Pourtant, de temps en temps je suis touché par un trait, une idée, une approche
Ce fut le cas régulièrement avec Franquin, ce génie qui savait amuser, toucher, faire réagir...
La première fois fut sans doute, ado, celle ci
L'image d'ouverture de cette entrée est la "réédition" tant attendue (36 ans) de ce livre magique, avec Numa Sadoul
Il semblerait que la fille d'André Franquin soit pour beaucoup dans les délais, les remaniements, changement d'éditeur et, surtout, modification profonde de l'iconographie
L'actuelle, propre sur elle, a bien peu de saveur
Il y a des pages, des images intéressantes, mais beaucoup de ...
L'original était un joyeux bordel, mais blindé de merveilles graphiques non reprises aujourd'hui
Ado encore, je l'ai eu en main, de la bibliothèque. Comme avec la version Aedena de Dark Knight il ne m'est pas venu à l'idée de le "voler ou de le perdre et le payer" (une éducation trop rigide :)
J'ai fait des photocopies, perdues depuis longtemps
Reste que les textes des entretiens, a priori non retouchés, sont là et que sa lecture est un énorme plaisir (j'en suis à peu près à la moitié) Dire que de ce que j'ai pu entendre/lire la fille de ce génie s'opposait à une réédition en partie car son père, selon elle, parlait trop de sa déprime (ce mot vient souvent en lieu et place de "dépression" d'aileurs) Et bien si elle avait caviardé les parties qui évoquent, même à demi mot, ce mal être, il ne serait pas resté grand chose de la première partie du livre
Quel talent inversement proportionnel à la prétention! (une humilité bien appuyée par la pathologie également)
Un autre poète, en lien assez direct en terme d'influence, avec Franquin
J'ai croisé quelques fois à St Malo le très sympathique Gégé mais ne connaissais pas son travail
Influencé par Laurent (Lefeuvre) et le travail de Komics Initiative j'ai participé à la compagne de cette réédition et ne le regrette pas une seconde
De la poésie moderne, malgré les années, et un trait doux, rond
Intemporel
On peut, forcément, penser à Franquin, mais aussi à un autre géant (et un autre André) disparu, Geerts
J'ai été personnellement touché par une histoire dont voici une seule case
De l'onirisme toujours, et une autre forme de grâce : le recueil, chez Black and White (une création récente cette fois) des planches de Cécil sur son confinement et son introspection artistique en live
C'est atypique, assez dur à résumer, avec des séquences hors du temps, d'autres plus terre à terre, des rencontres, des idoles, des influences...un très beau et long voyage créatif
L'auteur et son éditeur, Mr Raphael Wacker
J'ai pu suivre ce projet (que j'imagine dispo hors campagne sous peu, chez B&W), faire des relectures, des petites impressions. retours, et quelle surprise de voir sur mon exemplaire que Raph n'est pas le seul croqué à la façon Cécil
Géant
J'ai ouvert avec un génie, je ferme avec un autre, en quittant, et oh combien, la poésie (sur le fond car sur la forme il y en a)
Sans Bofa pas de Tardi, voire pas d'Hergé, ou de Morris...
Un illustrateur hors norme, incroyable
Je connais beaucoup d'images de Bofa, du net, mais n'avais pas de livres de lui jusqu'à cette magnifique réédition récente chez Cornélius
C'est époustouflant, d'une noirceur insondable, de la désillusion, de l'analyse beaucoup de clairvoyance et, malheureusement, d'actualité
Le récit, de Bofa également, est de 1937
Brisé par la première guerre mondiale il voyait arriver la seconde, ce qui ne risquait pas d'améliorer sa vision du monde et de l'être humain
Son dessin est léger, profond, aérien, pesant, noir, lumineux, gris, poétique, plombant, superbe...
Un incontournable absolu
Si je lui préfère Mort à Crédit (quelle claque stylistique) Le Voyage au bout de la Nuit, de Céline,m'a fait, un peu, la même impression, le même choc, que la lecture de ce livre de Gus Bofa