Affichage des articles dont le libellé est Art. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Art. Afficher tous les articles

vendredi 27 février 2015

Léonard Nimoy est décédé (1931-2015)

L'acteur, réalisateur, producteur, photographe et chanteur américain Léonard Nimoy est décédé le 27 février 2015 à 83 ans à Los Angeles d'une maladie pulmonaire chronique liée à son tabagisme passé.
Biographie
Léonard Nimoy est né le 26 mars 1931 à Boston, Massachusetts. Ses parents étaient des immigrés juifs orthodoxes ukrainiens. Son père était barbier et sa mère femme au foyer.
Léonard monta sur les planches du théâtre dès l'âge de 8 ans et signa son premier rôle à Hollywood à 20 ans.
Sa biographie est très riche de son métier d'acteur et de réalisateur. Il joua dans 111 films dont une majorité adaptés au petit écran, dans quelques courts métrages et une bonne dizaine de longs métrages.
Léonard Nimoy assura son premier rôle en 1951 dans le film "Queen for a Day" d'Arthur Lubin. Il joua ensuite dans plus de 70 séries TV (dont plus de la moitié dans les années '60), dont "La Quatrième Dimension", "Mission: Impossible", "Le Virginien", "Max la menace", "Au-delà du réel", "Columbo", "Invasion America", "Fringe", "Comedy Central Roast" où il joue auprès de son ami William Shatner et bien sûr dans "Star Trek".
On le retrouve également dans les films "Deathwatch" (1966), "L'invasion des profanateurs" (1978) et "Le meilleur des mondes" (1998).
Il prêta également sa voix à divers personnages, notamment dans les films "L'Atlantide, l'empire perdu" (la voix du roi Atlante), "Le monde (presque) perdu" (voix de Zarn), "Drôles d'oiseaux" (voix de Sekhuru), "Transformers" (Galvatron) et "Transformers 3" (Sentinel prime), ainsi qu'à des dessins animés (The Simpsons) et plusieurs jeux vidéos (Seaman, Civilization IV, Kingdom Hearts: Birth by Sleep, Star Trek Online, etc).

Première apparition des héros de "Star Trek" dans les médias le 4 mars 1967.
Léonard Nimoy apparut pour la dernière fois au cinéma en 2013 sous les traits de Mr. Spock Prime, dans le 9eme film de la saga : "Star Trek: Into Darkness" de J.J. Abrams.
Léonard Nimoy réalisa surtout 12 films dont les "Star Trek" III et IV et certains épisodes de quatre séries TV (Night Gallery, Vincent, Matthew Star et Hooker) et fut scénariste sur "Star Trek, le film" ainsi que les "Star Trek" III, IV et VI.
Il sortit également 5 albums de musique pop, folk et country et était passionné de photographie.
Léonard Nimoy publia également deux livres biographiques "I Am Not Spock" en 1975 et réédité en 1997 et "I Am Spock" en 1995.
Tous les lecteurs jugent que ces deux livres sont très bien écrits, intéressants et plaisant à lire. Il n'y a pas de scandales ni d'attaques personnelles, juste l'expression du plaisir qu'un acteur ressent en jouant la comédie ou en dirigeant les acteurs quand il passa derrière la caméra.
"Longue vie et prospérité" aurait déclaré Mr.Spock. Mais aujourd'hui il aurait sans doute trouvé cela "très illogique" et "la fin parfaitement prévisible. La mort est la suite logique de cet éventualité". Léonard Nimoy va nous manquer.

Document Reuters.
La physique de Star Trek
Celui qui incarna "Mr Spock" dans la série "Star Trek" était devenu une icône pour toute une génération passionnée de science-fiction mais également de science.
En effet, bien plus qu'une série divertissante, "Star Trek" a inspiré des vocations artistiques mais également scientifiques, notamment des astronomes, des physiciens et des ingénieurs en astronautique comme l'a rappelé la NASA. Ce n'est pour rien que la première navette spatiale a été baptisée "Enterprise" !
Loin d'être délaissée par la communauté scientifique, rappelons que des ingénieurs et des chercheurs ont été inspirés ou ont collaboré à "Star Trek" afin de rendre sinon les aventures du moins les concepts et les techniques aussi plausibles que possible.
L'ingénieur expert en astronomie André Bormanis et le physicien théoricien Michio Kaku ont été consultants sur la série TV tandis que Lawrence Krauss, également physicien théoricien, a écrit un livre sur "La Physique de Star Trek".
Citons également Harold G. White, ingénieur de la NASA qui étudia un vaisseau spatial à déformation spatio-temporelle ou "warp drive" (cf. cette vidéo sur YouTube) qu'il baptisa "IXS Entreprise".

Présentation de la navette spatiale "Enterprise" le 17 septembre 1976 sur la base de Palmdale, en Californie.
A l'avant-plan on reconnaît Leonard Nimoy, George Takei, Kelly DeForest et James Doohan.
Les scénaristes de "Star Trek" ont inventé un vaisseau spatial et des technologies qui en 1966 étaient très en avance sur leur temps et le restent encore 50 ans plus tard.
Ainsi la propulsion à antimatière, le warp drive (déformation spatio-temporelle), la téléportation, le cloaking device (l'invisibilité) et les androïdes resteront pour longtemps de la science-fiction.
On sait comment cela fonctionne en théorie et il y a des avancées scientifiques dans certains de ces domaines mais à un échelle très modeste. En revanche, l'application de ces concepts requiert des technologies que nous ne possédons pas encore.

