 

  C’est ainsi que de multiples notions comme le langage, l’outil, l’instinct, etc., finissent par se diluer dans des définitions tellement souples et générales qu’elles en perdent toute signification ou toute rigueur. On oublie les échecs répétés des expériences américaines sur les singes et ce, depuis près d’un siècle, pour amener cet animal à parler. Toutes ces expériences, notamment celles du couple Gardner sur le chimpanzé Washoe, soulignent certes à l’évidence les grandes capacités d’apprentissage et de mémorisation du singe mais son incapacité à accéder au langage articulé. Autrement dit le singe ne comprend pas le caractère conventionnel du langage, le fait qu’à partir d’un nombre limité de signes arbitraires il est possible de créer indéfiniment de nouveaux mots, de nouvelles phrases par combinaisons de ces mots. Les signes humains qu’il acquiert sont utilisés comme des signaux, autrement dit comme des signes non articulés, formant un bloc, bref comme des signes de même nature que ceux qu’il utilise au sein de sa vie naturelle.

 

    A cela, il n’y a d’ailleurs rien de mystérieux. Si le singe n’accède pas au langage articulé, c’est tout simplement qu’il ne dispose pas de la pensée, de la capacité d’abstraction. Un enfant qui commence à parler ne puise pas dans sa mémoire dans un stock de phrases toutes faites, il crée une phrase nouvelle en fonction du vocabulaire maîtrisé. Le singe est inapte à de telles performances, faute de posséder la pensée. Et s’il ne dispose pas de la pensée, là encore il n’y  rien de mystérieux, car il ne possède pas l’organe suffisamment perfectionné et complexe pour autoriser ce l’on appelle la pensée à émerger. Rappelons une fois de plus  que le cerveau de l’homme comporte 100 milliards de neurones alors que le singe n’en dispose que de 9 milliards et que de surcroît chaque neurone pouvant établir des connexions innombrables avec les autres neurones, le fossé biologique entre les deux espèces s’avère abyssal.

 

   Ce fossé rend compte des créations culturelles de l’humanité sans commune mesure avec celles du singe tant magnifiées par certains comme le fait d’utiliser une pierre pour écraser une noix ou d’effeuiller une branche pour se saisir de termites au sein d’une termitière. Là encore, la notion d’outil est subvertie. Le singe, comme le restant de la nature, ignore l’outil. Un outil est une création artificielle (et non le simple usage d’éléments naturels) incarnant matériellement un projet précis et conservé après usage pour un nouvel usage éventuel. De plus, l’outil ne vise pas simplement la simple adaptation de l’homme à son milieu, mais également l’adaptation du milieu à ses besoins.

 

   Tout ceci n’est possible que grâce à la possession de la pensée créatrice, elle-même expliquée par la possession de la conscience. Même s’il est difficile de définir et de rendre compte par des mots ce qu’est véritablement la conscience, une chose est sûre c’est qu’elle constitue la faculté permettant d’accéder au sens et de s’interroger sur le       monde et de se révéler à soi-même son identité personnelle.

 

    Enfin, reste la notion d’instinct à laquelle l’opinion commune est tant attachée, dans la mesure où elle est confondue avec les besoins naturels et avec une forme de spontanéité, tantôt louée, tantôt condamnée afin de donner toute sa place et sa légitimité aux conventions sociales considérées de bon aloi. Or, ces considérations reposent sur l’ignorance de cette notion d’instinct. L’instinct est un savoir inné, précis, stéréotypé, rigide, non évolutif, prolongement de la configuration anatomique de l’animal concerné et condition sine qua non de sa survie. L’homme ne possède pas d’instincts ainsi entendus, et ce dans la mesure où il peut tout apprendre et créer les moyens non seulement de s’adapter mais d’adapter la nature à ses projets.

 

   Par là même, l’homme devient l’auteur des changements qu’il connaît à travers le temps. Il n’est plus un simple être naturel mais un être historique, qui a vocation à s’arracher toujours plus à sa vie naturelle afin d’élaborer un milieu culturel ayant de moins en moins de rapport avec cette vie naturelle. Cette édification de ce monde nouveau et spécifique est sans limite. L’homme est bien fait « pour l’infinité ».

A. Mendiri