Le communicateur de "Star Trek" est l'ancêtre de notre GSM et de la smartwatch.
Extrait de "Star Trek, le film" sorti en 1979.
Même les personnages androïdes de "V-ger" et "Data" resteront pour longtemps de la science-fiction malgré tous les efforts du DARPA, de Honda et IBM parmi d'autres pour fabriquer des robots et des ordinateurs intelligents.
En revanche, le communicateur portable est l'ancêtre du GSM et de la smartwatch, l'ordinateur de bord est l'ancêtre de nos bases de données en ligne combinées aux Big Data et au réseau de satellites, autant de concepts qui sont devenus réalité, même si leur encombrant ferait sourire Scotty, l'ingénieur en chef de "Star Trek".
D'ailleurs les nouvelles séries "Star Trek - The New Generation" (1987-1994), "Deep Space Nine" (1993-1999) et "Voyager" (1995-2001) usent et abusent de concepts issus tout droit des récentes découvertes en astrophysique, en physique quantique et en cybernétique : trous noirs, énergie sombre, théorie des cordes, boucle temporelle, androïdes, etc.
Enfin, si la science-fiction n'a jamais vraiment passionné le public francophone, à côté du phénomène médiatique, "Star Trek" reste un phénomène de société avec près de 3.5 millions de fans anglophiles sur Facebook.



En hommage au célèbre "Mr Spock", voici l'histoire de "Star Trek". Retour sur une série culte.

*

*

*


Pour plus d'informations
Leonard Nimoy, site officiel
Leonard Nimoy's Life in Pictures, AP Images
Filmographie de Léonard Nimoy, IMDb
Filmographie de Léonard Nimoy, Aveleyman
Star Trek, site officiel
Star Trek et la NASA, Cité de l'Espace (avec vidéos)
Leonard Nimoy, Wikipedia
La téléportation, Luxorion
Star Trek sur Facebook
La Physique de Star Trek, Lawrence Krauss, Bayard jeunesse-Science, 1998
NASA Remembers Leonard Nimoy
Leonard Nimoy: The Origin of Spock's Greeting, YouTube
NASA unveils its warp drive concept spaceship IXS Enterprise (concept de Harold G.White)
I am Not Spock, Leonard Nimoy, Buccaneer Books, 1975/1997
I am Spock, Leonard Nimoy, Hyperion, 1995.

mardi 15 juillet 2014

Les insectes mécaniques de Mike Libby

Mike Libby est un sculpteur et artiste américain dont les oeuvres ont déjà été présentées dans différentes galeries autour du monde. Il fonda l'entreprise Insect Lab en 1999 à travers laquelle il commercialise ses créations.
A côté des modèles, collages et autres sculptures qu'il a créé, il a fabriqué de surprenants insectes mécaniques (scarabées, papillons, araignées, abeilles, scorpions, etc.).


La carapace, les ailes et les appendices sont celles de véritables insectes morts dont l'espèce n'est pas en danger et qu'il achète auprès de dealers officiels aux quatre coins du monde.
Pour l'assemblage et les positions de l'animal, Mike a pris conseil auprès de différents musées zoologiques et spécialistes.
Le corps et l'intérieur de l'animal sont fabriqués avec des pièces en métal et notamment du cuivre chauffé et peint et divers éléments d'horlogerie comme des ressorts, des roues dentées et autres balanciers.
Ainsi que le précise Mike, ses oeuvres n'ont pas été conçues pour fonctionner mais elles peuvent l'être. En tout cas, le résultat est magnifique.


Ces objets sont en vente. Le prix de ses créations varie entre 450$ et environ 1500$. Mike a également publié un livre iconographique sur le sujet.
Preuve de la réputation de l'artiste, le prix de sa collection a augmenté de 375% depuis 2006.

lundi 19 mai 2014

Le Musée d'Art de NYC publie 400000 images sur Internet

Le Musée Métropolitain d'Art de New York (MMA) vient de publier sur Internet quelque 400000 images numérisées en haute résolution extraites de ses collections encyclopédiques. Vous pouvez les consulter via le lien suivant :


L'Open Data
A travers cette action éducative, le MMA rejoint les nombreux autres musées à travers le monde offrant un accès libre à leurs collections, rendant le concept d'Open Data encore un peu plus concret.
Dans le cadre de l'initiative "Open Access for Scholarly Content" (OASC), ces documents sont dans le domaine public et peuvent être utilisés sans aucune restriction par toute personne intéressée et dans tous les médias.

Gros plan sur un autoportrait de Rembrandt de 12 mégapixels (1660).

jeudi 6 février 2014

Fireball XL5 de Gerry Anderson

Les lecteurs nés vers 1960 et les plus âgés se rappellent peut-être d'une série TV destinée aux enfants intitulée "Fireball XL5". L'ayant récemment retrouvée sous forme vidéo en naviguant sur le web et étant donné qu'il y a peu de littérature en français sur le sujet, voici ma participation à sa documentation.



Scénario
"Fireball XL5" était une série de science-fiction réalisée par Gerry Anderson avec des maquettes et des marionnettes animées électroniquement. Sa femme Sylvia Anderson participa aux dialogues.
Notez l'absence de
combinaison spatiale !
Le scénario de "Fireball XL5" raconte les aventures interplanétaires de l'équipage du vaisseau spatial Fireball XL5 patrouillant dans le Secteur 25 de la Galaxie en 2062 et 2063. Leur QG se situe à Space City d'où décolle la fusée XL5.
L'équipage visite pas moins de 22 planètes (Amazonia, Conva, Granatoid, Magneton, Planet 46, etc) parfois colonisées ou inhabitables, hostiles, chaudes, glacées, transformées en prison, riches en minerais ou abritant une faune ou une flore extraterrestre.
L'équipage se compose du Colonel Steve Zodiac de la Patrouille Spatiale Mondiale; de la jolie Docteur Vénus, spécialisée en médecine spatiale; d'un navigateur et ingénieur d'âge moyen, le professeur Matthew "Matt" Matic a l'accent prononcé et du copilote Robert le robot, anthropomorphique et transparent.
Le Commandant Wilbur Zéro (Général dans la version française) apparaît dans certains épisodes ainsi que Jock Campbell (Jacques), un Ecossais chef ingénieur de la cité spatiale.
La Dr. Vénus est parfois accompagnée d'un lazoon, un animal semi-télépatique baptisé Zoonie (Zazou en français) qui s'empêtre partout et énerve le supérieur du Colonel Zodiac...
D'autres personnages apparaîtront par la suite comme le Capitaine Dix, le Lieutenant Ninety, le Fuel controller Lane, l'opérateur radio Shute, Eleanor Zéro (la femme du Commandant), son fils Jonathan Zéro qui profita de la fusée XL5 pour son voyage de noce (album de 1964), sans oublier quelques vilains.
Robert est le seul personnage des séries d'Anderson auquel Gerry a prêté sa propre voix, il est vrai modifiée grâce à un larynx artificiel (le même qu'on utilise en médecine).
Bien entendu tous ces héros sont célibataires mais pas pour autant disponibles. Ainsi, on remarque de temps en temps que la Dr. Vénus drague le Colonel Zodiac mais celui-ci n'y voit que du feu.
De son côté, le professeur Matic passe son temps à fabriquer des gadgets en frappant du métal avec un petit marteau et le Robert le robot clame régulièrement "On our way home" (sur le chemin du retour) !
Tournage et production
La série "Fireball XL5" comprenait 39 épisodes d'environ 25 minutes filmés en noir et blanc sur une pellicule de 35 mm avec une seule caméra et en son mono.
Le projet nécessita la collaboration de 16 personnes. Reg Hill était producteur associé et cinq personnes assuraient la direction de la production : Gerry Anderson, Alan Pattillo, David Elliott, Bill Harris et John Kelly.
La supervision fut assurée par David Elliott. La direction de la photographie fut prise en charge par John Read et Ian Struthers, la direction artistique par Bob Bell.
Les effets spéciaux furent réglés par Derek Meddings qui réalisa également certains dessins du synoptique, le décor musical fut composé, arrangé et dirigé par Barry Gray, le thème musical (titre) fut arrangé par Charles Blackwell.
Les voix furent assurées par Paul Maxwell, Sylvia Anderson, David Graham (qui dessina également quelques bandes dessinées), John Bluthal et Gerry Anderson.
Les animations furent réglées par le procédé Supermarionation inventé par Anderson et Provis (voir plus bas) et le décor sonore comme les prises de vue furent soignés jusqu'à chaque plan.
Vu l'intérêt d'Anderson pour la science-fiction, le titre originel de la série était "Century 21". Estimant qu'il ne sonnait pas bien commercialement, il fut changé en "Nova X 100" en préproduction. Comme cela ne convenait toujours pas, inspiré par la marque "Castrol XL", Anderson décida de l'appeler "Fireball XL". Mais de nouveau, le titre n'était pas assez convaincant à l'écran si bien qu'on lui ajouta "-5" qui devint finalement "Fireball XL5" lorsqu'il passa en production.
Le tournage commença en avril 1962. En parallèle, Anderson et son équipe préparèrent les bandes dessinées, le merchandising et Anderson essaya de vendre sa série à l'étranger.
Sur le plan financier, sachant que trois ans auparavant, Twizzle (voir plus bas) coûta 27000£ et utilisa peu d'effets spéciaux, on peut estimer que le budget de "Fireball XL5" s'éleva à plus de 40000£ soit plus de 120000€ actualisés. Pour information, à l'époque le salaire moyen d'un homme était de 200£ par an.
Distribution
La série "Fireball XL5" fut produite en association avec la chaîne britannique ATV et distribuée par ITC Entertainment (qui cessa ses activités en 1998 après le décès de son fondateur, Lew Grade).
Le premier épisode "Planet 46" fut diffusé sur ATV le 28 octobre 1962. La série sera diffusée durant 39 semaines. Le dernier épisode "Space Magnet" sera diffusé le 27 octobre 1963.
La série traversa difficilement l'Atlantique où elle ne fut diffusée aux Etats-Unis que sur une seule chaîne, NBC, entre 1963 et 1965, qui ne s'attendait pas à un tel succès. Elle fut ensuite adaptée en espagnol et en français.
Gerry Anderson tira également profit du merchandising. "Fireball XL5" sera proposée sous forme de jouets dont le "Space City Set", de poupées, de cahiers à colorier, de découpages et même d'un jeu (Fireball XL5 Space Race) proposé à l'occasion des fêtes.

La boîte de jouets “Fireball XL5 Space City Set” comprenant une fusée XL5 de 21", 
les fusées portatives, les jetmobiles et les figurines de Steve et ses amis. Aujourd'hui, 
selon sa qualité ce collector se négocie entre 200$ et 800$, certains
proposant même plus de 2000$ pour un kit complet.
A l'époque des dizaines de magazines présentaient les séries TV sous forme de bandes dessinées ou "Comic strips". Anderson profita de ce canal de distribution, vendant des licences à différents éditeurs.
Etant une adaptation de la série TV, le récit des bandes dessinées fut écrit par le scénariste Alan Fennell et les panneaux furent dessinés par Neville Main, puis Graham Coton et Mike Noble (qu'on retrouvera dans les bandes dessinées de Star Trek).


Pour la première édition, les planches ayant dû être déposées chez l'éditeur avant le tournage du premier film, la première BD fait encore référence à la fusée "C-21", certains détails des appareils sont approximatifs et les couleurs des costumes sont basées sur les concepts de préproduction. Ils seront conformes à la série TV dans les publications suivantes.

Ci-dessus, le dessin de préproduction de la fusée "C-21" proposé par Derek Meddings
en 1962 et la version finalement acceptée "XL5"

"Fireball XL5" sera proposée sous la forme d'une bande dessinée de 4 pages publiée chaque semaine dans le magazine "TV Comic" en commençant par le N°565 du 13 octobre 1962, jusqu'en 1964. 
Elle sera ensuite publiée dans le magazine "TV21" (anciennement "TV Century 21") entre 1965 et 1967. Il y eu une dernière publication dans le magazine "Countdown" en 1971.
Quatre albums annuels (les "annuals") de 92 pages comprenant 4 bandes dessinées en couleurs, 7 histoires sous forme de textes et 6 ou 7 jeux et puzzles seront également publiés entre 1962 et 1966 plus un album publié par TV21 en 1966 comprenant un écorché de la fusée en double page.


Les scénarii comme les textes de ces cinq albums ne respectent pas exactement la séries TV mais l'esprit y est. Seuls les textes de l'album de 1964 ont été écrits par Alan Fennel, tous les autres furent écrits et dessinés par de nouveaux talents.
Parmi ces dessinateurs il y eut Eric Eden, Eddie Paul, Gerry Embleto, Gerry Wood, B.Walduck, R.Hamilton, T.Hurst et H.Turner.


En 1963, le thème du générique "Fireball" (dont voici les paroles et la version longue) chanté par Don Spencer fit l'objet d'un single qui resta 12 semaines dans les charts anglais, atteignant la 32eme place.
La série TV sera diffusée sur certaines chaînes francophones sous le titre "Fusée XL5", de mémoire vers 1966, à confirmer.
En tous cas je me rappelle que je la suivais assidûment étant petit, me rappelant très bien du titre "XL5". J'étais frappé par l'effet de ralenti que donnaient les évolutions dans le vide et par la texture des paysages planétaires....
Etant donné que c'est l'un des premiers souvenirs que j'ai de l'astronautique et de l'astronomie, il est probable que cette série a contribué à ma passion pour ces disciplines. Cela valait donc la peine que je la retrouve !
Vu les difficultés que j'ai eu pour l'identifier avec mes souvenirs, je peux imaginer que d'autres amateurs prendront également plaisir à la revoir et de connaître l'histoire derrière la série.
Voici donc un échantillon de "Fireball XL5" pour les fans de Gerry Anderson et les nostalgiques des sixtees suivi d'une biographie de Gerry Anderson, probablement l'une des rares rédigées en français.



Biographie
Gerry Anderson est né le 14 avril 1929 au Royaume-Uni. Il travailla comme photographe puis dans un studio de cinéma. Durant la Seconde guerre mondiale, il travailla comme opérateur radio dans la RAF. Après la guerre, il entra aux Pinewood Studios. C'est à cette époque qu'il rencontra Lynda, sa première épouse. Ils auront deux enfants.
En 1955, il entra chez Polytechnic Films, une petite maison de production qui proposait des programmes pour la télévision. C'est à cette occasion qu'il fit la connaissance du caméraman Arthur Provis. La maison de production tomba rapidement en faillite.
Gerry Anderson et Arthur Provis décidèrent alors de fonder leur propre entreprise, Pentagon Films. Ils engagèrent trois anciens employés de Polytechnic Films dont une secrétaire nommée Sylvia que Gerry épousera un peu plus tard.
Mais après avoir réalisé quelques publicités, leur société fit également faillite. Anderson et Provis fondèrent alors AP Films, alias APF. Ils louèrent un manoir edwardien à Maidenhead, dans le Berkshire, à quelques kilomètres de la Tamise, connu sous le nom d'Islet Park.
Ils installèrent un téléphone en espérant recevoir rapidement leur première commande. Ils attendirent ainsi pendant 6 mois.
Pratiquement à court d'argent, ils reçurent un appel de Roberta Leigh, une auteur qui écrivait des romans pour les enfants et de sa collègue Suzanne Warner qui travaillait pour la chaîne Associated Rediffusion Television Company. Leigh cherchait une maison de production pour son personnage "Twizzle" qu'il fallait animer; c'était une marionnette.


Ce n'était pas la première expérience d'Anderson et Provis avec des marionnettes. Quand ils travaillaient pour Pentagon Films, ils avaient eu l'occasion de réaliser une courte publicité pour Kellogg's Corn Flakes, toujours très proche des enfants,  avec un petit personnage baptisé Noddy, qui était apparu à la télévision dans la série Noddy en 1955 (Noddy, personnage créé par Enid Blyton en 1949 est très connu des enfants Anglo-Saxons qui suivent encore ses aventures aujourd'hui).
Bien qu'Anderson et Provis étaient plutôt prêts à réaliser "Les Dix Commandements" et bien que le budget n'était pas élevé, 450£ par épisode, environ 1300€ actualisés, l'idée de la marionnette leur plut et ils signèrent le contrat.
Pour éviter que le personnage ne paraisse grotesque à la télévision, ils développèrent de nouvelles techniques de film (zoom, close-up, travelling, contrechamp, effets spéciaux) et de postproduction, quitte à couper des plans ou effectuer des truquages.
"The Adventures of Twizzle" fut diffusée le 13 novembre 1957 à 16h30. La série reçut une bonne critique. AP Films recevra une nouvelle commande pour 26 épisodes d'une nouvelle série basée sur une fiction écrite par Leigh baptisée "Torchy the Battery Boy". Cette fois ils disposaient d'un budget de 27000£.
Ils recevront ensuite la commande de la série "Space Patrol" puis d'une troisième série intitulée "Four Feather Falls" en 1960 comprenant 39 épisodes de 13 minutes.
Supermarionation
C'est pour la série 'Four Feather Falls" en particulier qu'Anderson et Provis inventèrent le procédé qui sera plus tard baptisé "Supermarionation". Ils ajoutèrent aux marionnettes mécaniques des systèmes électroniques afin d'obtenir une synchronisation aussi précise que possible, notamment entre les mouvements de la bouche des marionnettes et la parole ainsi qu'entre les déplacements des objets et le déclenchement des effets spéciaux (éboulements, explosions, effets lumineux, etc). Selon Anderson, cette technique fonctionnait dans 90% des cas.
Complété par de nouveaux effets spéciaux et pyrotechniques, le procédé Supermarionation assoira définitivement la réputation du studio d'Anderson et Provis qui deviendra une référence pour tous les amateurs, et professionnels, d'effets spéciaux.

Version colorisée en 1994 par Colour Systems Technologies

L'épisode pilote fut proposé à Granada Television qui commanda 39 épisodes. Entre-temps, le manoir devint trop étroit pour leurs ambitions et AP Films déménagea dans une ancienne ferme à Ipswich Road.
Granada ne financera pas d'autres séries, ce qui déçut fortement Anderson. Néanmoins il avait déjà préparé une autre série, "Supercar".
Cette nouvelle série fut diffusée sur le petit écran en 1961 sur le réseau de la chaîne anglaise ATV puis vendue à 107 chaînes américaines, devenant le programme le plus regardé par les enfants.
Notons que l'épisode "Rescue" fait référence à la conquête spatiale. En 3 ans, cette série et le merchandising qui l'accompagna rapportèrent 750000£ soit 2.1 millions d'euros actualisés.
Fort de ce succès, en suivant l'actualité et notamment la compétition entre Russes et Américains pour la conquête de l'espace et le discours du président John F. Kennedy de 1961 déclarant qu'il voulait "envoyer des hommes sur la Lune et les ramener sain et sauf dans moins d'une décennie", Anderson profita de l'opportunité pour se tourner vers la science-fiction.
En 1962, il proposa la série "Fireball XL5" et enchaîna ensuite les séries de science-fiction, mais cette fois en couleurs, chaque nouvelle série apportant des améliorations sur les plans de l'animation et de l'image.
AP Films qui sera renommée Century 21 Production en 1965 créa ainsi "Thunderbirds" (1963) qui apporta à Anderson une renommée internationale, puis "Stingray" (1964), "Captain Scarlet and the Mysterons" (1967), "Joe 90" (1968) et "The Secret Service" (1969).
Ensuite Gerry Anderson réalisa des séries de fiction avec des personnages réels comme "UFO, alerte dans l'espace" (1970), "The Protectors" (1972), "Space 1999" alias "Cosmos 1999" (1975), "Terrahawks" (1983), "Dick Spanner, P.I." (1987), "Space Precinct" (1994), "Lavender Castle" (1999)", le dessin animé japonais "Firestorm" (2003) et "Gerry Anderson New Captain Scarlet" (2005).
Cette dernière série a coûté 23 000 000£. Selon la BBC, c'est le programme pour enfant le plus cher de la télévision britannique.
Gerry Anderson réalisa également 4 longs métrages : "Crossroads to Crime" (1960), "Thunderbirds Are Go" (1966), "Thunderbird 6" (1968) et "Doppelgänger" (1969) mieux connu sous le titre anglais "Journey to the Far Side of the Sun".
Plus récemment, des amateurs ont créé à petite échelle des versions numériques de certaines séquences de Fireball XL5 et Thunderbirds en images de synthèse 3D.
En 2004, Jonathan Frakes réalisa le film "Thunderbirds" (Les sentinelles de l'air) inspirée de la série TV pour Universal Pictures. En résumé, c'est une mauvaise série B qui n'atteint même pas la moyenne.
Dans une interview accordée à la BBC, Gerry Anderson déclara en 2004, que quatre semaines avant la première du film, Universal Pictures lui proposa 750000$ pour de la consultance mais il refusa, jugeant que son rapport ne serait pas favorable.
Et de fait, quand il visionna le DVD qu'un ami lui prêta, il fut déçu par sa qualité et le manque de respect du producteur comme du réalisateur pour tout le travail que son équipe et lui avaient accompli pour réaliser la version originale en Supermarionation. Son opinion négatif fut partagé par d'autres fans (Cf. IMDb).
Gerry Anderson nous quitta le 26 décembre 2012. Il avait 83 ans.
Et dire que Gerry déclara un jour "je n'aime pas travailler avec des marionnettes, le plus difficile". Il avait bien du talent !
Les techniques cinématographiques qu'il inventa avec son équipe influenceront beaucoup de cinéastes et de réalisateurs, des producteurs de Star Trek à Stanley Kubrik et George Lucas. Gerry Anderson passa en quelques années du statut de bricoleur de génie à celui de légende du 7eme art.
Pour conclure, voici deux reportages sur l'oeuvre de Gerry Anderson :


*


Pour plus d'informations
Il existe sur YouTube et Dailymotion quelques versions françaises des séries de Gerry Anderson.
La série "Fireball LX5" est disponible en ligne sur TV.com mais uniquement aux Etats-Unis.
Les séries et les films sont disponibles en DVD.
Garry Anderson, sa biographie rédigée en anglais
Fireball XL5 sur Wikipedia UK
TV Comic pour les bandes dessinées
ATV
Le blog Studio 77 dont plusieurs articles présentent des planches des bandes dessinées
Le site de Robin Day consacré à Fireball XL5 (images 3D, albums, etc).

lundi 27 janvier 2014

Illusions d'optiques et trompe-l'oeil

Les illusions d'optiques sont souvent déconcertantes. Voyez ce dinosaure T-Rex dont la tête semble vous suivre du regard. Surprenant ! L'objet est inspiré des travaux de l'inventeur et magicien Jerry Andrus.


Voici des illusions d'optiques plus classiques mais qui nous laissent tout aussi perplexes.


Enfin, dans le même style que le "body painting", le Street Art et ses peintures en trompe-l'oeil dessinées au sol présentent parfois un effet 3D spectaculaire. Voici un autre lien et un site consacré aux trompe-l'oeil.


Le rôle de l'apprentissage
Pourquoi sommes-nous ainsi trompé par des objets apparemment ordinaires et parfois très simples?
En fait, depuis que nous avons ouvert les yeux, notre cerveau est conditionné pour observer et analyser les objets afin d'en déduire certaines propriétés qui guideront nos actes.
En réalité nous ne voyons que ce que notre cerveau interprète, nos yeux n'étant sur le plan physique qu'une extension de notre cerveau ; nous "pensons voir" serait le mot exact et il s'applique en force aux aveugles qui recouvrent la vue et dont le cerveau doit apprendre à discerner les objets.
Rappelez-vous le film "Premier regard" d'Irwin Winkler (At First Sight, 1999) basé sur une histoire vrai où Val Kilmer confond une pomme avec son image et croit que les ombres sont des objets solides. Cela prête à sourire mais quand on y pense, c'est un vrai problème que même nos robots les plus sophistiqués ont encore du mal à résoudre !

2009, Bleeker et l'agence Athem ont transformé le building situé au 29 avenue George V à Paris
à la manière de Dali. Consultez ce blog pour d'autres images de ce chef-d'oeuvre du trompe-l'oeil.
Des expériences ont été réalisées avec des chatons prouvant que si on les empêche d'avoir des repères verticaux par exemple - ils vivent dans un local sans repère contenant uniquement des barres horizontales - , ils seront incapables de reconnaître les barres verticales et buteront dessus, comme s'ils ne les voyaient pas !
Nous voyons les barreaux verticaux et horizontaux, nous pouvons les éviter car nous avons appris à les reconnaître dans l'espace. Nous avons également appris les effets de la perspective et qu'un objet change apparemment de taille et d'aspect quand il se déplace, induisant dans notre esprit l'idée que sa dimension par exemple dépend de sa distance.
Contrairement aux animaux, on ne s'étonne pas de voir disparaître un objet mobile derrière une surface opaque. On peut même déduire sa position future alors qu'il est caché. Avec un peu d'entraînement certains animaux peuvent y parvenir et devenir des partenaires de jeu.
Mais contrairement aux animaux, on ne joue pas avec des ombres ou des points lumineux en mouvement, quoique ceux qui jouent sur consoles et ordinateurs pensent peut-être le contraire !...
Nous avons également appris qu'un cube par exemple est un volume présentant des jeux d'ombres bien précis, et en principe, ce n'est pas un polyèdre à deux dimensions, encore moins une forme présentant en même temps des volumes et des creux.

Un dessin, ce n'est pas une photo, réalisé par redragon. C'est probablement l'un des plus réalistes du monde.
L'artiste le réalisa avec les logiciels Poser 4 et Photoshop 6.
C'est justement sur ces a priori concernant la perspective, les ombres et les lumières que jouent les magiciens et les amateurs d'illusions d'optiques; c'est parce que nous avons l'habitude de voir les choses sous un certain angle et sommes persuadés qu'elles ne peuvent pas exister autrement qu'elles nous paraissent aussi réalistes.
Un mathématicien vous dirait immédiatement qu'un point de vue géométrique en vaut un autre. Ainsi, en topologie, il n'y a pas de différence entre un cercle et un ruban de Moebius, un 0 et un 8. Pourtant nous sommes persuadés que ce sont deux formes différentes, mais on peut transformer l'une en l'autre.
Les illusionnistes tiennent compte de tous les facteurs entrant dans l'identification d'un objet : sa topologie, l'effet stéréoscopique, la distance de l'oeil dominant aux arêtes de l'objet, les jeux d'ombres, les reflets, la prédominance du cerveau gauche ou du cerveau droit, etc., afin de nous tromper le mieux possible ! Et l'effet est réussi !
Le plus surprenant est que nous savons qu'il y a un illusion d'optique et que notre cerveau nous trompe, et pourtant généralement on ne repère pas l'illusion !

samedi 11 janvier 2014

Body paint ou l'illusion de la réalité

Des peintures de guerre des indiens Sioux ou de nos soldats camouflés aux peintures rituelles des peuplades de la vallée de l'Omo pour citer un exemple très artistique, la peinture corporelle est passée du statut de moyen d'expression particulier d'une culture ou d'une fonction pratique à celui d'un art à part entier.
Voici deux réalisations récentes particulièrement esthétiques.


Voyez-vous les cinq femmes peinturlurées ? Bien. L'image a ensuite été détourée et posée sur un fond approprié. Ci-dessous, la variante de la nuisette sexy. Monsieur comme madame apprécieront.


Quand on y réfléchit, cela pourrait devenir les vêtements de demain. Pourquoi pas quand on sait qu'il existe des textiles en spray, rappelez-vous cette innovation présentée en 2010 par Paul F. Luckam de l'Imperial College de Londres. Une collection de vêtements créés avec cette matière avait même été présentée.
Quant à la version futuriste du body paint, ne la cherchez pas dans le futur, ce sont les avatars d'aujourd'hui, et les scanners 3D vous permettent même de les créer sur base de votre image !

*

dimanche 29 décembre 2013

Des cartes-mères recyclées en table basse

Depuis quelques années, David Maloney avait amassé des cartes-mères et d'autres accessoires de vieux ordinateurs dans son garage avec l'idée un jour de réaliser un projet. Le temps passa jusqu'au jour où l'idée lui est venue.
Il fit une épure. Lorsqu'il fut satisfait du projet, il prit les planches de bois qu'il possédait, les scia à dimension, acheta des visses et des plaques de verre et se mit au travail. Voici le résultat.

*

Il s'agit en fait de deux tables basses emboîtées fabriquées avec les planches d'un noyer d'Amérique (noyer noir) provenant d'un arbre qu'il avait coupé il y a plusieurs années.
La table intérieure sert de support sur lequel une vingtaine cartes-mères ont été vissées. La seconde table est couverte de plaques de verres sur ses faces visibles et, idée géniale, David a fixé des LED sur tout le périmètre. Elles sont programmées pour s'allumer quand il fait sombre.
Les jeux d'ombres et de lumière la transforment ainsi en une magnifique sculpture contemporaine. George Lucas ou Steven Spielberg ne l'aurait pas reniée !
Pour plus d'information, consultez le blog The news is Broken de Maloney.

vendredi 13 septembre 2013

Lightwire Theater ou quand le talent illumine la scène

La troupe américaine "Lightwire Theater" fascine le public depuis qu'elle s'est présentée au concours "America's Got Talent" en 2012 et parvint en demi-finale.
Animant jusqu'à 60 personnages, les danseurs de cette troupe manipulent dans l'obscurité des structures lumineuses mesurant jusqu'à 4.80 m de hauteur représentant tout un bestiaire d'animaux préhistoriques et de plantes exotiques, allant du canard aux dinosaures en passant par des palmiers animés.
Mêlant la danse, le mime, la virtuosité et l'ingéniosité à l'humour, les Lightwire Theater reçoivent un franc succès partout où ils se présentent, et dernièrement au concours "The Best" organisé par TF1. Et de fait, personne n'a jamais vu un spectacle aussi surprenant où les jeux de lumière se mêlent à des effets 3D dynamiques !
Jugez par vous-même la prestation fantastique de ces danseurs talentueux.

L'audition

Le concours

Le show

jeudi 1 août 2013

Doel, un village abandonné

Doel est un petit village belge de la commune flamande de Beveren située au nord d'Anvers, sur la rive gauche de l'embouchure de l'Escaut, à quelques brasses des docks où accostent les supercontainers du monde entier.

Vue aérienne du village de Doel sur la rive gauche de l'Escaut.
Pour arriver dans le village, suivez la direction de Doel, dirigez-vous vers les docks 1708-1800 où s'alignent les hangars d'entreprises puis roulez encore quelques kilomètres vers le nord, localement dans une zone non balisée (j'ai l'impression d'être au bout du monde), pour rejoindre la chaussée Engelsesteeweg. C'est une longue voie sans issue orientée vers l'est qui conduit à Doel et qui se termine devant une digue culminant à environ 15 mètres de haut, protégeant le village d'une éventuelle crue du canal.

Doel vu depuis la digue. La chaussée d'Engelsesteweeg est sur la droite, coté nord.
Le Vieux Doel
Le village est délimité au sud par la rue Camermanstraat, au nord par la chaussée Engelsesteenweg, à l'ouest par la rue Hoofhuistraat et à l'est par l'Escaut. La centrale nucléaire de Doel est située 1 km plus au nord dont on voit les réfrigérants depuis le canal.
Réduit à un espace habité d'environ 150 ha, le village s'articule autour de 3 ou 4 rues perpendiculaires et comprend environ 300 habitations. 26 personnes y résident encore.
Profitant d'un weekend ensoleillé, je suis arrivé à Doel le dimanche 28 juillet 2013 au matin. A part les noeuds autoroutiers et les périphériques urbains un plus plus denses, la route était dégagée.

Les premières maisons qu'on aperçoit en arrivant à Doel, sur le côté droit de la chaussée d'Engelsesteenweg.
10h30. En arrivant à Doel, j'ai le sentiment étrange que le village est endormi. Tout est calme, trop calme, même pour un dimanche à la campagne.
Je ne vois personne et à peine une poignée de voitures sont garées le long d'Engelsesteeweg. Même le moulin à vent s'est figé. Je ne croise personne, juste une voiture s'éloigne et semble déserter le village.

Les surprises se succèdent...
Le temps est serein et je me dis qu'en principe le village devrait doucement se réveiller. Mais à mesure que l'heure avance, tout reste calme et inanimé. C'est étonnant car la chaussée principale est entretenue et rien ne laisse présager ce que je vais découvrir.


A mesure que je me rapproche de la digue qui se profile à l'horizon je découvre un rez-de-chaussée condamné et partiellement tagué, plus loin un graffiti sur une façade, puis deux puis c'est l'envolée fantastique !
C'est alors que je réalise que je suis bien arrivé dans ce village qu'on dit abandonné... Que s'est-il passé à Doel ? Comment un village peut être abandonné en Belgique ?

 

L'extension du port d'Anvers
Tout commença en 1963, lorsque le gouvernement décida d'augmenter la capacité du port d'Anvers et d'agrandir les docks, ce qui devait entraîner l'expropriation de tous les propriétaires de Doel et du pays de Waas et la disparition du village.

 
*

En 1968, on interdit les nouvelles constructions puis vint la crise des années '70 et le projet tomba à l'eau. Mais le projet d'expropriation n'a jamais réellement été abandonné et est revenu à l'ordre du jour des gouvernements flamands successifs, y compris d'Agalev, les Ecolo flamands. 


En 2002, le conseil d'Etat gela toute modification du plan de secteur, Doel restait une zone résidentielle. Mais en 2007 la Région flamande prit la décision de construire un nouveau bassin à marée, le "Saeftinghedok", qui exigeait l'expropriation et la démolition de l'ancien Doel.


Certains habitants irréductibles se sont opposés au projet et ont reçu le soutien de divers artistes qui sont venus dessiner des graffiti sur les immeubles abandonnés.


Les médias se sont faits l'écho du combat des habitants et ont fait la renommée du village et de ses graffiti. Depuis c'est le status quo. 
D'ailleurs, au premier étage de cette maison située au carrefour de Pastorijstraat et Visserstraat je lis "Doel moet blijven !!!" (Doel doit rester !!!). C'est une banderole du comité de soutien Doel 2020 qui s'oppose à l'expropriation.

 

Près de l'ancienne pompe à essence un graffiti rappelle également leur action. Le combat n'est pas terminé.

 

Des graffiti et la désolation partout
A la fois curieux, incrédule et excité par ce que je découvre, j'explore le village. Soudain, au détour d'une rue je découvre un rat de dix mètres de long dessiné sur toute la façade d'une maison en brique ! La plupart ont été peints à la bombe en 2009 par Jiem, Roa et Resto. D'autres ont été peints à la brosse et la bombe en 2010 par Emer.K, Flavia et Grolou.

*

Plus loin plusieurs graffiti ornent tout le rez-de-chaussée d'une maison. Près de la digue, une maison entière a été peinte en rouge et des silhouettes ornent les fenêtres du premier étage. Mais l'intérieur est saccagé.
D'ailleurs la Gazette locale rappelle que les rares habitations encore meublées sont périodiquement cambriolées.


Au hasard de mon exploration, j'entre dans une maison abandonnée et découvre sur le mur du garage un immense graffiti aux couleurs chatoyantes que peu de visiteurs ont sans doute eu l'occasion de voir. 

*

Dans cette allée de parking, toutes les portes de garages ont été taguées et les tagueurs n'ont pas manqué d'imagination. Voici quelques exemples.

*
*

Plus loin les fenêtres sont couvertes de graffiti colorés. Entre deux blocs de maisons je découvre un terrain vague, une grande table en bois pourrie et des chaises en plastique renversées d'un autre âge. Ca ne me réjouit pas, ce coin est vraiment en friche et c'est la même situation un peu partout dans le village.


A mesure que je m'avance et parcours les rue je ressens une grande désolation : les rues sont désertes, dans beaucoup d'habitations les portes et fenêtres ont été condamnées, fermées par des plaques de contreplaqués ou même en métal.
Parfois les vitres sont brisées, les volets sont baissés, les portes de garage ont disparu ou les plans d'eau sont envahis de mousses et de détritus.


Même les pompes à essence ont été éventrées et taguées. Mises à vif, ces trois machines ressemblent encore plus à des robots, leur donnant un look de fin du monde.

Ces pompes vandalisées sont à l'entrée du village sur Engelsesteenweg.
D'autres endroits sont plus lyriques. Au fond d'une prairie, sur une barricade en ciment je découvre le graffiti d'un cochon bleu apparaissant entre des berces du Caucase, une plante invasive et toxique.


Sur le mur aveugle d'une autre maison en ruine, une sorte de corbeau a été dessiné dans son contexte. Un peu plus loin c'est un merle.

*
*

Malgré l'état délabré des lieux, même Mona Lisa a trouvé sa place au-dessus des ruines d'un feu ouvert.


Je m'enfonce dans une allée de garages et découvre les débris d'un banc et d'autres graffiti perdus parmi les fleurs sauvages. Ici aussi les tagueurs ont pris soin de mettre le personnage en situation.


Je visite une autre rue. Un chat abandonné attend sur le trottoir que le temps passe. Un autre s'est installé au Soleil à l'abri des regards indiscrets.
Voilà encore un mur tagué. Il mêle formes abstraites et personnages chimériques.

*
*
*
Au loin, entre les herbes sauvages je distingue deux têtes très colorées peintes sur le mur extérieur d'un hangar abandonné. Les herbes sont déjà hautes et dans quelques années les graffiti ne seront probablement plus visibles de la route.


Des peintures sur bois ont également été exposés sur certaines fenêtres.

 *

Des hommes et des fleurs parmi les graffiti
Tiens, des fleurs décorent l'appui de fenêtre extérieur de cette belle maison de maître en briques et un peu plus loin je découvre une habitation visiblement entretenue. Je suis dans la rue Hooghuistraat. Ici plusieurs dizaines de maisons sont encore habitées, en témoignent les voitures garées devant les portes.


Quelqu'un vient justement de sortir sa voiture du garage et s'en va avec son enfant. C'est étrange, comme si les graffiti et cette atmosphère de désolation ne dérangeaient pas cette famille.
Plus loin un habitant ouvre la porte d'un immeuble en bon état et en sort quelques colis. La maison lui appartient toujours mais il n'y habite plus. Il repart sans s'attarder.
L'église aussi est entretenue et vient de sonner midi ! Il y a donc encore un peu de vie à Doel !


Il y a également un café taverne baptisé "Doel 5" rue Parkstraat. Lui au moins n'est pas tagué ! Il est fréquenté par quelques touristes de passage et des jeunes qui discutent sur la terrasse.
Le "Doel5" donne sur un petit parc pour enfants. Le toboggan rouge et bleu est entretenu ainsi que les plantations mais le parc est désert et comme partout ici les murs des habitations qui l'entourent sont couverts de graffiti.


Le contraste est navrant et ne donne pas trop envie d'y jouer, d'ailleurs il n'y a pas d'enfants ici.
En revanche, il y a toujours un abri d'autobus et un bus municipal s'y arrête quelques fois par jour.
Au détour d'un raccourci je découvre une série de graffiti dans une allée et un portrait digne d'une BD signé MDZ. Quand il est bien dessiné, un graffiti vaut le détour.

*

Mais ce n'est pas partout le cas. Sur certaines façades les tagueurs se sont exprimés, occupant l'espace, sans plus. Les graffiti ont si peu de style qu'ils ne rendent pas hommage aux autres artistes. Je ne les ai pas présentés ici.
L'intérieur des habitations est pire encore. Certaines portes sont entr'ouvertes ou ont été retirées, laissant entrevoir un chaos de débris. Ces immeubles sont insalubres et certains devraient être rasés par sécurité.

*

Il est temps pour moi de faire une pause. Je m'installe sur un banc face à l'Escaut. Je croise quelques habitants de la région qui se promènent en famille ou se baladent à vélo sur la digue.
On dirait que deux mondes se croisent : d'un côté les touristes qui ne voient que les graffiti, de l'autre les habitants de la région qui ne les regardent même plus.


Sur la digue aussi le contraste est étonnant, entre tradition et modernité : le moulin à vent se dresse toujours face à la centrale de Doel... Oui, il y a de l'énergie à revendre ici.


Images infrarouge à 665 nm
Pour terminer cette visite, je profite de l'occasion pour faire quelques photos en proche infrarouge à 665 nm avec un APN spécialement converti à cet usage. Voici deux images composites prises en lumière blanche (les graffiti) et en IR (l'arrière plan). On se croirait vraiment sur une autre planète !

 *

Répertoire des villes et objets abandonnés
Detroit, a city in decay, blog Desert Places
50 villes fantômes et abandonnées à travers le monde, Urban Ghosts
33 plus beaux endroits abandonnés du monde, BuzzFeed
Les villes fantômes les plus étranges du monde, iO9
17 villes abandonnées autour du monde (avec géolocalisation), Though Catalog.
Cet article a été consulté par plus de 1500 internautes et a été référencé sur d'autres sites. Il a également inspiré un reportage TV de la Une (RTBF) fin 2013. Merci pour votre intérêt.